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Israël

Sursis pour Ehud Olmert ?

Manifestation à Tel-Aviv le 3 mai 2007 - Ehud Olmert refuse toujours de quitter son poste de Premier ministre. 

		(Photo : Reuters)
Manifestation à Tel-Aviv le 3 mai 2007 - Ehud Olmert refuse toujours de quitter son poste de Premier ministre.
(Photo : Reuters)
En dépit des appels véhéments à sa démission, le chef du gouvernement s’accroche toujours à son poste. Après une manifestation de plus de 100 000 personnes à Tel-Aviv, Ehud Olmert a annoncé son intention de corriger lui-même les erreurs qui lui ont été reprochées dans un rapport sur la gestion de la guerre au Liban.

«Je vais m'en sortir sans y laisser de plumes». Jeudi soir encore, Ehud Olmert - devant quelques conseillers personnels à Jérusalem - semblait convaincu de pouvoir continuer à s’agripper à son poste de Premier ministre. Alors qu’au même moment, à Tel-Aviv, manifestaient des centaines de milliers d’Israéliens (150 000 selon la police, 200 000 selon les organisateurs), venus de tous bords politiques et réunis derrière un même slogan : «Olmert à la maison».

C’était en effet une alliance pour le moins exceptionnelle qui s’était formée jeudi sur la place Yitzhak Rabin : juifs religieux, colons, laïcs des mouvements de jeunesse de gauche, représentants de familles endeuillées par la guerre et associations de soldats réservistes – tous ont scandé en chœur le mort d'ordre de la soirée : «Démission». Les organisateurs de la manifestation à Tel-Aviv avaient alors atteint leur but de faire naître une protestation populaire et massive, explosant les clivages politiques traditionnels pour demander le départ du Premier ministre Ehud Olmert et de son ministre de la Défense, Amir Peretz.

Cette «concorde», assez rare pour être soulignée, avait débuté avant même la manifestation à Tel-Aviv. Deux hommes politiques, aux opinions diamétralement opposées en temps normal, avaient donné l’exemple. Dans une lettre commune, Yossi Beilin, chef du parti d'opposition de gauche Meretz, et Effi Eitam du parti d'extrême droite Union nationale, avaient appelé les Israéliens à participer massivement au mouvement protestataire à l’encontre d’Ehud Olmert et d’Amir Peretz. Car, comme le souligne Yossi Beilin, «le peuple a le droit de décider lui-même de son destin».

Le Parti travailliste dans une position délicate

Après le succès de la manifestation jeudi soir à Tel-Aviv, les adversaires du Premier ministre sont plus déterminés que jamais à maintenir la pression. «Il va y avoir d’autres manifestations de ce genre dans les prochaines semaines», a promis Ofir Pines, depuis peu ex-ministre du gouvernement Olmert. M. Pines, un des membres emblématiques du Parti travailliste, attend, comme tant d’autres, que ses camarades quittent bientôt la coalition gouvernementale du Premier ministre. Toute autre décision relèverait «du suicide politique», a-t-il insisté. Mais pour l’heure, le Parti travailliste, partenaire clé pour Ehud Olmert dans la coalition gouvernementale, n’a pas arrêté sa position sur cette question difficile. Il devrait le faire dans dix jours, lors d’un comité central. Il faut dire que le séisme politique qui secoue actuellement Israël tombe au mauvais moment pour les Travaillistes, qui s’apprêtent à élire, à la fin du mois, une nouvelle direction pour leur parti. Leur chef actuel est justement Amir Peretz, mis en cause à la tête du ministère de la Défense.    

Depuis la publication, lundi, du rapport de la commission Winograd, qui accuse le Premier ministre et son ministre de la Défense de mauvaise gestion de la guerre au Liban l’été dernier, les voix qui appellent à la démission d’Olmert et Peretz se multiplient au sein de la classe politique. Jeudi, à la Knesset, des députés communistes au dirigeant du Likoud, Benjamin Netanyahu, tous ont exigé le départ du chef du gouvernement.

Mais voilà que l’infortuné Premier ministre essaie de jouer la montre en faisant abstraction de la classe politique, de plus en plus critique à son égard, mais surtout des centaines de milliers de manifestants dans les rues israéliennes ainsi que d’une opinion publique qui souhaite, à plus des deux tiers, sa démission. 

Malgré toutes ces attentes, Ehud Olmert semble avoir de bonnes raisons de résister. La plus importante : il a réussi à isoler au sein de sa propre famille politique sa ministre des Affaires étrangères. Tzipi Livni avait en effet appelé publiquement à la démission de son chef, mais en commettant une erreur stratégique qui lui était finalement fatale : En ne quittant pas elle-même son poste, la chef de la diplomatie israélienne a suscité un véritable vent de critiques à son propre encontre. Du coup, seuls deux autres députés du parti Kadima sur 29 ont soutenu l'appel de Mme Livni. Les autres soutiennent, au moins officiellement, encore le Premier ministre.

Il dispose actuellement encore du soutien de 78 des 120 députés de sa coalition. Il fait le calcul d’avoir encore assez de temps devant lui pour appliquer à la lettre les recommandations faites dans le rapport Winograd. Ehud Olmert espère ainsi que le rapport final de la commission d’enquête, qui devrait sortir au mois de juillet, sera plus clément à son égard. En revanche il est relativement improbable que l’opposition israélienne accorde ce sursis au chef du gouvernement. Au contraire, elle doit déposer lundi prochain quatre motions de censure contre Ehud Olmert, à la Knesset. 



par Stefanie  Schüler

Article publié le 04/05/2007 Dernière mise à jour le 04/05/2007 à 15:47 TU