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Espionnage

L’imbroglio Litvinenko

Alexander Litvinenko, en novembre 1998 à Moscou. Dans une conférence de presse, il dénonçait alors l'ordre du FSB qui aurait été de tuer l'homme d'affaires Boris Berezovski. 

		(Photo: AFP)
Alexander Litvinenko, en novembre 1998 à Moscou. Dans une conférence de presse, il dénonçait alors l'ordre du FSB qui aurait été de tuer l'homme d'affaires Boris Berezovski.
(Photo: AFP)

Alors que les résultats de l’autopsie du corps d’ Alexandre Litvinenko sont attendus à Londres, l'un des derniers contacts de l'ex-agent russe, l’italien Mario Scaramella, se trouve, lui aussi, contaminé avec du polonium. Après la découverte de traces radioactives dans des avions qui ont effectué des vols entre Moscou et Londres, les enquêteurs se tournent à nouveau vers la Russie. Dans le même temps, certains analystes n’excluent pas que l’élimination spectaculaire de Litvinenko soit liée à une lutte de pouvoir pour la succession de Vladimir Poutine en 2008.


L’ex-espion russe Alexandre Litvinenko restera dans l’histoire comme la première  personne victime d’un «assassinat radiologique», selon le professeur Peter D. Zimmerman, du King’s College de Londres. En effet, jusqu’à aujourd’hui, la seule victime du polonium 210 avait été, il y a près de cent ans, l’assistant de Marie Curie, qui a été à l’origine de la découverte du polonium, ainsi nommé en référence au pays d’origine de la scientifique. En effet, le prix Nobel de chimie, Marie Curie, était née en Pologne.

Alors que les résultats de l’autopsie du corps de Litvinenko sont attendus avec impatience, les enquêteurs britanniques privilégient la piste russe. C’est du moins ce qu' affirme la presse britannique. Les services de renseignement britanniques soupçonnent des «éléments criminels» en provenance de Russie, écrit The Guardian. Pour le quotidien britannique, «tout en écartant une implication du gouvernement de Vladimir Poutine, les enquêteurs  croient que seuls ceux qui ont un accès aux laboratoires de l’Etat pouvaient monter un complot aussi sophistiqué».

La piste des russes venus assister à un match de football

Les enquêteurs britanniques suivraient ainsi la piste d’un groupe d’au moins cinq hommes, venus dans la capitale britannique assister à un match de football entre le club londonien Arsenal et le CSKA de Moscou, le premier novembre dernier, le jour même où Litvinenko aurait été empoisonné.

Trois citoyens russes auraient déjà indiqué s’être rendus à Londres et y avoir rencontré l’ex-espion russe à l’hôtel Millenium, où la police a retrouvé des traces de polonium 210, affirme pour sa part le journal russe Kommersant. Les trois hommes sont diplômés de la même école militaire et ont travaillé pour des agences de sécurité officielles. L’un d’entre eux, Andreï Lugavoi, un ex-agent des services secrets russes (FSB), qui a côtoyé Litvinenko pendant une dizaine d’années, avait aussi la charge de la sécurité de l’ancien Premier ministre russe Egor Gaïdar, qui a été victime d’un mystérieux empoisonnement lors d’un récent voyage en Irlande, le lendemain de la mort de l’ex-espion russe, à Londres.

Aucun lien n’a été établi entre la mort de l’ex-espion et le troublant malaise de l’ancien Premier ministre. Sa fille, Maria Gaïdar, a cependant déclaré que son père avait été victime d'un «empoisonnement politique». Après une brève hospitalisation en Irlande, Egor Gaïdar est rentré à Moscou, où les médecins viennent de conclure à un «empoisonnement» de façon «non naturelle»en attendant des résultats d’analyses la semaine prochaine.

La piste du restaurant  de sushis

A en croire le journal britannique, The Independent, les enquêteurs suivraient également la piste du restaurant japonais de Piccadilly (centre de Londres) où des traces de polonium ont été décelées. C’est dans ce restaurant que l’ex-espion avait rencontré l’italien Mario Scaramella.

Or, Mario Scaramella, lui aussi, a été contaminé par du polonium 210, selon les révélations de la chaîne de télévision britannique Sky News. Personnage énigmatique, cet homme d'une quarantaine d'années, présenté comme un expert en sécurité et consultant international, avait affirmé avoir rencontré Litvinenko pour lui remettre une liste de personnes visées par les services secrets russes et lui transmettre des informations sur l’assassinat de la journaliste russe Anna Politkovskaïa, tuée le 7 octobre à Moscou, meurtre sur lequel Litvinenko était en train d’enquêter.

Tous les chemins mènent à Moscou

Dans cet imbroglio digne des romans d’espionnage, les pistes se multiplient, mais tous les chemins mènent à Moscou. L’ex-espion russe assassiné à Londres serait la «probable victime d’une lutte de clans», selon le quotidien français Libération. Cette «liquidation spectaculaire», après celle de la journaliste Anna Politkovskaïa, pourrait être liée aux «farouches batailles de succession» de Poutine en 2008, affirme le journal. A en croire le quotidien français, il y a, dans l’entourage de Vladimir Poutine, toute une classe de dirigeants qui a déjà «un certain nombre de crimes sur la conscience  et aurait peur du départ du Président prévu en 2008 ». Ces proches de Poutine chercheraient à « l’obliger à rester au pouvoir » en gâchant définitivement «son image en Occident, le privant de toute espèce de retraite dorée».

Suite au prochain épisode…



par Elisa  Drago

Article publié le 01/12/2006 Dernière mise à jour le 01/12/2006 à 17:48 TU

Audio

Jean-Frédéric Saumont

Correspondant de RFI à Moscou

«L'enquête sur l'empoisonnement d'Alexandre Litvinenko converge vers trois hommes.»

[01/12/2006]

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