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Madagascar

Ravalomanana renforce ses pouvoirs et adopte l’anglais

Bureau de vote à Antananarivo, le 4 avril 2007.
Bureau de vote à Antananarivo, le 4 avril 2007.
La victoire du «oui» semble garantie, mais la participation des électeurs a été assez réduite, selon les premières estimations concernant la capitale. Le président Marc Ravalomanana, réélu en décembre dernier, a souligné que cette réforme proposée par référendum est impérieuse pour le développement de son pays. L’opposition affirme que cette révision constitutionnelle comporte des risques de dérive autocratique. Des critiques ont également été exprimées par l’Eglise catholique. Les résultats définitifs devraient être publiés dans deux jours.

Les sept millions d’électeurs malgaches ont été appelés à répondre mercredi à une seule question : «Acceptez-vous ce projet de révision de la Constitution pour le développement rapide et durable par région, afin d’améliorer le niveau de vie des Malgaches ?». Mais cette révision prévoit, surtout, le renforcement des pouvoirs du président Ravalomanana, qui va pouvoir légiférer par ordonnance «en cas d’urgence et de catastrophe», ainsi que l’introduction de l’anglais comme troisième langue officielle du pays (après le malgache et le français) et la suppression des six provinces autonomes. Toutes ces transformations passaient par un seul «oui» ou un seul «non» .

Les premières estimations font croire que les électeurs n’ont pas été très nombreux à participer au referendum : un taux d’à peine 30,3% à Antananarivo, alors que 58,4% y avaient participé au premier et unique tour de l’élection présidentielle du 3 décembre 2006. Toutefois, le «oui» a obtenu 65,45% des suffrages dans la capitale, qui représente près de 12% du nombre total d’électeurs inscrits, ce qui porte à croire que le camp du président va gagner son pari. Ravalomanana a déclaré pendant la campagne qu’il voulait que le «oui» puisse atteindre les 80%, mais le faible taux de participation pourrait rendre difficile cet objectif. Les autorités invoquent les conditions météorologiques pour expliquer l’importante abstention.

Les catholiques critiquent le réferendum

La Constitution de Madagascar date de 1992, lors du passage à la Troisième République et a déjà été révisée par deux fois en 96 et 98. Les observateurs considèrent que le président Marc Ravalomanana à voulu cette fois instaurer une Constitution sur mesure. Le renfort des pouvoirs liés à ses fonctions suscite des craintes auprès des 21 partis de l’opposition qui se sont prononcés pour le «non». Ravalomanana a aussi voulu doter le pays d’une nouvelle structure administrative, en remplaçant les six provinces autonomes, jugées «trop vastes», par 22 régions plus homogènes économiquement, dans le cadre d’un plan de développement.

Outre les partis de l’opposition, notamment ceux qui étaient proches de l’ancien président Ratsiraka, l’Eglise catholique malgache a formulé des critiques sévères au sujet de l’organisation de ce référendum, dénonçant notamment «le pouvoir exorbitant» accordé au président et l’absence de débats concernant des sujets clés, comme la disparition des provinces actuelles. La Conférence épiscopale a affirmé que ce référendum était inopportun, car «le laps de temps préalable au vote s’avère trop court pour permettre les explications nécessaires aux électeurs». 

La suppression du caractère laïc de l’Etat malgache n’a pas, non plus, bénéficié de l’approbation des responsables catholiques qui craignent que le président puisse interférer directement dans les activités religieuses. Or Ravalomanana est toujours le vice-président de la puissante Eglise réformée de Madagascar qui est liée à ses homologues américaine, britannique et néerlandaise. L’influence protestante dans la Grande Île date du temps colonial, ce qui contrariait l’administration coloniale française, traditionnellement catholique. Depuis une dizaine d’années, beaucoup de sectes se sont développées dans le pays, où plus de 40% de la population est chrétienne.

L’anglais troisième langue officielle

Le président Marc Ravalomanana qui est l’homme d’affaire le plus riche du pays veut également élever l’anglais au rang de langue officielle de Madagascar. Cette question suscite également des polémiques, étant donné que la langue anglaise est totalement inconnue de la grande majorité de la population malgache. Les observateurs soulignent d’ailleurs que le nombre de professeurs de français est insuffisant et que la première langue du pays présente des variantes très prononcées qui rendent parfois impossible la communication entre des personnes habitant des régions distantes. Madagascar fait partie de la SADC, la Communauté des Etats de l’Afrique australe. Les autorités pensent que ce changement linguistique va permettre de développer les échanges commerciaux et tout particulièrement avec l’Afrique du Sud, qui est la grande locomotive de cette zone du continent.     

   

Madagascar est un pays assez pauvre : les trois quarts de ses 19 millions d’habitants vivent avec moins d’un dollar par jour, selon les statistiques établies par les organisations financières internationales. En termes de développement humain la Grande Île, figure en 143ème position sur la liste établie par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), une liste qui comporte un total de 177 Etats.

La Grande Île est souvent atteinte par des perturbations météorologiques. En mars dernier, le cyclone Indala avait fait au mois 88 morts et plus de 137 000 sinistrés. Ces cyclones sont très nuisibles aux activités agricoles qui emploient près de 80% de la population active du pays et sont également à l’origine de la flambée des prix de base. Certaines régions de Madagascar se trouvent en situation «d’insécurité alimentaire aiguë», selon une étude publiée mardi dernier par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

 



par Antonio  Garcia

Article publié le 05/04/2007 Dernière mise à jour le 05/04/2007 à 17:51 TU