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Thaïlande

L’épreuve de force se durcit

Article publié le 01/12/2008 Dernière mise à jour le 01/12/2008 à 16:18 TU

Le symbole est fort. L'Alliance du peuple pour la démocratie, ce mouvement d'opposition qui bataille contre le gouvernement thaïlandais, décide de transférer son quartier général dans les deux aéroports de Bangkok. L'occupation continue donc, même si dans le même temps les manifestants ont commencé à évacuer l'immeuble où siège le pouvoir. Ils y campaient depuis plus de trois mois. Pendant ce temps, les rumeurs de coup d'Etat se font de plus en plus insistantes.

Des policiers sur la route menant à l’aéroport international de Bangkok, le 30 novembre 2008. (Photo : Reuters)

Des policiers sur la route menant à l’aéroport international de Bangkok, le 30 novembre 2008.
(Photo : Reuters)


Avec notre correspondant à Bangkok,
Arnaud Dubus

Le bras de fer se poursuit. Et toute l’attention se concentre maintenant sur la décision de justice que va prendre la Cour constitutionnelle mardi matin. Celle-ci va très probablement dissoudre trois des partis de la coalition gouvernementale, dont le parti du Premier ministre, Somchai Wongsawat, qui se trouve actuellement à Chiang Mai, dans le nord du pays.

Si la décision de justice dissout effectivement les trois partis, il n’y aura plus de gouvernement et l’on peut s’attendre à ce qu’un gouvernement de « technocrates » soit nommé, peut-être par le roi, peut-être par le président de l’Assemblée nationale.

Mais il se pourrait également qu’il y ait des affrontements devant le siège du tribunal de la Cour constitutionnelle, entre les « rouges », donc les pro-gouvernementaux et les « jaunes », les anti-gouvernementaux ; et à ce moment-là, si des affrontements violents se produisaient, évidemment cela changerait tout à fait la situation.

De nouvelles rumeurs de putsch

Si demain matin, il y avait des affrontements avec un certain nombre de morts, il est évident que l’armée, qui est tout à fait prête pour l’instant à prendre le pouvoir, le saisirait immédiatement et instaurerait un gouvernement composé de technocrates et en partie de militaires. Le coup d’Etat reste donc toujours une possibilité, mais peut-être demain soir, plutôt que ce soir.

Pendant ce temps, des dizaines de milliers de touristes sont toujours bloqués dans le pays. Quelque 1 600 Français veulent ainsi rentrer chez eux. Un avion d'Air France est parti spécialement à Phuket pour ramener certains d'entre eux.

Scénario pour un coup d’Etat


La crise politique pourrait connaître un nouveau tournant. Beaucoup d'observateurs pensent en effet qu'un coup d'Etat est la seule issue à la crise. En septembre 2006, les militaires avaient pris le pouvoir pour, avaient-ils dit, sauver le pays. Des chars avaient pris place au carrefour des grandes artères de la capitale.

Deux ans plus tard, il semble que ce scenario brutal ne soit plus d'actualité. En revanche, nous pourrions assister à un coup d'Etat civil, préparé par les plus hautes autorités de l'Etat, c'est-à-dire en accord avec le roi, l'armée, les élites et évidemment avec la complicité des manifestants antigouvernementaux.

Acte 1 du scénario : la cour constitutionnelle du royaume pourrait dissoudre dès mardi les trois partis politiques qui forment la coalition gouvernementale. Des partis qui sont accusés de fraudes électorales.

Acte 2 : en l'absence de gouvernement, la chambre basse du Parlement serait dissoute par le roi. Ce qui mènerait à de nouvelles élections.

Acte 3 : dans l'attente de ce scrutin, un gouvernement intérimaire serait mis en place, formé de technocrates et de militaires. On assisterait donc bien à un coup d'Etat, un coup déguisé, sponsorisé par les militaires et Sa Majesté.

Les partisans de ce scénario affirment que les manifestants de l'Alliance du peuple pour la démocratie obtiendraient alors la mise en place d'un nouveau régime : un nouvel ordre autoritaire dans lequel par exemple seuls 30% des députés seraient élus.

Selon les observateurs, le puzzle de la crise doit prendre forme avant le 5 décembre prochain, date anniversaire du roi. Bhumibol Adulyadej aura alors 81 ans.