Territoires palestiniens
Tension à Gaza, Blair en Cisjordanie
(Photo : AFP)
Des incidents sporadiques se sont produits lundi à Gaza, avec des échanges de tirs près du bâtiment du ministère des Affaires étrangères. Ces confrontations ont engagé des forces palestiniennes rivales, notamment des membres de la garde présidentielle (fidèle à Mahmoud Abbas) et des éléments de la police, laquelle dépend de l’autorité du ministère de l’Intérieur, tenu par les islamistes du mouvement Hamas. La «force exécutive » appartenant au parti islamiste s’est empressée de signaler qu’elle n’avait pas participé à ces confrontations et le Premier ministre Haniyeh a appelé le président Abbas à retirer ses forces de sécurité des rues de Gaza. Des échanges de tirs, qui n'ont pas fait de victime, opposant des activistes du Fatah à ceux du Hamas se sont également produits dans la matinée dans le quartier Al-Rimal.
En dépit de ces quelques escarmouches, le cessez-le-feu semble tenir. Les hommes armés des deux parties ont sensiblement réduit leur présence dans les rues de Gaza. La garde présidentielle de Mahmoud Abbas maintient toutefois des barrages sur les axes menant aux bureaux de la présidence. Ceux-ci ont été la cible de tirs de mortier ce dimanche, tandis que les forces du Fatah, le mouvement du président, s’emparaient de leur côté de deux ministères. L’accord de cessez-le-feu conclu entre le Hamas et le Fatah dimanche soir prévoit, notamment, le retrait des hommes armés des rues, l’arrêt des manifestations et la libération des personnes prises en otage par les deux parties.
Violence à Gaza pendant le weekend
Selon les habitants de Gaza, les affrontements de ce week-end ont été particulièrement violents. Ils ont fait trois morts et une trentaine de blessés dans la journée de dimanche, qui s’ajoutent à une quatrième victime samedi soir. L’un des blessés est le correspondant du quotidien français Libération, Didier François, qui a été blessé à une jambe et évacué ensuite en Israël pour y être soigné.
Ces violences avaient éclaté dimanche après la décision de Mahmoud Abbas d'appeler à des élections anticipées. Un scrutin vivement contesté par le Hamas qui contrôle le gouvernement depuis mars et sa victoire aux législatives de janvier. Le mouvement islamiste nie au président le droit de convoquer ces élections et affirme que Mahmoud Abbas porte la responsabilité de la rupture des négociations pour un gouvernement d’union nationale.
Le président palestinien estime, quant à lui, que de nouvelles élections sont «la seule voie de sortie» de la crise politique actuelle. Il espère également obtenir la levée des sanctions imposées par les Occidentaux depuis neuf mois, après l’installation du gouvernement issu du Hamas qui détient 74 sièges au parlement et le Fatah 45.
Tony Blair soutient Abbas
L’annonce de ces élections anticipées a, en effet, été plutôt bien accueillie par les pays occidentaux. Le Premier ministre britannique, Tony Blair, a rencontré lundi à Ramallah, en Cisjordanie, le président de l'Autorité palestinienne. Tony Blair a exprimé à Mahmoud Abbas son soutien, concernant l’idée d’élections anticipées dans les territoires palestiniens et a également annoncé une «initiative» pour débloquer le processus de paix au Proche-Orient : «J’espère que nous serons en position dans les prochaines semaines d’élaborer une initiative qui nous permette de soutenir tout particulièrement le développement et la reconstruction, qui allège la souffrance et l’épreuve du peuple palestinien». Tony Blair a également souligné l’importance pour la communauté internationale, dans son ensemble, d’une «solution authentique» concernant l’existence de deux Etats, l’israélien et le palestinien, pouvant vivre à côté l’un de l’autre. Cette initiative devrait être établie en coordination avec les Etats-Unis et d’autres Etats de la région.
De son côté, le président palestinien a demandé au Premier ministre britannique d’«œuvrer pour la fin du blocus économique» imposé aux Palestiniens. Mahmoud Abbas a qualifié de «très grave» l’actuelle crise palestinienne et de «grosse perte pour le peuple palestinien» les incidents qui ont opposé le Hamas et le Fatah ces derniers jours. Abbas a considéré que sa décision de convoquer des élections anticipées, rejetée par le Hamas, permettra de former «un gouvernement d’union composé de technocrates». Il s’est aussi déclaré disposé à rencontrer le Premier ministre israélien Ehud Olmert le plus vite possible. Tony Blair lui transmettra sûrement ce message, lors de leur entretien à Jérusalem.
Risques de crise interpalestinienne profonde
Les observateurs pensent toutefois que le président de l’Autorité palestinienne est entré dans une sorte d’épreuve de force avec le Hamas, et qu’il n’a aucun intérêt à se soumettre à un test électoral qui pourrait même être nuisible pour le Fatah et pour Abbas lui-même. La cohabitation semble difficile, voire impossible, entre les laïcs du Fatah, maintenant favorables à un dialogue avec Israël, et les islamistes du Hamas, appuyés notamment par l’Iran, qui prennent des positions de plus en plus radicales, refusant de reconnaitre l’Etat hébreu et les traités conclus dans le passé. Le Hamas figure sur les listes des organisations terroristes établies par les Etats-Unis et par l’Union européenne. La présente crise traduit également une division profonde qui va en s’aggravant, entre les Palestiniens de Gaza, où le Hamas détient une position dominante, et la Cisjordanie où le Fatah est largement majoritaire. Des clivages qui sont surement suivis avec beaucoup d’attention par les responsables israéliens.par Antonio Garcia
Article publié le 18/12/2006 Dernière mise à jour le 18/12/2006 à 18:09 TU