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Crise financière

L’Etat britannique prend les banques en main

par David Baché

Article publié le 08/10/2008 Dernière mise à jour le 08/10/2008 à 19:46 TU

La Grande-Bretagne investit près de 65 milliards d’euros pour entrer au capital des principales banques du pays, une nationalisation partielle destinée à relancer le secteur financier. Le plan de soutien prévoit aussi l’injection de près de 260 milliards d’euros de liquidités par la Banque d’Angleterre. Des annonces accueillies froidement sur les places boursières.
Une affiche «<em>Les marchés vont de l'avant</em>» dans les rues de Londres, en décalage avec la crise financière internationale.(Photo : Reuters)

Une affiche «Les marchés vont de l'avant» dans les rues de Londres, en décalage avec la crise financière internationale.
(Photo : Reuters)

Après les Etats-Unis, c’est le Royaume-Uni qui vire sa cuti. Chantre du libéralisme économique, l’Etat britannique a décidé ce lundi de nationaliser partiellement les principales banques du pays, afin de redonner confiance aux investisseurs.

Le plan de soutien prévoit un programme de recapitalisation des banques de près de 65 milliards d’euros (50 milliards de livres), afin de consolider les finances des établissements, mises à mal par la crise financière et par la crise immobilière.

Plus classique, le plan prévoit aussi l’injection, par la Banque d’Angleterre, d’au moins 260 milliards d’euros (200 milliards de livres). Le principe de ce « Special liquisity scheme » est d’augmenter les liquidités disponibles, de redonner confiance aux investisseurs, et donc de relancer les prêts interbancaires. « Ce qu’on peut faire, explique le ministre britannique de l’Economie Alistair Darling, c’est réduire l’effet de peur, qui empêche les banques de se prêter à plus long terme ».          

Nationalisation partielle

C’est parce que l’Etat entre dans le capital des banques qu’on parle de nationalisation partielle, mais les établissements restent évidemment des institutions privées. « Nous voulons faire on sorte de faire fonctionner le système, insiste encore le Chancelier de l’Echiquier. C’est un processus qui va inévitablement prendre du temps. Il ne s’agit pas d’un changement immédiat mais d’une restructuration, d’une stabilisation du système et c’est très important. » En septembre 2007, Londres avait déjà initié le mouvement, en nationalisant Northern Rock puis, il y a un mois, Bradford & Bingley.

Huit banques sont, pour le moment, concernées par cette nouvelle intervention : Barclays, HBOS, Lloyds TSB, Nationwide Building Society, Royal Bank of Scotland, Standard Chartered, HSBC, ainsi que l’Espagnole Abbey (elle est détenue par le groupe Santander). Ces deux dernières ont, le jour même, indiqué qu’elles n’utiliseraient pas les fonds proposés par l’Etat pour procéder à leur recapitalisation. Une démarche à laquelle elles se sont engagées, mais qu’elles effectueront grâce à leurs propres ressources.

A noter que par cette intervention, l’Etat ne devient pas un actionnaire parmi d’autres, puisque ce sont des titres dits « préférentiels » qu’il acquiert. « Ces actions lui donnent droit à des dividendes avant les autres, commente l’économiste Benjamin Carton, du CEPII (Centre d'études prospectives et d'informations internationales). En fait c’est un super-actionnaire, un actionnaire privilégié. »

Un système qui, selon Alistair Darling, permettra à l’Etat de récupérer en trois ans l’argent public investi dans ce plan de sauvegarde des banques.        

Une précision destinée à rassurer les ménages, puisque c’est le contribuable qui paye. Dans le même sens, Londres conditionne son aide à certaines modalités : les banques doivent s’engager à soutenir les petites et moyennes entreprises, ainsi que les particuliers désireux de souscrire des prêts immobiliers. Les banques devront aussi revoir les rémunérations de leurs dirigeants.

Les marchés pas enthousiastes

Malgré l’annonce de ce plan exceptionnel, les marchés n’ont pas réagi de manière très enthousiaste.  

Mercredi matin, dans le sillage des bourses asiatiques, les places européennes ont toutes ouvertes à la baisse avant de dégringoler carrément. En fin de matinée, à Londres, la bourse reculait même de 7,82%, son record au plus bas depuis quatre ans. C’est ce qu’explique l’économiste Benjamin Carton :

Benjamin Carton

Economiste au Cepii, le Centre d'études prospectives et d'informations internationales

« Comme juste après cette annonce, l'ensemble des marchés boursiers mondiaux ont continué à s'effondrer, on a du mal à penser que ce système sera très efficace. »

08/10/2008 par David Baché


Cette action d’envergure à l’échelle internationale est venue quelques heures plus tard, avec l’annonce de l’action coordonnées de six banques centrales, notamment de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Banque fédérale américaine (FED). Une annonce qui a permis aux bourses, y compris à Londres, de se rétablir et de retrouver, globalement l’équilibre… pour quelques heures seulement : mercredi soir, comme toutes les bourses européennes, Londres clôturait à la baisse.

La dégringolade généralisée a commencé ce matin à Tokyo avec une baisse de plus de 9%

A Tokyo, la correspondance de Frédéric Charles

 

Le yen devient l’ultime valeur refuge aujourd’hui à Tokyo, davantage que l’or. Il passe sous le seuil des 100 yens face au dollar. Lorsque tout va mal dans le monde, le yen rayonne, même si les taux d’intérêt au Japon ne dépassent pas 0,5%. Le Premier ministre japonais, Taro Aso, qualifie d’anormale cette chute de 9,3% de la Bourse de Tokyo en une seule séance. Et il envisage de prendre des mesures pour la soutenir. Le titre de Toyota est l’un des plus vendus. Il cède 7% de sa valeur. Selon le journal Nikkei, le numéro 1 mondial de l’automobile pourrait voir ses bénéfices fondre de 40%, au terme de l’année fiscale. Ses ventes aux Etats-Unis ont diminué de 32% en septembre. Selon Kazuhiro Takahashi de la maison de titres Daiwa, les investisseurs cèdent à la panique. La Bourse de Tokyo recule de 26% depuis septembre, de 45% depuis son niveau le plus haut, il y a un an.

A écouter

François Morin

Huit banques britannique sont concernées par une prise de participation du gouvernement qui se fera sous forme d'actions préférentielles sans droit de vote. C'est une façon de dire qu'il ne s'agit pas de véritables nationalisations.

08/10/2008