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Liban

Ségolène Royal dans un pays en pleine crise

Lors de son arrivée à l’aéroport de Beyrouth, Ségolène Royal a été accueillie par le député Walid Joumblatt (D), président du Parti socialiste progressiste (PSP) et l’un des chefs de la coalition anti-syrienne du 14 mars. 

		(Photo : AFP)
Lors de son arrivée à l’aéroport de Beyrouth, Ségolène Royal a été accueillie par le député Walid Joumblatt (D), président du Parti socialiste progressiste (PSP) et l’un des chefs de la coalition anti-syrienne du 14 mars.
(Photo : AFP)
Ségolène Royal est arrivée au Liban à la veille d’une grande manifestation ce vendredi de l’opposition, qui réclame la formation d’un cabinet d’union nationale. La candidate à la présidentielle française a décidé de poursuivre sa visite de trois jours malgré les conseils de l’ambassade de France à Beyrouth d’écourter son séjour en raison de la grave crise politique que traverse le pays.

De notre correspondant à Beyrouth

Pour son premier déplacement à l’étranger depuis qu’elle a été désignée par le Parti socialiste (PS) pour mener la bataille de la présidentielle, Ségolène Royal a donc choisi le Liban. A l’aéroport, elle a été accueillie par le député Walid Joumblatt, président du Parti socialiste progressiste (PSP) et l’un des chefs de la coalition anti-syrienne du 14 mars. Quelques heures après son arrivée, l’ambassadeur de France lui a conseillé d’écourter son séjour, en raison de la situation sécuritaire précaire qui règne au Liban, après la décision de l’opposition de déclencher, dès vendredi, un vaste mouvement de protestation populaire pour faire tomber le gouvernement pro-occidental de Fouad Siniora. Mais la candidate socialiste a insisté pour poursuivre sa visite qui doit s’achever samedi.

Ségolène Royal a donc commencé son apprentissage de candidate officielle en matière de politique étrangère par l’un des pays les plus tumultueux et complexes du Proche-Orient. Elle a entamé son programme de rencontres en présentant ses condoléances aux parents de Pierre Gemayel, le ministre de l'Industrie assassiné le 21 novembre. Elle a lancé un appel au dialogue et à la réconciliation après s’être entretenu pendant une heure avec le père de la victime, l’ancien chef de l’Etat Amine Gemayel. « Je forme le voeu que reculent ces déchirements tragiques et que se lèvent de nouvelles forces de vie, a-t-elle déclaré. Le progrès du monde a besoin d'un Liban réconcilié avec lui-même. Notre responsabilité commune, c'est de permettre aux jeunes de s'y construire un avenir heureux, et de permettre à chaque enfant de naître dans un pays en paix. La tâche est difficile, les situations sont complexes mais les énergies humaines finiront par l'emporter ». La candidate socialiste a promis que « la France [ferait] tout ce qu'elle peut auprès du Liban pour permettre que se lève cette espérance ».

Ségolène Royal s’est gardée d’accuser qui que ce soit dans l’assassinat de Pierre Gemayel, alors que la coalition du 14 mars avait immédiatement pointé du doigt la Syrie. « Elle ne va pas se placer sur ce terrain là », avait d'emblée averti son directeur de campagne, Jean-Louis Bianco.

«Parler à toutes les parties»

Décidée à écouter « toutes les sensibilités », Mme Royal s'est entretenue avec Nabih Berry, président de la Chambre et leader du mouvement chiite Amal, l’une des principales composantes de l’opposition. Le chef du législatif lui a assuré que la rencontre prévue ce vendredi avec des députés de la commission des Affaires étrangères serait maintenue, mais n’aurait pas lieu au Parlement, situé au centre-ville, où doit se dérouler la manifestation de l’opposition. La candidate socialiste aura l’occasion, lors de cette rencontre, de discuter avec des députés de différents bords politiques, y compris le Hezbollah.

Au programme de la visite de Ségolène Royal également, une rencontre avec le Premier ministre et une visite du contingent français de la Finul, déployé au Liban-Sud. Elle s’y rendra à bord d’un hélicoptère car les routes seront certainement encombrées par les participants à la manifestation qui doivent commencer à converger vers Beyrouth dès le matin.

Ségolène Royal est arrivée à Beyrouth au moment même où le secrétaire général du Hezbollah appelait les Libanais à descendre dans la rue massivement. Lors d’une intervention télévisée, Hassan Nasrallah a estimé que le Cabinet Siniora a échoué et qu’il fallait le remplacer par un « véritable gouvernement d'unité nationale. L'opposition appelle tous les Libanais de toutes les factions et partis à se rassembler pacifiquement et participer à un sit-in illimité», a dit le chef du Hezbollah. La veille, l’autre principal leader de l’opposition, le général chrétien Michel Aoun, avait lancé un appel similaire.

Quelques heures plus tard, Fouad Siniora a adressé un message télévisé aux Libanais affirmant que son gouvernement de 24 membres, amputé des cinq ministres chiites, « resterait en place tant qu’il [continuerait] de jouir de la confiance du Parlement ». Or la coalition du 14 mars dispose à la Chambre d’une majorité contestée par l’opposition qui estime que les élections ont été organisées, au printemps 2005, conformément à une « loi injuste élaborée à l’époque de la tutelle syrienne ».

En prévisions de ces manifestations, l’armée libanaise et les forces de sécurité ont déployé des milliers d’hommes dans le centre de Beyrouth où se situe le siège du gouvernement. Le commandant de l’armée, le général Michel Sleimane, a assuré que ses troupes étaient prêtes à assurer la « protection de la liberté d'expression, empêcher les émeutes et attaques contre les biens publics et privés ». Il a ordonné à ses soldats de « protéger la sécurité de tous les citoyens, qu’il soient partisans de la majorité ou de l’opposition ». Mais ces propos n’ont pas suffi pour rassurer la population qui craint que la tension politique sans précédent ne dégénère en violences intercommunautaires.

par Paul  Khalifeh

Article publié le 01/12/2006 Dernière mise à jour le 01/12/2006 à 08:57 TU