par Monique Mas
Article publié le 16/01/2008 Dernière mise à jour le 16/01/2008 à 20:38 TU
Après le Hamas à Gaza mardi, c’est au tour du Djihad islamique d’essuyer, ce mercredi, les foudres sanglantes d’Israël où les pourparlers de paix ont repris lundi dans la foulée de la première visite présidentielle de George Bush, venu la semaine passée en Terre Sainte pour presser le pas des négociations lancées à Annapolis. Mais le 15 janvier a vu tomber 19 Palestiniens, parmi lesquels une douzaine de membres du Hamas dont le fils du dignitaire Mahmoud al-Zahar. Et aujourd’hui, c’est le chef militaire du Jihad islamique en Cisjordanie, Walid Oubeidi, qui a été tué par un commando israélien, chez lui, près de Jénine. Pour autant, en Israël la coalition Olmert se lézarde avec la démission de l'ultra-nationaliste Avigdor Lieberman, qui rejette les négociations.
Des Palestiniens inspectent une voiture détruite après une attaque aérienne israélienne dans la Bande de Gaza, le 16 janvier 2008.
(Photo : Reuters)
Le chef militaire des brigades al-Qods du Jihad islamique en Cisjordanie, Walid Oubeidi, est mort mercredi au petit matin dans sa ville de Qabatiya, près de Jénine, au nord du territoire. Il «a été tué au cours d'échanges de tirs qui ont éclaté après l'arrivée à son domicile d'unités de l'armée pour l'arrêter [en tant que] figure centrale du Jihad islamique qui a tenté de mener de nombreuses attaques terroristes en Israël», se justifie l’armée israélienne. Elle annonce en même temps l’arrestation d’une vingtaine de partisans présumés du Hamas en Cisjordanie où s’est replié le Fatah du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, depuis la prise de contrôle du mouvement islamique à Gaza en juin 2007.
Le 18 décembre dernier, l’alter ego de Walid Oubeidi dans la bande Gaza, Majed al-Harazine, avait été tué dans son véhicule. Mais ces « assassinats ciblés » n’excluent pas les attaques plus larges. Mercredi, au lendemain de son raid à l’est de Gaza, le plus meurtrier depuis plus d’un an, l’armée israélienne a encore procédé à un tir de missile sur le centre ville, tuant trois civils et en blessant plusieurs autres. Le même jour, un tir d’obus et un raid aérien ont également visé Beit Hanoun, au nord de la bande de Gaza où les opérations militaires israéliennes sont quotidiennes et les tirs palestiniens contre le sud d’Israël fréquents.
Mercredi, le Hamas a revendiqué huit tirs de roquettes contre Israël, en riposte au bain de sang de la veille. Ténor palestinien des négociations qui excluent le Hamas, Mahmoud Abbas a dénoncé de Ramallah un « massacre » que « le peuple palestinien ne peut pas passer sous silence » et qui ne peut pas « apporter la paix ». Une opération sécuritaire selon le commandement israélien qui explique que des unités d’infanterie et des blindés appuyés par l’aviation se sont enfoncés sur deux kilomètres à l’intérieur du territoire palestinien.
Avec une vingtaine de morts, une cinquantaine de blessés et de nouvelles arrestations de Palestiniens par l’armée israélienne, le bilan de Gaza pèse sur les négociations fraîchement rouvertes en novembre dernier à Annapolis, aux Etats-Unis, après sept ans de gel. Et tandis que trois jours de deuil étaient décrétés à Gaza, la ville sensible d’Hébron, en Cisjordanie, était le théâtre de manifestations palestiniennes. De son côté, George Bush poursuivait alors sa tournée moyen-orientale demandant aux pays arabes de « tendre la main » à Israël. « Je ne sais pas ce que nous pouvons faire de plus vis-à-vis des Israéliens », lui a rétorqué mardi le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud al-Faycal.
Gaza en deuil
A Gaza, en deuil de son deuxième fils tué mardi (après avoir perdu l’aîné en 2003 dans un précédent raid israélien), le chef du Hamas, Mahmoud al-Zahar s’est engagé à « répondre à Israël par le seul langage qu'il comprend », accusant au passage le Fatah et Mahmoud Abbas de comploter « avec Bush et avec Israël pour assiéger le peuple palestinien et le tuer ». Des accusations souvent exprimées qui n’ont pas empêché le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, de se déclarer confiant sur la conclusion d’un accord de paix cette année, comme le souhaite par George Bush qui passera la main à la Maison-Blanche en janvier 2009.
