Article publié le 02/01/2008 Dernière mise à jour le 02/01/2008 à 10:13 TU
Une image de télévision montrant la région d'Eldoret où une église a été incendiée.
(Photo : Reuters)
De notre correspondante à Nairobi, Stéphanie Braquehais
« Je n’ai pu voir que 5 ou 6 cadavres calcinés, le reste a été embarqué par la police très rapidement après l’attaque », racontait un habitant d’un village aux environs d’Eldoret, une ville située à 200 kilomètres au nord-ouest de Nairobi, dans la province de la Rift Valley. « J’accepte de témoigner, mais sous couvert d’anonymat, poursuivait ce témoin. Vous savez, je risque ma vie ne vous racontant ces choses ».
Dans la journée de mardi, une église a été incendiée par des jeunes, supporters de Raila Odinga, le candidat malheureux de l’élection présidentielle au Kenya. Plus d’une centaine de personnes avait trouvé refuge dans une église pentecôtiste de ce village. En majorité des femmes et des enfants, selon le chef de la Croix-Rouge kenyane à Eldoret. Plus d’une quarantaine de personnes, sévèrement brûlées ont été admises à l’hôpital, tandis que les morts se comptaient par dizaines.
Toute la journée de mardi, les émeutes se sont poursuivies dans la ville, des maisons brûlées faisant fuir près de 15 000 personnes, effrayées, abandonnant leur maison, leurs biens pour aller rejoindre des stations de police pour y passer la nuit. La police a passé sont temps à récolter des cadavres à travers toute la ville.
A Nairobi, si un calme précaire régnait dans le centre ville, déserté par la police, le bidonville de Mathare est devenu le cadre d’une bataille rangée entre supporters des deux camps. A Kibéra, les habitants se déclaraient prêts à de nouvelles manifestations, alors que le bidonville ressemblait à un champ de ruines, ce mardi.
Inquiétude de la communauté internationale
Le président Mwai Kibaki a appelé les chefs de tous les partis politiques à se rencontrer le plus rapidement possible pour lancer un appel au calme. Malgré ces signes d’ouverture, le porte-parole du gouvernement, Alfred Mutua, dénonçait une volonté de déstabiliser le pays par des responsables politiques, évoquant à mots couverts, les partisans de Raila Odinga. « Nous savons que dans la Rift Valley, des gens sont instrumentalisés politiquement par des responsables qui tentent de déstabiliser le pays », affirmait-il dans un communiqué.
De son côté, la société civile accusait la commission électorale d’être à l’origine de ces troubles, en raison des fraudes multiples et du retard suspect pour proclamer les résultats définitifs. « Je suis véritablement choqué par le cours des événements. Il dépend uniquement du président en place, celui qui a été réélu, de contrôler la situation, d’empêcher que des massacres se poursuivent à grande échelle », déclare Maina Kiai, le président de la commission nationale des droits de l’homme. Pour sa part, Raila Odinga semblait toujours déterminé à organiser une marche pacifique jeudi, pour dénoncer les fraudes lors du scrutin et rejeter les résultats de la commission électorale.
Selon nos informations, le président en exercice de l’Union africaine, le chef d’Etat ghanéen John Kufuor, est attendu dans les prochaines heures à Nairobi à la tête d’une délégation de l’UA pour tenter de trouver une solution au volet politique de la crise.
A écouter
Ambassadrice de France au Kenya.
« La position de la communauté internationale, en tout cas des partenaires internationaux du Kenya, est d'aider précisément le Kenya à sortir de cette crise. »
02/01/2008 par David Coffey
« Les gens se battent. Ils visent les Kikuyus, ils tuent les Kikuyus et leur disent qu'ils n'ont rien à faire dans cette région, qu'ils doivent retourner sur leurs terres d'origine, dans la Province centrale. »
02/01/2008 par Laurent Correau
« Il y a beaucoup de dégâts. Des locaux professionnels ont été vandalisés et pillés. J'ai vu des habitants de ces quartiers qui cherchaient les Kikuyus. Ils veulent expulser les Kikuyus de leur ville...»
02/01/2008 par Laurent Correau
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