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Politique française

Premiers pas au G8

La chancelière allemande Angela Merkel, hôte du sommet d'Heiligendamm, accueillera mercredi les dirigeants britannique, français, canadien, italien, japonais, russe et américain au Kempinski Grand Hotel. 

		(Photo : AFP)
La chancelière allemande Angela Merkel, hôte du sommet d'Heiligendamm, accueillera mercredi les dirigeants britannique, français, canadien, italien, japonais, russe et américain au Kempinski Grand Hotel.
(Photo : AFP)
Nicolas Sarkozy assiste, les 6 et 7 juin, à son premier sommet du G8 en tant que président de la République, à Heiligendamn, dans le nord-est de l’Allemagne. Une occasion pour le chef de l’Etat français d’établir le contact avec les principaux dirigeants du monde parmi lesquels George W. Bush ou Vladimir Poutine. Mais aussi de plaider pour les dossiers internationaux dont il a fait les priorités de son mandat, comme la lutte contre le réchauffement climatique, l’aide au développement ou le Darfour. Nicolas Sarkozy, très actif sur la scène nationale, n’entend pas pour autant négliger la diplomatie. Là aussi, il veut imposer un nouveau style, direct et efficace.

Donner un nouveau souffle sans rien renier : c’est ce que Nicolas Sarkozy va essayer de faire au G8. Le nouveau président de la République se rend en Allemagne avec la volonté de marquer les relations avec ses partenaires des pays les plus riches du monde de son empreinte. Mais cela ne veut pas dire qu’il a l’intention de prendre le contre-pied de la diplomatie française menée avant lui, active sur les dossiers des droits de l’homme ou du développement, par exemple. Concilier la rupture et la continuité, l’exception française et la modernisation : c’est ce que devra réussir Nicolas Sarkozy. Pour y parvenir, le nouveau président compte certainement sur sa personnalité, très différente de celle de son prédécesseur, Jacques Chirac.

Cela sera vraisemblablement un atout face au président américain. Les relations de George W. Bush et Jacques Chirac ont été rendues difficiles par le refus du président français de soutenir l’offensive militaire en Irak. L’arrivée de Nicolas Sarkozy, qui a souvent affirmé sa volonté d’entretenir l’amitié de la France avec les Etats-Unis, représente donc une opportunité d’arrondir les angles et de repartir sur de nouvelles bases. D’autant que les deux hommes ont déjà eu une entrevue très cordiale, en septembre 2006 -d’ailleurs souvent reprochée à Nicolas Sarkozy. Depuis son élection, le nouveau président français a tout de même atténué son penchant «atlantiste» en affirmant que l’amitié ne signifiait pas la soumission. Il a ainsi évoqué, sur le ton du reproche, sa préoccupation face au refus des Américains de participer activement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Convaincre Bush

Ce dossier est d’ailleurs à l’ordre du jour du sommet du G8. Il est même en tête de liste des priorités d’Angela Merkel, la chancelière du pays hôte, qui veut obtenir des avancées significatives. Nicolas Sarkozy partage le point de vue de l’Allemagne et a demandé que les pays industrialisés adoptent des «objectifs chiffrés pour démontrer leur volonté d’agir» (réduction de 50% des émissions par rapport à 1990 d’ici 2050). Il a d’ailleurs consulté une trentaine d’ONG spécialisées pour faire le point avant de se rendre en Allemagne. Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ne seront pas trop de deux (ils ont aussi le soutien du Canada) pour essayer de convaincre notamment leur homologue américain. Celui-ci n’est pas du tout sur la même ligne. Il propose simplement de négocier «un objectif global à long terme» hors du cadre de l’Organisation des Nations unies. Ce que les Européens refusent.

Défenseur de la cause écologique, Nicolas Sarkozy a aussi annoncé son intention de plaider pour le respect des engagements pris lors du sommet du G8 de Gleneagles, en 2005, en faveur de l’augmentation de l’aide à l’Afrique. A cette date, les pays riches avaient promis de consacrer d’ici 2015, quelque 0,7% de leur Produit intérieur brut (PIB) à l’aide publique au développement. Ce qui est loin d’être acquis, selon la Banque mondiale.

Nicolas Sarkozy veut encore profiter de la réunion d’Heiligendamn pour évoquer la question du Darfour. C’est d’ailleurs à lui que reviendra le rôle de rapporteur auprès de ses partenaires sur ce dossier. Il a manifesté à plusieurs reprises, avant et après son élection, sa préoccupation face à la situation des populations réfugiées dans cette région du Soudan. Et l’une des premières initiatives de son nouveau ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a été de proposer la mise en place de «corridors humanitaires» dans cette zone de conflit.

Libérer Ingrid Betancourt

Bien sûr, dans l’ensemble de ces domaines, un accord général entre les grandes puissances est indispensable pour que des solutions soient trouvées. Et les entretiens en tête à tête entre les dirigeants, qui se déroulent traditionnellement en marge du sommet du G8, peuvent contribuer à nouer des relations personnelles, susceptibles de faciliter les négociations. A Heiligendamn, Nicolas Sarkozy rencontrera ainsi, en aparté, la plupart de ses homologues présents. Parmi eux, le président russe. Cette entrevue fera partie des plus délicates pour le chef de l’Etat français. Contrairement à George W. Bush, Vladimir Poutine entretenait de très bonnes relations avec Jacques Chirac. Le président russe a d’ailleurs beaucoup tardé à prendre acte officiellement de l’élection de son successeur (48 heures), dont les prises de positions sur les droits de l’homme en Russie ne lui ont pas plu. Les deux hommes ont néanmoins manifesté leur intention de maintenir de bonnes relations bilatérales entre les deux pays et d’engager, en Allemagne, un dialogue «franc».

Au G8, Nicolas Sarkozy va donc essayer de montrer à ses partenaires qu’il est déterminé à dynamiser l’action de la France sur la scène internationale et à appliquer à la diplomatie la méthode qu’il prône en politique intérieure : la culture du résultat. Sa volonté d’intervenir en faveur de la libération d’Ingrid Betancourt, dès son élection, est assez significative de ce point de vue. Le président français a réussi à convaincre son homologue colombien, Alvaro Uribe, de libérer Rodrigo Granda, un chef de la guérilla des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie), afin qu’il joue le rôle d’intermédiaire pour faciliter les négociations en vue de libérer les otages détenus par les rebelles. L’intervention de Nicolas Sarkozy a été saluée par la famille de la franco-colombienne enlevée, il y a 5 ans, parce qu’elle a permis d’obtenir un infléchissement de la politique d’Alvaro Uribe, jusque-là, partisan de la force plutôt que de la négociation. Fort de ces avancées, le président français espère d’ailleurs dénouer d’autres fils en évoquant le sort d’Ingrid Betancourt avec les dirigeants du G8 en Allemagne. Nicolas Sarkozy a choisi un dossier difficile pour faire ses preuves.



par Valérie  Gas

Article publié le 05/06/2007 Dernière mise à jour le 05/06/2007 à 14:13 TU