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Proche-Orient

Israël quitte Gaza mais pourrait revenir

par Frédérique Misslin

Article publié le 03/03/2008 Dernière mise à jour le 04/03/2008 à 02:32 TU

Il faut s’attendre à de nouvelles frappes israéliennes dans la bande de Gaza. L’Etat hébreu a mis fin à son offensive ce lundi mais la bataille est loin d’être terminée. La stratégie militaire israélienne a-t-elle été payante ? Une chose est sûre, elle porte un coup très dur au processus d’Annapolis, à la veille de la visite au Proche-Orient de Condoleezza Rice.

Manifestation de Palestiniens à Gaza. Le Hamas a salué la fin de l'offensive israélienne dans la bande de Gaza comme une « victoire » de ses combattants.(Photo : AFP)

Manifestation de Palestiniens à Gaza. Le Hamas a salué la fin de l'offensive israélienne dans la bande de Gaza comme une « victoire » de ses combattants.
(Photo : AFP)

En dépit du lourd bilan en pertes humaines, le chant de la victoire résonne dans les rues de Gaza. L’armée israélienne s’est retirée du territoire palestinien au terme d’une offensive sanglante et pour le Mouvement de la résistance islamique, il s’agit d’un recul, d’une défaite de Tsahal. Dans un exercice de rhétorique classique, les dirigeants du Hamas clament aujourd’hui qu’ils ont emporté le face à face des derniers jours qui s’est soldé par la mort d’une centaine de Palestiniens dans la bande de Gaza.

L’état-major israélien, qui déplore la perte de deux soldats, affirme simplement que la campagne « Hiver chaud » a atteint son but. Pour autant de nouvelles offensives restent à l’ordre du jour. Le Premier ministre Ehud Olmert a prévenu : « Nous sommes au cœur de la bataille (…) ce qui s’est passé n’est pas un incident isolé, il ne s’agit pas d’une frappe ponctuelle ». Pas question  pour Tsahal de réoccuper la bande de Gaza. Les responsables israéliens sont catégoriques : l’opération « Hiver chaud » avait pour but de faire cesser les tirs de roquettes sur Israël, en provenance des Territoires palestiniens. Deuxième objectif affiché : affaiblir le Hamas au point qu’il sera incapable de contrôler Gaza. Raids aériens, incursions terrestres et opérations commandos sont donc envisageables dans les jours à venir, Ehud Olmert se laisse le choix des armes.  

Stratégie efficace ?

Certains analystes s’interrogent sur les avantages de cette stratégie israélienne. La démonstration de force de l’armée a certes permis à l’Etat hébreu d’envoyer un message de fermeté à l’adresse du Hamas mais aussi aux Israéliens. Pour autant sur le terrain, la fréquence des tirs de roquettes palestiniens n’a pas faibli ce week-end et la communauté internationale s’est émue de l’ampleur de l’offensive israélienne.

L’opération « Hiver chaud » a-t-elle été contreproductive ? C’est l’opinion de Menachem Klein, professeur à l’université Bar Ilan de Tel-Aviv, qui estime que les récents évènements ont surtout affaibli l’unique interlocuteur des israéliens : Mahmoud Abbas. Devant l’ampleur des dégâts à Gaza, le président de l’Autorité palestinienne s’est résolu à annoncé la suspension de tout dialogue avec Israël. La fin de l’opération israélienne a infléchit sa position puisqu’il se dit désormais disposé à travailler « en vue de la conclusion d’une trêve totale avec la partie israélienne ». Un souhait qui sera difficile à réaliser car Mahmoud Abbas n’a plus aucune influence sur la bande de Gaza depuis le coup de force du Hamas dans le territoire, en juin 2006.

Un coup porté au processus de paix

La stratégie israélienne vise donc à décrédibiliser le Hamas à Gaza mais là encore, le Mouvement de la résistance islamique ne veut pas lâcher prise sur le terrain politique. Il a prouvé dimanche qu’il pouvait bloquer, à distance, une partie de la Cisjordanie. Des manifestations de soutien à Gaza ont été organisées, les universités avaient fermé leur portes. C’est cette influence qui inquiète l’Etat hébreu. Ehud Olmert craint l’extension du pouvoir du Hamas à la Cisjordanie. Le chef du gouvernement israélien a évoqué ce scénario devant la Commission de la défense et des affaires étrangères de la Knesset, affirmant que cette perspective pouvait être enrayée uniquement par des moyens diplomatiques. Israël maintient donc la pression au niveau militaire tout en affichant une volonté de dialogue avec les forces palestiniennes modérées. Il lui faudra pourtant trancher. L’alternative est simple : engager des négociations avec le Hamas ou reconquérir Gaza.

Après une offensive sanglante, l’heure est à nouveau à la négociation. Un membre du gouvernement israélien, cité par l’agence Reuters, a expliqué qu’Israël avait décrété une pause de deux jours dans l’offensive à l’occasion de la visite au Proche-Orient de Condoleezza Rice. La secrétaire d’Etat américaine doit se rendre à Jérusalem et à Ramallah mardi et mercredi.

A Paris, le ministre des Affaires étrangères estime que l’acharnement de l’opération militaire israélienne « n’aura aucun résultat ». Bernard Kouchner a comparé la situation à un cercle vicieux dont on ne peut pas sortir. Le cycle des représailles risque de se poursuivre dans les deux camps. Gaza enterre ses morts et d’ores et déjà, le Hamas crie vengeance.