Somalie
Le gouvernement de transition à Mogadiscio
Composé d'une vingtaine de véhicules et sécurisé par plus d'une centaine de soldats éthiopiens, le convoi du Premier ministre du gouvernement de transition somalien, Ali Mohamed Gedi, a fait son entrée à Mogadiscio alors que des milliers d'habitants de la capitale réclamaient le départ des troupes éthiopiennes.
(Photo : AFP)
Après s'être entendu avec les chefs coutumiers et religieux de la capitale à Afgoye, une localité située à une vingtaine de kilomètres de Mogadiscio, le Premier ministre du gouvernement de transition, Ali Mohamed Gedi, a fait son entrée dans la ville vendredi après-midi, à la tête d'une délégation de ministres. Peu avant son arrivée, des milliers de personnes étaient descendues dans les rues de Mogadiscio pour manifester leur hostilité aux troupes éthiopiennes qui ont chassé les Tribunaux islamistes de la capitale. Les manifestants se sont dispersés à la demande des chefs coutumiers.
Mohamed Olad Hassan, le correpondant de RFI à Mogadiscio, contacté vendredi
«La situation à Mogadiscio est assez stable aujourd'hui, mis à part quelques démonstrations contre les troupes éthiopiennes dans la capitale.»
Dans une conférence de presse, Ali Mohamed Gedi a déclaré que l’armée éthiopienne va rester en Somalie «aussi longtemps que le gouvernement fédéral de transition en aura besoin. On a besoin de stabiliser la Somalie pour la stabilité de nos voisins. Nous remercions beaucoup le gouvernement et le peuple d’Ethiopie. Cette victoire a été obtenue par les deux pays et leurs deux gouvernements». Le Premier ministre somalien a estimé que la majorité des forces islamistes ont été détruites et que les Tribunaux islamiques «n’existent plus». Il s’est aussi déclaré convaincu que la victoire des troupes gouvernementales soutenues par les éthiopiens allait permettre de «repousser l’expansion du terrorisme dans toute l’Afrique».
Des chars et des blindés éthiopiens pour sécuriser le gouvernement de transition
Vendredi, des chars et des dizaines de camions militaires éthiopiens étaient déployés près de l’hôpital de Banadir, au sud de la ville, où était installé l’ancien quartier général des Tribunaux islamiques, en face de l’ancienne ambassade américaine. La présence militaire gouvernementale et éthiopienne ainsi que la proclamation de l'état d'urgence, jeudi, n'ont toutefois pas empêché des pillages enregistrés dans la capitale, après le départ des forces islamistes mercredi soir.
Mohamed Ali, un habitant de Mogadiscio contacté jeudi.
«Il y a des affrontements entre différents clans qui se disputent le butin; plus personne ne contrôle la situation.»
Une habitante de Merca, à une centaine de kilomètres au sud de Mogadiscio.
«A Merca, la situation s'est vraiment dégradée, des pillards sont arrivés et ils rançonnent les gens.»
L’offensive déclenchée il y a dix jours par le gouvernement de transition installé à Baidoa, avec l’appui militaire de l’Ethiopie voisine, a provoqué la déroute des milices des Tribunaux islamiques qui contrôlaient depuis le mois de juin Mogadiscio et plusieurs régions du sud et du centre du pays. Les islamistes avaient imposé la loi islamique et restauré un semblant d'ordre après avoir mis en fuite les milices des chefs de guerre soutenus à l’époque par les Etats-Unis qui les accusent d’être liés au réseau terroriste al-Qaïda et prophétisaient une talibanisation du pays.
La ville de Kismayo, situé à 500 kilomètres au sud de la capitale, est désormais le dernier bastion des Tribunaux islamiques qui menacent maintenant de déclencher une stratégie de guérillas, assurant qu'ils ne se «rendront jamais aux Ethiopiens ni au gouvernement de transition» et que «les forces islamistes sont partout dans le pays», prêtes à «opérer d’ici quelques jours», à «frapper puis fuir». Selon les agences de presse, le Cheikh Hassan Dahir Aweys, principal dirigeant des islamistes somaliens, se trouverait maintenant dans ce port survolé vendredi matin par deux avions de combat éthiopiens.
L’aviation éthiopienne avait mené en début de semaine des raids contre l’aéroport de Mogadiscio, ce qui semble avoir été décisif pour mettre en fuite les miliciens islamistes. Les combats de ces derniers jours auraient fait entre 2 000 et 3 000 morts et plus de 4 000 blessés, selon le Premier ministre éthiopien Meles Zenawi. Mais le dernier bilan du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) publié mardi ne faisait état que de «dizaines de morts». Le chef du gouvernement éthiopien a promis un retrait rapide des troupes de son pays.
Louis Michel, Commissaire européen au développement
«On demande le départ de toutes les forces étrangères qui se trouvent en Somalie.»
Le Kenya a organisé hier des pourparlers de paix, mais aucun représentant du gouvernement provisoire somalien, ni aucun délégué éthiopien n’a jugé utile de se déplacer à Nairobi pour y rencontrer les islamistes. De son côté, l’Union européenne avait tenté une médiation, la semaine dernière, entre les islamistes et le gouvernement somalien de transition. Mais l’Europe refuse de condamner explicitement l’intervention des troupes éthiopiennes.
Les Nations unies ont annoncé jeudi la reprise de l’aide humanitaire d’urgence, vitale pour plus de dix millions de Somaliens soumis à une guerre permanente depuis 15 ans et la chute du régime de Siad Barre.
Article publié le 29/12/2006 Dernière mise à jour le 29/12/2006 à 14:14 TU