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Guinée

Etat de siège et dispositif militaire

(Carte : DK/RFI)
(Carte : DK/RFI)

Le chef de l’Etat guinéen a proclamé, lundi soir, l’état de siège sur toute l’étendue du pays, assorti d’un couvre-feu de 20 heures sur 24. Toutes les manifestations ont été interdites et un important dispositif de sécurité était visible, mardi, à Conakry et dans les principales villes de province. Ces mesures ont été décrétées après une nouvelle journée de violences qui ont fait au moins 18 morts, lundi, lors de la reprise de la grève générale. Depuis le début de la crise, au mois de janvier, plus de 100 personnes ont péri dans des affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestants. Mardi, quatre personnes n'ayant pas respecté le couvre-feu ont été tuées par les forces de l'ordre à Labé, dans le centre du pays. Les Etats-Unis se préparent à évacuer leurs ressortissants. La France, quant à elle, n'a pas prévu d'évacuation «à ce stade». De son côté, le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, a exprimé sa «préoccupation».


Le président Lansana Conté, qui est apparu à la télévision lundi soir, a demandé à l’armée de prendre «toutes les dispositions» pour éviter «une guerre civile». Dans cette brève intervention, le président guinéen a souligné que «les destructions et les pertes en vies humaines sont telles que je suis amené à décréter l’état de siège sur toute l’étendue du territoire national». Depuis vendredi soir, au moins 45 personnes ont été tuées, lors des affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestants qui protestaient contre la nomination d’Eugène Camara, un proche du président, au poste de Premier ministre.

L’état de siège est très contraignant, car il impose un couvre feu de 6 heures du matin à 16 heures et de 20 heures à 6 heures. D’autres mesures interdisent les «cortèges, défilés et manifestations», ainsi que les «réunions publiques ou privées propres à provoquer ou entretenir le désordre». De très sévères restrictions à la presse sont également imposées et «des perquisitions de jour et de nuit» sont désormais autorisées.

Dr. Tierno Sow

Président de l'Organisation guinéenne des droits de l'homme

«C'est la suspension totale des droits et libertés des citoyens de Guinée.»

Dès l’aube, mardi, des militaires, gendarmes et policiers ont été déployés aux principaux points stratégiques de Conakry et de sa banlieue. Des blindés étaient présents près de l’aéroport et sur la Place du 8 novembre, voie d’accès au centre de la capitale. Des témoins, cités par l’AFP, affirment avoir entendu des rafales d’armes automatiques pouvant être des tirs d’intimidation.

Avant l’annonce de l’état de siège, des tirs nourris avaient été entendus lundi pendant plusieurs heures, en provenance du camp militaire Alpha Yaya, à proximité de l’aéroport. Selon plusieurs témoignages, ces tirs sont le fait de soldats mécontents qui protestaient contre l’arrivée récente, à Conakry, d’hommes armés en provenance du Liberia et contre la récente promotion d’officiers de l’armée. Selon des témoins contactés par RFI, des éléments de la Garde présidentielle ont proféré des menaces contre des habitants de Conakry.

La Guinée est pratiquement bloquée depuis environ un mois. Le 10 janvier, la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG) et l’Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG) ont déclenché une grève générale dirigée contre la corruption et l’ingérence du président dans les affaires judiciaires. Des dizaines de personnes ont été tuées, lors des manifestations réprimées par l’armée et la police. La grève a été suspendue le 28 janvier, suite à un accord entre les syndicats, le patronat et le gouvernement, prévoyant des mesures sociales ainsi que la nomination d’un Premier ministre de «consensus».

La décision du président de nommer, le 9 février dernier, Eugène Camara au poste de chef du gouvernement a déclenché une nouvelle vague de protestations, provoquant des dizaines de victimes. Les manifestants, ainsi que les syndicats et les partis de l’opposition, ont alors exigé la démission du président Lansana Conté, qui est au pouvoir depuis 23 ans. L’Union africaine (UA), l’Onu et la France ont exprimé leur vive inquiétude devant la dégradation de la situation en Guinée.

Ahmedou Ould Abdallah

Représentant de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest

«L'Etat de siège est redoutable car il interdit non seulement les réunions publiques mais aussi privées.»

Le gouvernement américain a décidé d’évacuer des ressortissants ainsi que des familles de diplomates qui se trouvent en Guinée. Un avion de transport va être affrété à cet effet, plusieurs compagnies aériennes ayant suspendu leurs vols à destination de Conakry. Le ministère français des Affaires étrangères affirme qu’aucune décision d’évacuation des ressortissants français n’a été prise. «Nous étudions les possibilités pour nos ressortissants de regagner la France, sur la base du volontariat», a déclaré mardi le porte-parole du ministère. Il a également souligné que l’ambassade de France à Conakry «a renforcé son dispositif de liaison avec les ressortissants français et prendra les mesures nécessaires en fonction de l’évolution de la situation». Près de 3 000 Français se trouvent actuellement en Guinée, dont 2 700 à Conakry.



par Rédaction Internet  (avec AFP), Antonio  Garcia

Article publié le 13/02/2007 Dernière mise à jour le 13/02/2007 à 15:47 TU