Réchauffement de la planète
Monsieur environnement
Contesté par les écologistes pour avoir mis le Hummer et autres 4x4 gourmands en carburant à la mode dans les années 1990, l’ex-Terminator, gouverneur de Californie, est devenu une des figures de proue de la lutte contre les gaz à effets de serre.
(Photo : AFP)
De notre correspondante aux Etats-Unis
«Et dire qu’il y a trois ans, je me faisais harceler par des manifestants écolos qui n’aimaient pas mon Hummer… ». Aujourd’hui, Arnold Schwarzenegger n’en revient pas d’être devenu un des champions de l’environnement aux Etats-Unis. Sur toutes les chaînes américaines, MTV compris, c’est de la lutte contre le réchauffement de la planète qu’on l’invite à venir parler. Et à l’automne, les conservateurs britanniques l’ont convié pour s’exprimer sur le sujet.
Cette réputation de gouverneur vert est encore fraîche. Il l’a gagnée à l’été 2006 en annonçant un plan de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’un quart d’ici 2020. La semaine dernière, le magazine Newsweek l’a mis en une de son numéro spécial environnement : le «governator» de Californie y fait tourner la planète sur le bout de son doigt. «Un des trucs les plus difficiles que j’ai jamais eu à faire», blague t-il.
L’environnement, c’est comme la «muscu»
«Permettez-moi de vous parler de musculation», lance t-il au Council of Foreign Relations, un think tank de politique étrangère, à New York. On s’étrangle dans la salle, dont le public est essentiellement composé de vieux experts politiques en costume. «Dans les années 1970, la «muscu» avait une image désastreuse, un truc pratiqué par quelques fanatiques illuminés», continue l’ancien Monsieur Univers, «aujourd’hui, dans n’importe quelle ville, vous trouvez des salles de gym avec des gens ordinaires qui se musclent sur des machines».
C’est, selon lui, la route qu’a prise le mouvement vert. «Autrefois, les écologistes étaient considérés comme des illuminés, des gens pas très marrants, un peu comme des prohibitionnistes qui débarqueraient dans une fête étudiante».
Et maintenant, «qui sont les fanatiques ?», demande t-il, rappelant que l’entreprise Dupont vient d’embaucher un ancien de Greenpeace et qu’Al Gore vient d’obtenir un Oscar avec son documentaire sur les risques que court la planète. Les fanatiques aujourd’hui, selon Schwarzenegger, sont ceux qui continuent à nier le réchauffement climatique et refusent de prendre des mesures. A ces hommes politiques là, il lance un avertissement : «Votre base politique va fondre aussi vite que la glace polaire. Vous allez devenir un pingouin politique sur un tout petit morceau de glace dérivant sur la mer…».
Pingouins politiques
Aux Etats-Unis, les pingouins en question sont essentiellement des républicains. En 2005, la popularité du gouverneur de Californie, républicain, s’était effondrée dans les sondages quand toutes les propositions de réformes politiques qu’il avait proposées, par référendum, avaient été refusées. Depuis, Arnold Schwarzenegger s’est réinventé en gouverneur centriste et vante les mérites de la collaboration avec les démocrates. Il a pris ses distances avec son parti en général, et avec George Bush en particulier. En matière d’environnement, «le gouvernement américain est à la traîne», déplore t-il. «La Californie est suffisamment grande. Nous n’avons pas besoin d’attendre Washington. Nous avons signé des accords de partenariat avec la Grande-Bretagne et avec d’autres Etats (des Etats-Unis)», rappelle t-il.
En Californie, les militants écologistes sont plus mitigés sur son bilan. Ils l’accusent de s’être approprié des idées qui n’étaient pas les siennes, rappelant que les lois qu’il a signées – après de sérieuses négociations - avaient été préparées par des démocrates. S’ils sont ravis de la publicité que fait le gouverneur à la lutte pour l’environnement, les écologistes lui reprochent aussi d’avoir accepté un million de dollars d’industriels du pétrole (dont Chevron) dans ses caisses de campagne électorale et d’avoir mis son veto à d’autres projets de loi environnementalistes qui lui semblaient contraire aux intérêts économiques de Californie.
Plus que de programme, Schwarzenegger, dans ses tournées, insiste surtout sur l’image d’une écologie grand public. A l’écouter, les militants pour l’environnement ne doivent plus cultiver la culpabilité des consommateurs mais donner envie de joindre le mouvement. «On n’a pas à priver les gens de leur voiture, à leur retirer leur 4x4. C’est l’échec assuré». Le gouverneur préfère que l’on «muscle les qualités environnementales de ces véhicules» et il déplore que les constructeurs américains soient moins avancés que les Japonais en matière d’environnement. «Detroit doit se bouger les fesses», dit-il. La capitale américaine de l’automobile l’a pris en grippe craignant que ses discours ne favorisent les véhicules étrangers, moins polluants, et une grande affiche anti-Schwarzenegger y a été accrochée en bord de route. Le «governator», lui, a gardé ses 4x4. Mais ils roulent au biocarburant.
par Guillemette Faure
Article publié le 15/04/2007 Dernière mise à jour le 15/04/2007 à 10:56 TU