Article publié le 23/11/2007 Dernière mise à jour le 23/11/2007 à 15:01 TU
La crise s’aggrave au Liban après un cinquième report de la séance parlementaire consacrée à l'élection d'un nouveau président. Le pays se retrouve sans chef de l'Etat depuis minuit.
Avec notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh
La séance parlementaire de ce 23 novembre était la réplique de celle du 25 septembre. Les députés de la majorité se sont rendus au Parlement ; ceux de l’opposition aussi. Les premiers sont entrés dans l’hémicycle, les seconds sont restés à l’extérieur pour justement ne pas assurer le quorum qui permettrait d’élire un président sans accord préalable. Pendant ce temps, le président du Parlement, Nabih Berri, qui est également l’un des chefs de l’opposition, tenait des réunions avec deux des principaux « chefs du 14-Mars », la coalition au pouvoir, le chef druze Walid Joumblatt et Saad Hariri, le fils de l’ancien Premier ministre. Il a été convenu après cette réunion de reporter la séance au vendredi 30 novembre.
Le problème, c’est que ce soir expire le mandat du président Emile Lahoud. Que va-t-il se passer ? On entre, en effet, dans une période de vide constitutionnel. Pour la première fois de son histoire, le Liban se retrouve ou va se retrouver dans quelques heures sans président. Un fait sans précédent, puisque même aux pires moments de la guerre civile, les différents protagonistes de ce conflit s’étaient toujours entendus pour éviter un vide à la tête de l’Etat. Le système politique libanais est une répartition entre les principales communautés religieuses. La présidence de la République revient à un maronite, or pour la première fois depuis l’indépendance du Liban, le pays créé par ces maronites n’aura pas de président de la République.
Concessions faites de part et d’autre
D’ici la semaine prochaine, les tractations vont se poursuivre, mais sans vraiment beaucoup de conviction. Les analystes libanais et même les hommes politiques de tous bords pensent que cette crise est appelée à durer. Le Liban se trouve dans un vide constitutionnel et l’effort qui est actuellement en cours, c’est de gérer ce vide dans le calme, afin qu’il ne dégénère pas, que la situation ne se détériore pas. Ainsi, il y a eu des concessions faites de part et d’autre : la majorité anti-syrienne n’a pas pu choisir un président à la majorité simple, mais d’un autre côté, Emile Lahoud, visiblement, ne va pas former un second gouvernement.
Le président Lahoud est encore chef de l’Etat pour quelques heures. Il doit s’exprimer ce soir. Après avoir abandonné l’idée qui circulait depuis plusieurs mois sur la formation d’un gouvernement dirigé par l’opposition, visiblement Emile Lahoud va s’orienter vers une autre formule un peu spéciale : en tant que commandant en chef des forces armées, un titre que lui confère la Constitution, il va se référer à la loi de la défense nationale, dont l’article 4 dit que l’armée est la protectrice de l’Etat. Donc, il va confier le pouvoir au conseil militaire qui comporte des hauts gradés de toutes les communautés, mais sans toutefois les nommer, sans nommer un gouvernement. On va avoir un pouvoir bicéphale : la sécurité sera aux mains de l’armée et les affaires courantes, l’économie et le reste aux mains du gouvernement de Fouad Siniora qui, également selon la Constitution, reste en place.
Instabilité sécuritaire
Or précisément, ce gouvernement vient d’adresser un communiqué, un avertissement même, au président Lahoud, le sommant de quitter le palais présidentiel dès l’expiration de son mandat, donc ce soir à minuit et ce, sous peine de poursuites judiciaires.
Chez les hommes politiques et les députés, il y a beaucoup d’incertitude. Personne n’est à même d’expliquer et de donner une vision claire de la direction vers laquelle se dirige le Liban. Une chose est certaine : aussi bien la majorité que l’opposition, tous veulent éviter que cette crise politique, extrêmement grave, extrêmement profonde ne se transforme en instabilité sécuritaire.
Directeur du Centre de recherche sur la paix, spécialiste du Moyen-Orient, interrogé dans le journal du Moyen-Orient à 17h30 (TU)
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Directeur du Centre de recherche sur la paix, spécialiste du Moyen-Orient
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