Algérie
Ouverture du procès Khalifa

(Photo : AFP)
Pour les 104 accusés impliqués, le procès s'est ouvert, ce lundi 8 janvier, à la cour de Blida (sud-ouest d’Alger). Les audiences seront consacrées au volet principal de l’affaire qui porte sur un trou de 3,2 milliards de dinars (environ 320 millions d’euros) constaté dans la caisse de la banque de l’ancien magnat algérien Rafik Khalifa. Celui-ci est jugé par contumace, la justice britannique n’ayant pas ordonné son extradition malgré la récente signature d’une convention d’extradition avec l’Algérie. Les accusés doivent répondre d’une trentaine de chefs d’accusation, dont ceux de faillite frauduleuse, association de malfaiteurs, abus de confiance, détournement de fonds, faux et usage de faux et corruption. Ils encourent des peines allant jusqu’à dix ans de prison. Cinq accusés sont en détention préventive depuis près de trois ans, 92 sont en liberté provisoire sous contrôle judiciaire et sept sont en fuite.
En mars 2003, trois des plus proches collaborateurs de Rafik Khalifa ont déjà été condamnés à un an de prison et 2 millions d’euros d’amende (correspondant à la somme dévalisée), dans le cadre d’un procès très discret. Djamel Guelimi, l’ancien PDG de Khalifa TV, Samy Kassa, secrétaire général du groupe et Samir Khelifa de Khalifa Airways ont été arrêtés dans la nuit du 24 février 2003 à l’aéroport d’Alger. Ils tentaient de rejoindre l’avion privé de Khalifa qui les attendait sur le tarmac et transportaient 2 millions d’euros en petites coupures. Ils ont plaidé la «responsabilité personnelle», acceptant de porter le chapeau à la place du milliardaire déchu.
Un million et demi de clients en Algérie
Les déboires de Rafik Abdelmoumène Khalifa, 40 ans, remontent à la fin de l’année 2002. Pharmacien, ce fils d’un ancien ministre du premier président algérien Ben Bella, rencontre le succès en se lançant en 1992 dans la fabrication de médicaments génériques. A partir de 1998, il édifie un empire employant quelque 20 000 personnes et connaît une ascension fulgurante. Khalifa Bank, la première banque privée en Algérie qui gère des dépôts privés et institutionnels, constitue avec ses 7 000 employés le noyau dur du groupe. Le 27 novembre 2002, le quotidien El Watan révèle que l’établissement financier fait l’objet d’une suspension de ses transferts de capitaux vers l’étranger, suite à la découverte d’un certain nombre d’irrégularités dans la gestion des dépôts et la non-observation des règles prudentielles dans l’octroi des crédits. Après cette première mesure conservatoire, la Banque d’Algérie en confie alors la gestion à un administrateur provisoire, «pour endiguer tout risque de détérioration de la situation financière» de la plus importante banque privée du pays regroupant 135 agences, un milliard et demi de dollars de dépôt et un million et demi de clients en Algérie.
Le groupe comptait aussi une compagnie aérienne, Khalifa Airways, dont la trentaine d’avions exploités en leasing en faisait un des fleurons du groupe. Elle interrompra brusquement ses vols début mars 2003. Khalifa avait également investi dans les médias. Sa chaîne, K-TV, installée en France, employait 400 personnes. Il s’était également diversifié dans le sponsoring sportif avec le club de football français de l’Olympique de Marseille. Il s’était lancé dans l’immobilier ou encore la location de voitures de luxe avec un parc de 200 véhicules.
Au faîte de sa gloire, le notable algérien Khalifa dépense sans compter pour pénétrer le milieu des vedettes. Il organise de somptueuses réceptions dans ses trois villas à Cannes où sont conviés, en septembre 2002, quelque 300 VIP pour le lancement de K-TV. Il est très proche de personnalités du monde du spectacle, comme Gérard Depardieu et Catherine Deneuve, qui le soutiendront le moment venu. Mais qui dédommagera les milliers de petits épargnants qui, dans la chute vertigineuse de l’ex-golden boy, ont subi des préjudices ?
Le procès de la faillite bancaire ne constitue qu’une partie du volumineux dossier Khalifa, composé de quatre autres volets, Khalifa Airways, transferts illicites de devises, l’implantation de deux stations de dessalement d’eau de mer et Khalifa construction.par Françoise Dentinger
Article publié le 07/01/2007 Dernière mise à jour le 07/01/2007 à 19:01 TU