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Fonds souverains

Bruxelles demande plus de transparence

par Myriam Berber

Article publié le 27/02/2008 Dernière mise à jour le 29/04/2008 à 15:02 TU

Le cheikh Khalifa bin Zayid Al Nahyan, président de l'Abou Dhabi Investment Authority (ADIA), le plus important fonds souverain au monde.

Le cheikh Khalifa bin Zayid Al Nahyan, président de l'Abou Dhabi Investment Authority (ADIA), le plus important fonds souverain au monde.

La Commission européenne a proposé, mercredi 27 février 2008, un code de bonne conduite pour encadrer en Europe les fonds souverains, dont la puissance financière inquiète. L’objectif de Bruxelles : recommander plus de transparence à ces nouveaux maîtres de la finance.

Après les grands argentiers du G7, c’est au tour de la Commission européenne de s’intéresser aux fonds souverains (FSv). Ces investisseurs publics de Chine, du Qatar, de Dubaï ou de Russie gèrent l’épargne nationale – alimentée par les excédents pétroliers ou les surplus d’exportations – dans des placements divers. Combien de milliards représentent-ils ? Les estimations varient. Selon une étude récente du cabinet d’étude Morgan Stanley, le montant total des avoirs des FSv est compris aujourd’hui entre 2 000 et 2 500 milliards de dollars, un montant qui pourrait grimper à 12 000 milliards de dollars d’ici 2015. Certains économistes tablent même jusqu’à 28 000 milliards pour 2020.  Doté de quelque 800 milliards de dollars, l’Abou Dhabi Investment Authority est le fonds souverain le plus puissant de la planète. La Chine a mis en place le China Investment Corp. Une société d’investissements d’Etat chargée de faire fructifier une partie de ses réserves de change et dont la force de frappe atteint quelque 200 milliards de dollars. Pour sa part, la Russie a annoncé pour 2008 la création d’un fonds dont la dotation de départ atteindrait 40 milliards de dollars.

Ces fonds ont fait leur entrée dans la finance et l’industrie occidentale : les Bourses, les banques ou les chaînes de grands magasins. Plus récemment encore, ils se sont portés au secours d’établissements financiers américains et européens malmenés par la crise des crédits immobiliers à risque («subprimes »). Le fonds du gouvernement de Singapour est ainsi entré au capital de Citigroup, a renfloué la banque suisse UBS, et apporté 5 milliards de dollars dans les caisses de l’institution financière Merrill Lynch. Aujourd’hui, le fond koweitien Kuwait Investment Authority (KIA), qui détient 213 milliards de dollars, indique étudier le dossier de la Société Générale et s'intéresser plus généralement au secteur des services financiers et de l'immobilier aux Etats-Unis et en Europe.

Des fonds puissants et opaques

La puissance financière de ces fonds originaires des pays émergents n’est pas sans susciter des craintes en Occident. Au point que les grands argentiers des sept pays les plus industrialisés (G7) ont prôné, le 9 février 2008 à Tokyo, plus de transparence dans leur fonctionnement et leurs stratégies d’investissement. La Commission européenne s’interroge, elle aussi, sur leur ambition économique ou politique. Elle a proposé, mercredi 27 février 2008, la mise en place d’un code de bonne conduite pour encadrer l’essor de ces fonds au sein de l’Union européenne.

Mais la Commission a rejeté toute idée de législation contraignante, contrairement aux Etats-Unis, par exemple, qui ont un mécanisme de contrôle des investissements étrangers. Bruxelles redoute, en effet, que des dispositions plus protectionnistes n’entraînent des mesures de rétorsion à l’encontre de l’Europe ou l’empêche de profiter de la manne que représentent ces colosses financiers. De l’avis de la Commission, les Vingt-Sept disposent déjà de moyens pour protéger, le cas échéant, des intérêts nationaux jugés stratégiques. Cette réflexion devrait rebondir au cours des prochaines semaines. Les propositions de la Commission seront discutées par les ministres des Finances de l’UE lors de leur prochaine réunion prévue le 4 mars, en vue du sommet européen. Les discussions promettent d’être animées car certains Etats, notamment l’Allemagne, prônent une action plus dure face aux fonds souverains.