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Afrique du Sud

Jacob Zuma prend l’ANC

Article publié le 18/12/2007 Dernière mise à jour le 19/12/2007 à 06:38 TU

Thabo Mbeki félicite Jacob Zuma.(Photo : Reuters)

Thabo Mbeki félicite Jacob Zuma.
(Photo : Reuters)

Jacob Zuma a été élu, à 60 % des voix, président de l’ANC pour cinq ans, lors du congrès du parti qui se tient à Polokwane (nord du pays). Il a battu Thabo Mbeki : un formidable camouflet pour le chef de l’Etat, qui briguait un troisième mandat à la tête du mouvement.
De notre envoyée spéciale à Polokwane, Valérie Hirsch

Une formidable clameur s’est élevée dans la salle à l’annonce du résultat de l’élection du nouveau président de l’ANC. Loin des arrangements négociés du passé entre les différentes composantes de l’ANC, c’est la première fois depuis 1949 qu’il y avait un affrontement ouvert entre deux candidats. Le camp Zuma a remporté les six postes de direction du parti.

Thabo Mbeki a donné l’accolade à Zuma et a quitté tristement la salle, la tête basse, pendant que la salle entamait la chanson fétiche de Zuma, « Umshini Wani » (Apporte moi ma mitraillette), vieux refrain du temps de la lutte armée.

Les deux hommes devront toutefois partager le pouvoir : Mbeki restera, en effet, chef de l’Etat jusqu’aux élections d’avril 2009. L’Afrique du Sud pourrait connaître des mois d’instabilité politique : Mbeki s’avouera-t-il vaincu ou ménera-t-il une guerre de tranchée, pour barrer la route de la présidence du pays à Zuma, qui risque une nouvelle inculpation pour corruption ?

Le congrès s’était ouvert dimanche de manière chaotique. Pour la première fois depuis 1949, deux candidats s’affrontaient pour la présidence. Les supporteurs de Zuma ont manifesté bruyamment leur présence à travers des chansons et des gestes (un mouvement de rotation des mains utilisé en football pour signaler le changement d'un joueur) à la grande consternation des troupes fidèles à Mbeki. Ils ont même hué des proches de Mbeki : du jamais vu dans l’histoire bientôt centenaire du parti !

Dès le lendemain, le camp loyaliste a répliqué en donnant lui aussi de la voix et en levant trois doigts, symbole d’un troisième mandat pour Mbeki. Il n’y a toutefois pas eu d’incidents, malgré une forte tension.

C’est la première que l’ANC est ainsi déchirée en deux camps hostiles. Dimanche,  Mbeki a vainement appelé les délégués à se ressaisir : l’ANC « a besoin de dirigeants épris de valeurs morales comme l'étaient nos prédécesseurs ». Sans nommer Zuma, il a critiqué les «opportunistes qui ont manipulé le mouvement dans leur  intérêt personnel». Mais la majorité des délégués ont fait la sourde oreille : ils sont persuadés que Zuma est innocent et que ses déboires judiciaires (l’affaire de corruption et le procès pour viol, qui a fini par un acquittement) ont été orchestrées par le chef de l’Etat.

«C’est avant tout un vote de rejet à l’égard du style de leadership de Mbeki, autoritaire,  technocratique et distant », explique Jeremy Cronin, le secrétaire général adjoint du parti communiste qui, avec le syndicat Cosatu, est l’un des piliers du camp Zuma. « Nous n’avons aucune garantie qu’il appliquera une politique de gauche, concède Cronin, l’un des rares Blancs à siéger à la direction de l’ANC. Mais il sera plus ouvert à la discussion que son prédécesseur».

La démocratie sud-africaine pourrait en sortir renforcée : « Dans le passé, le parti a toujours affiché une unité de façade, explique le politologue Steven Friedman. Cette fois, la base s’est rebellée contre la direction et il y a eu une véritable élection démocratique. C’est important pour que l’ANC ne tombe pas dans les mêmes travers que les ex-mouvements de libération. Mais il faudra voir si ce sera juste un changement d’équipe ou une véritable démocratisation du parti».

Un personnage controversé

L’ANC devra commencer par panser ses blessures. «Zuma est un très bon médiateur, comme il l’a prouvé en ramenant la paix au Kwazulu-Natal et au Burundi, répond Sheila Meintjes, directrice des études politiques à l’université de Johannesburg. Il ramènera l’unité dans son parti».

Certains s’inquiètent toutefois des conceptions très traditionnelles de ce polygame resté ancré dans les traditions zouloues : il soutient ainsi le test de virginité, une coutume récemment interdite. Il a aussi déclaré qu’il fallait «des lois en accord avec les enseignements du Seigneur et que « l’union civile des homosexuels (légalisée en 2006) était une disgrâce ».Quel contraste avec un homme comme Nelson Mandela, ou même un Thabo Mbeki qui sont fait les champions des valeurs progressistes et féministes de l’ANC !

Mais Zuma fera partie d’une direction collective et ses alliés de la gauche veilleront au grain. « Il a fait des promesses à tout le monde, en sens opposés, constate le chercheur  William Gumede. Les mêmes forces qui se sont déchaînées au sein de l’ANC – pour réclamer un gouvernement plus à l’écoute et qui rende des comptes – finiront par le rattraper ».

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