A Ryad, le porte-parole du président américain, Gordon Johndroe, ne surprend personne lui non plus en estimant que face aux « extrémistes qui cherchent à faire dérailler le processus de paix, [l’administration Bush] espère que les Israéliens ne cibleront, lors de leurs raids, que des activistes et exhorte les Palestiniens à s'abstenir de tuer des Israéliens innocents ». A chacun sa partition. Pour le porte-parole du Hamas, Sami Abou Zouhri, la poursuite des discussions israélo-palestiniennes est « un crime » compte tenu de la flambée des raids israéliens. En revanche, aux yeux du chef de l’ultra-nationaliste Yisraël Beiteinu, le ministre israélien des Affaires stratégiques et vice-Premier ministre, Avigdor Lieberman, ces manifestations sécuritaires sanglantes ne prouvent en rien que le Premier ministre Ehud Olmert fait ce qu’il faut pour protéger ses administrés.
La coalition Olmert se lézarde
Mercredi, Lieberman a claqué la porte du gouvernement et de la coalition Olmert en lui reprochant de s’être laissé entraîné par Washington dans un nouveau round de négociations où les tenants du Grand Israël ne trouvent pas leur compte. La colonisation qui se poursuit ne suffit pas aux radicaux. Politiquement, Ehud Olmert va se trouver un peu plus fragilisé par le départ du Parlement des onze députés de Yisraël Beiteinu. Il attend avec inquiétude la remise sous quinzaine du rapport final de la commission d’enquête sur les ratés de la guerre israélienne de 2006 contre le Hezbollah libanais.
Pour le moment, en termes purement comptables, Ehud Olmert conserve à la Knesset une majorité de 67 députés sur 120. Mais la douzaine de députés du parti ultra-orthodoxe Shass menace elle-aussi de quitter le navire Olmert pour cause de négociations. Si pour Lieberman « le principe de [troquer] la terre contre la paix est une erreur fatale difficile à comprendre », pour le Shass, le statut de Jérusalem est la principale pomme de discorde. Mais après la démission de Lieberman, Ehud Olmert a fait savoir « qu’il n'y a aucune alternative à des négociations de paix sérieuses » même s’il ne pourra plus vraiment, comme il le souhaitait, « compter sur un gouvernement stable ».
Souci sécuritaire ou intransigeance
Si les raids en Territoires palestiniens sont présentés à l’opinion israélienne comme un gage de bonne volonté sécuritaire, ils délivrent bien évidemment un message d’intransigeance de l’autre côté du mur. Et les radicaux palestiniens ne manquent pas de saisir la balle au bond. Dans son exil syrien, le dirigeant du Hamas, Khaled Mechaal a tenu une conférence de presse pour « dire à l’ennemi » qu’il n’a désormais plus rien à espérer en matière d’échange de prisonniers en particulier. « Il n’y aura pas d’échange impliquant Gilat Shalit – le soldat capturé en 2006 dans la bande de Gaza –, pas d’apaisement ou quoi que ce soit s’en rapprochant », lance-t-il de Damas.
Le 10 janvier, George Bush a versé une larme à Bethléem sur l’introuvable paix en souhaitant, sur le parvis de l’Eglise de la Nativité, « qu’un jour, à la suite de la formation d’un Etat palestinien, il n’y aura plus de murs ni de check-points ». En Cisjordanie, il a réitéré à Mahmoud Abbas sa conviction de voir « un traité de paix conclu » dans les douze mois. La veille il avait même prononcé le mot « occupation » pour exhorter Israël à mettre fin à la poursuite de la colonisation en échange des garanties de sécurité offertes par l’ami américain de « l’Etat juif ». Des vœux pieux pour l’instant.
Ministre palestinien de l'Information
«Israël continue de se comporter comme une force occupante et continue de saper toutes possibilités de rapprochement.»
15/01/2008 par Karim Lebhour
« Le président croyant a continué son pélèrinage en se rendant ce matin en Gallilé, près du lac de Tibériade. C'est là que Jésus -dont les paroles inspirent le président américain dans la conduite de son mandat- a délivré de célébres sermonts. »
11/01/2008 par Catherine Monnet
Politologue, professeur à l’Université de Tel Aviv
« Avigdor Lieberman est un homme politique un peu extraordinaire par rapport à la faune politique israélienne traditionnelle. »
16/01/2008