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Afghanistan / Etats-Unis

Le piège afghan, défi majeur du futur président américain

Article publié le 02/11/2008 Dernière mise à jour le 03/11/2008 à 00:44 TU

Tandis que les talibans gagnent des positions sur le terrain, Washington s'est engagé à envoyer de nouveaux renforts en Afghanistan, en parallèle à une réduction des forces en Irak, pour venir en aide aux 70 000 soldats de la coalition. Les deux candidats à la Maison Blanche, le démocrate Barack Obama et le républicain John McCain, ont d'ores et déjà souscrit à l'envoi de troupes supplémentaires sur ce front.

« <em>Nous voulons la sécurité et la paix.&nbsp;[..] Nous ne voulons plus de victimes civiles chez les Afghans</em> » explique Moussa, vendeur d’oignons.( Photo : Constance de Bonnaventure )

« Nous voulons la sécurité et la paix. [..] Nous ne voulons plus de victimes civiles chez les Afghans » explique Moussa, vendeur d’oignons.
( Photo : Constance de Bonnaventure )

De notre correspondante à Kaboul, Constance de Bonnaventure

« J’aimerais demander au prochain président américain qu’il nous apporte la sécurité. C’est le problème majeur de notre pays, les Américains étaient censés apporter la paix. Les Afghans en ont marre des talibans mais aussi marre des Américains. Talibans et Américains tuent des innocents ». Ahmad Zia est étudiant à la faculté de Kaboul. Ici, les jeunes s’intéressent de très près à l’élection présidentielle américaine. Ils savent que leur avenir en dépend. Jean à la mode, gel dans les cheveux, très branché, Ahmad Zia est fan de Barack Obama. « Comme il est Noir, il comprendra plus facilement nos problèmes ethniques », espère-t-il. Pourtant, ce jeune homme n’hésite pas à rappeler que sous les talibans les conditions de vie étaient meilleures. « Aujourd’hui, la quasi-totalité du pays est en proie aux combats entre forces étrangères et talibans, ou à la criminalité ».

Sept ans après la chute du régime taliban et l’intervention militaire américaine, la population afghane est pessimiste. Son quotidien ne s’est pas amélioré et aujourd’hui les Afghans n’ont qu’un mot à la bouche : la sécurité. Barack Obama ou John McCain, le prochain président des Etats-Unis devra s’atteler au vaste chantier afghan. Il s’agira avant tout pour le dirigeant américain de récupérer le soutien populaire.

« Nous voulons la sécurité et la paix. J’espère que le prochain président américain ne refera pas les mêmes erreurs. Nous ne voulons plus de victimes civiles chez les Afghans », explique Moussa, vendeur d’oignons à quelques mètres de la base militaire américaine de KAIA, près de l’aéroport en périphérie de Kaboul. Chaque jour, il voit passer des dizaines de convois américains devant sa boutique, mais son espoir s’est effrité. « Les Américains n’ont pas fait leur maximum pour relever l’Afghanistan », poursuit-il.

Une solution s’impose : des négociations avec les insurgés

La stratégie défendue par l’armée américaine, « gagner les cœurs et les esprits des Afghans », devra être appliquée plus que de coutume. Pour Eric Bartz, Américain travaillant dans le secteur du développement depuis deux ans à Kaboul, il faut « afghaniser » l’aide internationale et rendre l’Afghanistan plus autonome. « Le prochain président américain devra collaborer de très près avec les Afghans pour qu’ils aient des objectifs communs qui servent les intérêts des deux pays ».

Rendre populaire l’action américaine, participer à la stabilité de l’Etat afghan ou encore trouver de nouvelles solutions à ce conflit, tels sont les défis qui attendent le prochain président américain. ( Photo : Constance de Bonnaventure )

Rendre populaire l’action américaine, participer à la stabilité de l’Etat afghan ou encore trouver de nouvelles solutions à ce conflit, tels sont les défis qui attendent le prochain président américain.
( Photo : Constance de Bonnaventure )

Très présents militairement en Afghanistan avec leurs 33 000 soldats, les Américains y sont aussi les plus gros investisseurs et donateurs. Pour l’armée américaine, le conflit afghan est aujourd’hui plus meurtrier que la guerre en Irak. Depuis 2001, 625 soldats américains ont perdu la vie sur le sol afghan. Et de jour en jour, les combats qui opposent forces militaires étrangères aux insurgés talibans s’intensifient. « Je pense que la guerre en Irak nous a particulièrement distraits. On aurait dû, dès le début, accorder toute notre attention à l’Afghanistan, renforcer notre présence et mettre plus d’efforts dans la conception de notre stratégie ici », poursuit l’Américain Eric Bartz.

Selon beaucoup d’acteurs clés, diplomates ou encore chefs militaires, une solution s’impose : les négociations avec les insurgés. Et dans ces discussions avec les talibans, le rôle des Etats-Unis sera déterminant. Les Américains ont compris que cette guerre ne pouvait être gagnée militairement. Massoud Farivar est afghano-américain. Il dirige l’unique radio libre de Kaboul, Salam Watandar. Voilà près de deux ans qu’il est rentré dans son pays natal pour participer à la reconstruction. « Les Américains, l’Occident, sont sur le point de perdre l’Afghanistan. Et s’il n’y a pas de réels changements dans la stratégie politique américaine, ça va être extrêmement difficile de gagner l’Afghanistan. Résultat : l’Afghanistan, mais aussi toute la région, pourrait plonger dans le chaos. Le futur président américain doit non seulement continuer à exercer une pression militaire mais aussi trouver des solutions politiques. On doit avoir recours à ce genre de stratégie pour avoir la paix », affirme Massoud Farivar.

Rendre populaire l’action américaine, participer à la stabilité de l’Etat afghan ou encore trouver de nouvelles solutions à ce conflit, tels sont les défis qui attendent le prochain président américain. Le rôle des Etats-Unis est déterminant dans la résolution de ce conflit et l’Afghanistan devient un enjeu majeur de la politique intérieure américaine.