Madagascar
Ravalomanana en tête
(Photo : AFP)
Les résultats provisoires indiquent que le candidat Marc Ravalomanana a obtenu 70,10% des voix à Antananarivo, devant l’ancien Premier ministre Norbert Ratsirahonana, avec 10,69%. En troisième position, toujours dans la capitale, l’homme d’affaires Herizo Razafimahaleo obtiendrait 7,40% des suffrages, tandis que Roland Ratsiraka, neveu de l’ex-président Didier Ratsiraka, est crédité de seulement 5% des voix. Ravalomanana a été le maire d’Antananarivo de 1999 à 2002, ce qui peut expliquer ce plébiscite annoncé dans la capitale où la participation a dépassé les 58%, selon le ministère de l’Intérieur. Toutes ces données devront être validées par la Haute Cour constitutionnelle (HCC) qui espère proclamer les résultats définitifs du premier tour avant le 25 décembre.
Les observateurs chargés de suivre l’élection signalent que le scrutin s’est bien passé dans son ensemble. Le Comité national d’observation des élections (CNOE) a néanmoins souligné que des gens ont pu voter sans être titulaires de cartes d’identité et qu’un grand nombre d’électeurs n’étaient pas inscrits sur les listes de votants. Les bulletins de vote qui sont imprimés par les candidats, n’ont pas été acheminés dans plusieurs bureaux de vote. Dans la ville de Toliara, des électeurs ont mis le feu à une urne, provoquant la fermeture du bureau. Plusieurs personnes ont été arrêtées par la police à Fianarantsoa, dans le centre de l’île, où des barricades avaient été installées par des adversaires du pouvoir. Il faut noter que Pierrot Rajaonarivelo, secrétaire national du parti Arema, en exil en France, n’a pas obtenu l’autorisation de revenir à Madagascar et de se présenter sa candidature à la présidence.
Il y a deux semaines, le général Fidy à la retraite avait appelé à un coup d’Etat, affirmant que le régime actuel était «inconstitutionnel». Cet appel n’a pas été suivi et le scrutin de dimanche a pu se dérouler avec beaucoup de calme, ce qui n’était pas le cas des élections de décembre 2001, où des violences se sont produites, lorsque le président Didier Ratsiraka a refusé de reconnaître les résultats définitifs, favorables à Ravalomanana. Des dizaines de personnes avaient été tuées lors des incidents entre les deux camps, incidents qui se sont ensuite répétés jusqu’à juin 2002, et qui s’étaient terminés par le départ en exil, en France, de l’ancien président.
Ravalomanana moins populaire en province
Les partisans du président sortant sont convaincus que Marc Ravalomanana va être réélu sans trop de difficultés et qu’il ne sera pas obligé de disputer un second tour. Tout va donc dépendre des résultats en province. Mais, lundi soir, aucun résultat significatif n’était disponible concernant les autres grandes villes qui sont souvent classées de «frondeuses» vis-à-vis du pouvoir central. Selon la presse malgache, il est fort probable que Ravalomanana soit dépassé en voix par Roland Ratsiraka dans le grand port de Toamasina, situé dans l’est de la Grande île et dont ce dernier est le maire. De même, l’ancien président de l’Assemblé nationale Jean Lahiniriko, qui n’a obtenu que 2,34% des voix dans la capitale, devrait arriver en tête à Toliara, dans le sud-ouest.
Des missionnaires catholiques en poste à Madagascar que nous avons pu contacter affirment qu’aucun «candidat de l’opposition» n’a réussi a créer une «vague fond» pouvant remettre en cause la «probable victoire» du président sortant. En effet, le candidat Ravalomanana semble avoir été le seul capable de mobiliser un grand nombre de partisans dans les meetings, tandis que ses rivaux - parmi lesquels une seule femme, Elia Ravelomanantsdoa - ont dû se contenter d’assistances assez réduites.
Il est clair que, dans la campagne, le président sortant a bénéficié de moyens bien plus importants que ses 13 rivaux. Il a pu ainsi se déplacer en hélicoptère partout dans le pays et il a aussi bénéficié de l’aide des medias dont il est propriétaire : une radio, une chaîne de télévision et deux journaux. Il bénéficie aussi de l’appui de la puissante Eglise de Jésus Christ, une confession protestante réformée dont il est le vice-président. L’Eglise catholique l’avait soutenu en 2001, ce qui n’était pas le cas dans cette élection. En attendant les résultats définitifs, des observateurs soulignent néanmoins que le président sortant pourrait être victime d’une sorte d’usure du pouvoir, après cinq ans passés à la tête du pays.
Mark Ravalomanana, 57 ans, est un véritable «self-made man». Ce fils de laitier est devenu un riche homme d’affaires, après avoir vendu en bicyclette des yaourts fabriqués à la maison. Il a pu créer un véritable empire agroalimentaire, grâce à un prêt de la Banque mondiale. On le critique pour avoir développé un monopole et on le compare souvent à l’ancien chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi. Nos sources soulignent néanmoins que les activités commerciales du président malgache lui ont aussi permis de créer un grand nombre de postes de travail, dans un pays où une grande partie de la population en âge de travailler n’a pas d’activité salariée. Madagascar est la quatrième plus grande île au monde, le premier producteur mondial de vanille. Son sol est riche en minerais, dont le nickel et le cobalt. Mais les trois quarts de ses 18 millions d’habitants vivent avec moins d’un dollar par jour.
par Antonio Garcia
Article publié le 04/12/2006 Dernière mise à jour le 04/12/2006 à 20:37 TU