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Présidentielle 2007

Ouverture, rassemblement, parité

Le nouveau gouvernement Fillon a été annoncé ce vendredi 18 mai 2007. 

		(Photos : AFP et Reuters, montage : Isabelle Artus)
Le nouveau gouvernement Fillon a été annoncé ce vendredi 18 mai 2007.
(Photos : AFP et Reuters, montage : Isabelle Artus)
La composition du gouvernement de François Fillon a été annoncée vendredi 18 mai par le nouveau secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant. Il s’agit, comme promis, d’une équipe resserrée de 15 ministres qui applique le principe de la parité puisque sept femmes y figurent. Mais surtout, ce gouvernement regroupe à côté des membres de la majorité présidentielle, UMP et UDF ralliés, des personnalités de gauche comme Bernard Kouchner. Rassemblement, parité, ouverture… tout y est.

Les places dans ce gouvernement de 15 ministres étaient chères. Nicolas Sarkozy et François Fillon ont pourtant respecté l’engagement pris durant la campagne électorale d’appliquer le principe de la parité. C’est la première fois qu’il y a sept femmes pour huit hommes dans une équipe gouvernementale. Michèle Alliot-Marie quitte la Défense, qu’elle occupait dans le gouvernement de Dominique de Villepin, pour l’Intérieur. Elle se retrouve au troisième rang dans l’ordre protocolaire. C’est la première fois qu’une femme occupe ce portefeuille. L’entrée dans le gouvernement de Rachida Dati, la porte-parole de Nicolas Sarkozy durant la campagne électorale, est particulièrement symbolique. D’une part, parce qu’elle accède pour une première nomination à un ministère très important, celui de la Justice. D’autre part, parce qu’elle est jeune (41 ans), qu’elle a eu un parcours atypique et qu’elle a des parents issus de l’immigration.

Parmi les nouvelles têtes, on trouve aussi Valérie Pécresse, députée et porte-parole de l’UMP, qui devient ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Christine Albanel, qui était jusque-là présidente de l’établissement public du Château de Versailles et «plume» de Jacques Chirac, est la troisième femme du gouvernement dont c’est la première nomination. Elle prend la tête du ministère de la Culture et de la Communication mais devient aussi porte-parole du gouvernement. Christine Boutin accède elle aussi pour la première fois à une responsabilité ministérielle (Logement et Ville). L’équipe féminine est complétée par deux figures plus habituées aux rouages gouvernementaux : Roseline Bachelot-Narquin (Santé, Jeunesse et Sports) et Christine Lagarde (Agriculture et Pêche).

Kouchner, tout un symbole

Le casting gouvernemental a aussi été innovant en matière d’ouverture politique. Nicolas Sarkozy et François Fillon ont repris à leur compte ce thème qui a été au cœur de la campagne électorale et dont le centriste François Bayrou avait fait son principal argument. Le gouvernement qui vient d’être formé regroupe, en effet, des personnalités du centre et de gauche. Hervé Morin, président du groupe UDF à l’Assemblée nationale et qui avait soutenu François Bayrou durant la campagne présidentielle, a été choisi pour occuper le poste de ministre de la Défense. C’est sa première nomination dans un gouvernement. Il incarne donc cette mouvance centriste qui a choisi de se rallier à Nicolas Sarkozy après le premier tour de la présidentielle et à laquelle le nouveau chef de l’Etat a promis une place dans la majorité.

Mais c’est l’arrivée de  Bernard Kouchner, ancien ministre socialiste de la Santé, qui est la plus symbolique. Celui que l’on a surnommé le «French doctor », co-fondateur de Médecins sans frontières (MSF), a accepté le Ministère des Affaires étrangères et européennes.  Le choix de ce portefeuille n’est pas dû au hasard. Il est à la fois prestigieux et peu sensible dans le sens où il n’y a pas de désaccords fondamentaux entre la droite et la gauche sur la politique internationale de la France. Une autre personnalité de gauche a d’ailleurs été nommée comme secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, auprès du ministre des Affaires étrangères. Il s’agit de Jean-Pierre Jouyet, ancien directeur de cabinet de Jacques Delors à Bruxelles mais aussi de Lionel Jospin, et proche de François Hollande. Eric Besson, le transfuge du Parti socialiste, qui avait quitté sa formation avec fracas pendant la campagne électorale, obtient lui aussi un secrétariat d’Etat rattaché au Premier ministre. Celui de la prospective et de l’évaluation des politiques publiques.

