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Irak/Etats-Unis

Al-Maliki répond vertement à Bush

Alors que  George W. Bush annonce une augmentation des troupes en Irak, le poids de la guerre devient trop lourd pour de plus en plus d'Américains. 

		(Photo : AFP)
Alors que George W. Bush annonce une augmentation des troupes en Irak, le poids de la guerre devient trop lourd pour de plus en plus d'Américains.
(Photo : AFP)
Après une flambée de violences, qui a fait 150 morts en trois jours, c’est sur fond de nouvelle vague d’attentats que le Premier ministre irakien a fustigé «la faiblesse» du président américain. En réponse aux critiques de George W. Bush, mercredi, accusant son gouvernement de «manquer de maturité», Nouri al-Maliki a affirmé avoir «l’impression que ce sont eux, à Washington, qui touchent à leur fin, et non nous, ici, à Bagdad». En proie également à des pressions internes, en vue des prochaines élections de 2008, le chef de la Maison-Blanche paraît de plus en plus isolé.

Dans un entretien commun au quotidien italien Corriere della Sera, au Times de Londres et au Washington Post, Nouri al-Maliki a estimé que «l’actuelle administration américaine se trouvait en grave difficulté après la défaite électorale d’il y a deux mois», ajoutant «jamais comme aujourd’hui, je n’ai senti autant la faiblesse de George W. Bush». Le Premier ministre irakien répondait aux attaques du président américain qui avait déclaré, hier mercredi, que son gouvernement «manquait de maturité», tandis que la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice le déclarait «en sursis». Ces critiques mettaient en cause l’impartialité du chef irakien dans sa lutte contre le terrorisme aux côtés de l’armée américaine, le soupçonnant de favoriser la majorité chiite dont il est issu. «Je voudrais conseiller à Condoleezza Rice d’éviter des déclarations qui ne peuvent aider que les terroristes», a poursuivi al-Maliki.

Le chef du gouvernement irakien est également revenu sur les allégations du président Bush. Ce dernier avait reproché au Premier ministre de transformer le combat contre les extrémistes en lutte confessionnelle, après les pendaisons à Bagdad (Saddam Hussein puis ses deux co-accusés) dont des images ont été diffusées sur internet. Nouri al-Maliki a reconnu, dans son entretien publié ce jeudi, que des erreurs avaient été commises. «Elles ne sont pas le fait de responsables, mais de subalternes», a-t-il déclaré. Quant à Saddam Hussein, «il n’a pas été exécuté par vengeance, mais il a été traité en vertu d’un processus juridique qui s’est achevé par son exécution», a dit al-Maliki.

Pas de crédits militaires supplémentaires pour l’Irak

Sur la poursuite du conflit, le chef du gouvernement irakien estime que les effectifs des troupes américaines sur son sol pourraient diminuer nettement dans les trois à six mois qui viennent, si «nous parvenons à mettre en œuvre l’accord destiné à nous fournir plus d’armes». Al-Maliki a assuré vouloir, avec plus d’armes, «donner la chasse à toutes les milices sans aucune distinction. Il n’y aura pas de discriminations ou de préférences». Sur ce point, le Premier ministre al-Maliki s’oppose à une fin de non recevoir de la part des Américains qui craignent que certaines de ces armes ne finissent entre les mains des insurgés. Même son de cloche chez les démocrates. Hillary Clinton, à l’instar de l’ex-secrétaire d’Etat démocrate Madeleine Albright, n’est pas favorable à une coupe des crédits militaires pour les troupes américaines. En revanche, la sénatrice démocrate de l’Etat de New York souhaite réduire les crédits destinés aux troupes irakiennes. Hillary Clinton pense qu’avant de recevoir des fonds, ces forces devraient être «certifiées non confessionnelles». Des déclarations qui interviennent alors que l'ex-première dame des Etats-Unis se prépare à dévoiler ses intentions concernant la prochaine présidentielle américaine de 2008. 

A Washington, la polémique sur la poursuite des opérations en Irak s’intensifie. Trois sénateurs américains, deux démocrates et un républicain, ont dévoilé, hier, un projet de résolution non contraignante s’opposant à l’envoi de renforts à Bagdad. «Je crois que lorsqu’un président prend le mauvais chemin sur quelque chose d’aussi important que l’Irak, la manière la plus efficace de lui faire redresser le cap est de lui démontrer que sa politique n’a pas ou peu de soutien de la part des deux partis», a déclaré le sénateur démocrate Joseph Biden, président de la commission des Relations extérieures et l’un des parrains du texte. Le quotidien français Le Monde parle de la consternation de la Maison Blanche de voir ce texte plébiscité par plusieurs républicains influents. A la Chambre, trois représentants démocrates, soutenus par 16 parlementaires, demandent le retrait des troupes américaines dans les six mois. «Ma grande inquiétude», dit Barbara Lee, élue de Californie, «c’est que nos soldats soient amenés à se confronter à la milice du chef radical chiite, Moqtada al-Sadr. Nos soldats se feront tuer. Ils seront aussi amenés à tuer et, eux comme nous, devront vivre avec cela le reste de notre vie». A ce jour, les pertes de l’armée américaine s’élèvent à plus de 3 000 morts. Un autre candiat à la présidentielle, John Edwards, assure que «le Congrès a les moyens d'arrêter l'escalade de Bush».

«George W. Bush n’a pas vraiment fini»

Invité, ce jour,  de la rédaction de RFI, André Kaspi, professeur d’histoire d’Amérique du Nord à l’université de Paris I et directeur du centre de recherches d’histoire nord-américaine, n’a pas manqué de souligner que, au-delà de la polémique amorcée en ce début d’année  2007, se profilent déjà les élections de 2008. Pour André Kaspi, la discussion a pour toile de fond, d’une part, la situation politique, à savoir quelle solution pour l’Irak, et, d’autre part, les perspectives électorales. Mais si la majorité des Américains souhaitent en finir avec la guerre en Irak, a-t-il ajouté, il n’en reste pas moins qu’il sont partagés entre le retrait immédiat des troupes, ou le retrait progressif. De même que sur l’échéance du retrait, 2007ou d’ici 2008 ?  C’est pourquoi cette recherche de solution fait dire à André Kaspi que «le président Bush n’a pas vraiment fini».

 

par Françoise  Dentinger

Article publié le 18/01/2007 Dernière mise à jour le 18/01/2007 à 18:52 TU