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Russie

Poutine offensif face aux Occidentaux

Le président russe, Vladimir Poutine, lors de son discours à la Nation, devant les deux chambres du Parlement. 

		(Photo : Reuters)
Le président russe, Vladimir Poutine, lors de son discours à la Nation, devant les deux chambres du Parlement.
(Photo : Reuters)

Vladimir Poutine a prononcé jeudi matin, devant les deux chambres du Parlement de Moscou, son dernier discours à la Nation, car son deuxième mandat se termine en effet l'an prochain et il ne peut pas se présenter une troisième fois. Mais Vladimir Poutine, qui ne semble pas pressé de quitter vraiment la vie politique, estime qu'il est encore trop tôt pour faire son testament politique. Il a sévèrement critiqué le projet américain de bouclier anti-missiles, menaçant d’abandonner le traité sur les Forces conventionnelles en Europe conclu à la fin de la Guerre froide.


Pendant une heure et quart, le président russe a passé en revue les principaux chapitres de la vie politique de son pays. Après avoir fait observer une minute de silence à la mémoire de Boris Eltsine, Vladimir Poutine a évoqué des sujets liés à la vie quotidienne, comme les transports, le logement et les retraites ; ainsi que les problèmes de l’industrie, ou, encore, les défis des nanotechnologies. Il a ainsi défendu ses sept années de présidence, pendant lesquelles la Russie est devenue «une des dix plus puissantes économies dans le monde».

Le rôle de la Russie dans l’échiquier international a ainsi occupé une partie importante du discours de Poutine qui a notamment menacé de se retirer du Traité sur les Forces conventionnelles en Europe (FCE) : «Je propose que nous déclarions un moratoire sur le respect, par la Russie, du traité jusqu’à ce que tous les pays de l’Otan le ratifient». Le FCE (CFE selon la terminologie anglaise) a été adopté en 1990 et modifié en 1999, après le démantèlement de l’Union soviétique et la disparition du Pacte de Varsovie. Ce traité prévoit une limitation du déploiement d’armes conventionnelles de l’Otan et de l’ancien bloc de l’Est.

Le président russe a souligné que les Etats occidentaux «construisent des bases militaires à nos frontières et, en outre, prévoient aussi de baser des éléments de systèmes de défense antimissile en Pologne et en République tchèque. Il est temps que nos partenaires aussi apportent leur pierre, non par des mots mais par des actes». En réalité, Moscou reproche aux pays de l’Otan de ne pas avoir ratifiée la version amendée du FCE, tant que la Russie maintiendra des troupes en Géorgie et en Moldavie. Poutine a fait ces déclarations à l’intention des chefs de la diplomatie des 26 Etats membres de l’Alliance atlantique qui se réunissent à Oslo.

Contre les antimissiles et les «colonisateurs»

La secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice a considéré «absurde» l’idée que l’installation de 10 missiles antimissiles en Pologne, couplés à une station radar en République Tchèque, puisse mettre en cause l’équilibre stratégique avec la Russie. Pour Washington, ce système est destiné à contrer les menaces de pays comme la Corée du Nord et l’Iran, pouvant disposer d’ogives nucléaires.

Il est peu probable, selon les observateurs à Moscou, que le retrait du traité FCE puisse marquer le début d’une nouvelle course aux armements en Russie, qui ne dispose pas de moyens suffisants pour développer une industrie militaire comme au temps de l’URSS. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu à Oslo où il devrait fournir de plus amples renseignements à ses collègues de l’Otan.

Dans son discours, Vladimir Poutine a également accusé les gouvernements occidentaux d’être des «colonisateurs», sous couvert de promouvoir la démocratie et les droits de l’homme : «A l’époque du colonialisme, on parlait du rôle civilisateur des Etats-colonisateurs». Il s’agit, selon les observateurs à Moscou, d’une réaction aux critiques des gouvernements occidentaux, face à la répression dont ont été victimes récemment des mouvements d’opposition, comme L’Autre Russie, dirigé par l’ancien champion d’échecs Garry Kasparov.

Le président russe a aussi dénoncé l’augmentation du «flux d’argent venant de l’étranger, utilisé pour une ingérence directe dans nos affaires intérieures. Il y a ceux qui, en utilisant une phraséologie pseudo-démocratique, aimeraient revenir à un passé proche : les uns pour piller comme avant, sans être châtiés, les richesses du pays, voler les gens et l’Etat, les autres pour priver notre pays de son autonomie économique et politique». Le Kremlin, qui vient de promulguer une loi qui place les ONG sous le contrôle direct des autorités, veut rendre difficile les aides financières étrangères aux associations russes.

Plusieurs candidats à la succession

Vladimir Poutine a tenu à déclarer que ce discours était effectivement son dernier message à la Nation. En 2008, c’est «un autre chef de l’Etat» qui va prononcer la déclaration, mais Poutine n’a pas fourni d’indications précises au sujet du nom de son successeur : «Il est prématuré, pour moi, de proclamer mes derniers souhaits et testaments politiques. Même si, en réalité, nous devons toujours penser à l’avenir». Les observateurs à Moscou pensent que Vladimir Poutine n’a pas vraiment l’intention de s’éloigner définitivement de la vie politique, même si la Constitution l’oblige à quitter ses fonctions à la fin de son mandat.

Plusieurs candidats se profilent ainsi à la succession, notamment les vice-Premiers ministres Sergueï Ivanov et Dimitri Medvedev qui assistaient au discours, en échangeant des plaisanteries. Mais il n’est pas exclu qu’un troisième homme puisse se présenter, comme Vladimir Yakunin, responsable des chemins de fer, ou, encore, le chef de cabinet du Kremlin, Sergueï Sobyanin.

par Antonio  Garcia

Article publié le 26/04/2007 Dernière mise à jour le 26/04/2007 à 16:52 TU