par RFI
Article publié le 12/03/2008 Dernière mise à jour le 12/03/2008 à 18:57 TU
Athanase Seromba, 45 ans, vicaire de la paroisse de Nyange, dans l’ouest du Rwanda, a été condamné mercredi en appel par le Tribunal international pour le Rwanda (TPIR) pour son rôle dans le génocide rwandais et dans la mort de 1 500 Tutsis réfugiés dans son église. C’est la première fois que le TPIR, basé à Arusha (Tanzanie), condamne un prêtre catholique à la prison à vie pour crime de génocide et crime contre l’humanité. Le rôle de l’Eglise dans le génocide de 1994 suscite beaucoup de polémiques.
L’abbé Seromba avait été condamné le 13 décembre 2006, en première instance, à 15 ans de prison, pour « aide et encouragement » à commettre les crimes de génocide et d’extermination. Les magistrats du TPIR ont annulé cette peine et ont imposé, à la majorité, la peine de prison à vie, considérant que l’accusé était coupable de crimes de génocide et d’un crime contre l’humanité (extermination), estimant que le prêtre avait accepté la décision des autorités administratives locales de détruire son église de Nyange. La chambre d’appel a conclu que le prêtre « a commis le génocide ainsi que l’extermination en tant que crime contre l’humanité en vertu de son rôle dans la destruction » de cette église, où 1 500 Tutsis avaient cherché refuge. L’abbé Seromba avait conseillé au conducteur d’un bulldozer d’attaquer l’édifice religieux par son côté le plus fragile. Il a toujours plaidé non coupable.
Porte-parole du TPIR à Arusha
« La chambre d’appel a estimé que l’abbé Athanase Seromba avait joué un rôle-clé dans la destruction par des bulldozers de l’église de Nyange qui avait entraîné la mort de 1 500 Tutsis qui étaient réfugiés à l’intérieur ».
Après le génocide, le prêtre Athanase Seromba s’était réfugié dans l’ex-Zaïre, puis au Kenya, avant de se rendre en Italie, dans le diocèse de Florence, qui lui avait permis d’exercer dans un village de Toscane. En février 2002, à la suite de pressions internationales et d’un mandat d’arrêt du TPIR que l’Italie refusait d’exécuter, il s’est rendu au Tribunal d’Arusha « pour que la vérité se manifeste ». Deux autres prêtres rwandais, Emmanuel Rukundu et Homisdas Nsengimana, sont en procès devant le TPIR. Un quatrième abbé rwandais inculpé, Wenceslas Munyeshyaka, pourrait être jugé en France, le TPIR s’étant dessaisi du dossier au profit de la justice française.
Les observateurs soulignent que lors des exterminations de Tutsis de 1959 et 1962 au Rwanda, les Tutsis qui s’étaient refugiés dans les églises ont eu la vie sauve. Tel n’a pas été le cas trente ans plus tard, lors du génocide de 1994. Selon l’organisation non-gouvernementale African Rights, plus de Rwandais ont péri dans les paroisses que partout ailleurs dans le pays. Les Nations unies affirment que le génocide rwandais, d’avril à juillet 1994, a fait près de 800 000 morts, pour la plupart des Tutsis, l’ethnie minoritaire, ainsi que des Hutus modérés.