Grincements de dents chez les «sarkozystes»

Cette volonté d’ouvrir les portes du gouvernement aux membres des autres familles politiques désireux de servir la France, une mission que Nicolas Sarkozy a qualifié de «devoir» le jour de son investiture, n’est pas anodine. Le nouveau chef de l’Etat a pris le parti de montrer que la «rupture» avec les anciennes méthodes politiques annoncée tout au long de la campagne comme son engagement le plus fondateur, n’était pas une promesse de gascon. Cette décision n’a évidemment pas fait plaisir à tout le monde à l’UMP. Parmi les proches de Nicolas Sarkozy qui ont trouvé la nouvelle un peu rude, on peut citer Patrick Devedjian qui a déclaré avec une ironie teintée d’agacement, il y a quelques jours, que l’ouverture pourrait peut-être même aller jusqu’aux «sarkozystes».

Il est vrai qu’ils ne sont pas omniprésents. Parmi les véritables fidèles, ceux qui ont suivi le nouveau président depuis longtemps, il n’y a en fait que Brice Hortefeux qui ait été sélectionné comme ministre. Il prend en charge le nouveau ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Co-développement. Nicolas Sarkozy a donc choisi un proche pour gérer un portefeuille dont l’annonce avait été largement critiquée par la gauche pendant la campagne électorale et qui risque de provoquer encore des polémiques. Roger Karoutchi, qui fait aussi partie des «sarkozystes» historiques, n’est que secrétaire d’Etat chargé des Relations avec le Parlement.

On trouve, en revanche, un certain nombre de chiraquiens. Ce qui montre le désir de rassembler aussi au sein de la famille UMP et de n’exclure personne. Au premier rang des proches de l’ancien président figure Alain Juppé, seul ministre d’Etat, donc numéro 2 du gouvernement, qui prend la tête d’un super ministère de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement durables. La création de ce ministère est d’ailleurs l’une des principales innovations du gouvernement. Elle répond à l’engagement pris par Nicolas Sarkozy de faire de la défense de l’environnement un élément transversal de sa politique. Le choix d’Alain Juppé, un homme d’expérience, ancien Premier ministre, ancien ministre des Affaires étrangères, ancien ministre du Budget, donne de la crédibilité à ce portefeuille.

L’emploi d’un côté, le travail de l’autre

La séparation de l’ancien ministère de l’Economie en deux est confirmée. Jean-Louis Borloo prend en charge la partie qui regroupe l’Economie, les Finances et l’Emploi. Eric Woerth se charge de celle qui concerne le Budget, les Comptes publics et la Fonction publique. Ce redécoupage a pour objectif de permettre une meilleure gestion de la politique en faveur de l’emploi  en l’intégrant dans la stratégie économique visant à la relance de la croissance. Ce sera le rôle de Jean-Louis Borloo. Il reviendra, en revanche, à Xavier Bertrand, ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité, de s’atteler à la tâche difficile de négocier avec les partenaires sociaux, par exemple, la mise en œuvre du service minimum dans les transports publics.

Nicolas Sarkozy et François Fillon ont formé un gouvernement «irréprochable» dans le sens où il correspond aux promesses de campagne et permet d’aborder les élections législatives dans les meilleures conditions possibles : en affichant la volonté de Nicolas Sarkozy de gouverner pour tous les Français et pas seulement pour son camp.



par Valérie  Gas

Article publié le 18/05/2007 Dernière mise à jour le 18/05/2007 à 10:49 TU