Article publié le 09/05/2008 Dernière mise à jour le 09/05/2008 à 06:56 TU
Le président serbe, Boris Tadic (à gauche), et l'ultranationaliste, Tomislav Nikolic (à droite).
(Photos : Reuters)
Pour ou contre le rapprochement avec l’Union européenne, ainsi formulé le choix parait simple, au point que les élections législatives de dimanche prennent les allures de référendum. C’est d’ailleurs ce que répète à l’envie Vuk Jeremic, le ministre des Affaires étrangères, qui mise sur l’envie d’Europe exprimée par les Serbes à travers les sondages, et qui permettrait à sa famille politique, le camp du président Boris Tadic, de l’emporter.
Mais la réalité électorale apparaît bien plus retorse. Si en début d’année le président Tadic, membre du Parti démocrate (DS) l’a emporté d’un cheveu sur l’ultranationaliste Tomislav Nikolic cette fois les pronostics sont inversés. Les radicaux dont le chef est actuellement jugé au Tribunal pénal international (TPI) de La Haye pour crimes de guerre, ont axé leur campagne sur des revendications sociales, la lutte contre la corruption, mais surtout profitent plus que les autres formations de l’électrochoc provoqué par la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo en février.
Le Kosovo sème le trouble
Depuis que le Kosovo, territoire majoritairement albanais a fait sécession, la Serbie était devenue ingouvernable. Le Premier ministre Vojislav Kostunica accusait le chef de l’Etat de brader la souveraineté nationale au prétexte qu’il souhaitait maintenir le cap de l’intégration à l’Union européenne dont la majorité des Etats membres a reconnu l’indépendance du Kosovo.
Si l’ensemble de la classe politique feint de croire qu’un retour de la province dans le giron national reste possible, les partis politiques en tirent des conséquences sensiblement différentes. Le président Boris Tadic prône la poursuite du rapprochement avec l’UE, arguant qu’il sera plus facile de négocier le retour du Kosovo en ayant de bonnes relations avec Bruxelles. A l’inverse le Premier ministre Vojislav Kostunica nationaliste modéré a rapproché son discours de celui des radicaux. Il rejette tout lien avec l’UE dès lors que celle-ci ne reconnaît pas l’intangibilité des frontières de la Serbie.
Désormais alliés sur la question du Kosovo, nationalistes modérés et radicaux assurent qu’en cas de victoire électorale ils annuleront aussitôt l’Accord d’association et de stabilisation récemment signé à Luxembourg par Boris Tadic et son vice-Premier ministre Bozidar Djelic.
Menaces de mort
Alors que les esprits s’échauffent depuis des mois sur la question du Kosovo et que la classe politique fait dans la surenchère, la campagne électorale aura connu de sombres points de tension. Il y a d’abord eu cette lettre révélée par la presse. Le texte menaçait le président Tadic « d’une balle dans le front » pour avoir trahi « le peuple serbe », sous entendu bradé le Kosovo. Revendiquée par un groupuscule, la méthode rappelle le traumatisme de 2003 quand le Premier ministre Zoran Djindjic avait été assassiné. En fin de semaine dernière, des affiches, très vite déchirées, traitaient les pro-européens « d’ennemis de l’Etat ».
Des affiches associent le Premier ministre Vojislav Kostunica à une photo de Vojislav Seselj en arme.
(Photo : Reuters)
Jeudi dernier d’autres affiches sont apparues. Cette fois c’est le Premier ministre Vojislav Kostunica qui se voyait associé à une photo de Vojislav Seselj en arme, le président du parti radical jugé devant le Tribunal pénal international de La Haye pour crimes de guerre. Manière de mettre en garde contre une possible coalition entre nationalistes modérés et radicaux, un scénario qui n’est pas exclu.
Une crispation révélatrice de l’enjeu du scrutin que beaucoup estiment être le plus important depuis la chute de Slobodan Milosevic. Après huit années de transition la Serbie va décider de son avenir, l’intégration à terme à l’Union européenne ou un très hypothétique rapprochement avec la Russie auquel d’ailleurs Moscou n’appelle pas, synonyme d’isolement.
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