par RFI
Article publié le 24/12/2008 Dernière mise à jour le 24/12/2008 à 14:25 TU
Les militaires affirmant avoir pris le pouvoir mardi en Guinée après la mort du président Lansana Conté ont promis ce mercredi d' « organiser des élections libres, crédibles et transparentes fin décembre 2010 », selon un communiqué lu à la radio nationale. Ils ont également assuré que « certains officiers généraux » loyalistes « envisagent l'intervention de mercenaires venus de pays voisins qui sont déjà à l'intérieur » du pays, selon un autre communiqué.
Ce coup de force encore très confus, le soutien des putschistes au sein de l'armée étant difficile à évaluer, inquiète vivement la communauté internationale, qui a condamné cette tentative de coup d'Etat.
La population craint des violences, aussi préférait-elle rester chez elle ce mercredi. Les marchés, stations-services et grands magasins sont demeurés fermés à Conakry. Seules quelques échoppes ont ouvert.
« Peuple de Guinée, la prise du pouvoir par ton armée est un acte de civisme qui répond à la volonté de sauver un peuple en détresse. Fier d'avoir accompli cette mission, le Conseil (CNDD, junte) n'a aucune ambition de s'éterniser au pouvoir », précise un communiqué lu à la radio nationale guinéenne. « La seule raison est le souci de la sauvegarde de l'intégrité territoriale. C'est pourquoi, sans réflexion profonde, le Conseil s'engage à organiser des élections libres, crédibles et transparentes fin décembre 2010 », poursuite le texte. « Le Conseil s'engage à respecter solennellement cette déclaration », conclut le communiqué. Le mandat du président Lansana Conté, décédé lundi soir, s'achevait fin 2010.
Les militaires putschistes ont par ailleurs assuré ce mercredi que « certains officiers généraux » loyalistes « envisagent l'intervention de mercenaires venus de pays voisins qui sont déjà à l'intérieur » du pays.
Le pays reste dans l'incertitude
Si le coup d'Etat réussissait, cela voudrait dire qu’il aurait deux ans de transition avant l'élection d'un nouveau président.
Aujourd'hui, aux termes de la Constitution, les élections sont censées être organisées dans les 60 jours. Bien sûr, une élection présidentielle dans deux mois paraît irréaliste : le recensement n'est pas terminé. Des élections, législatives cette fois, sont prévues en Guinée, et tout n'est pas encore prêt.
Mais deux ans, c'est long. Décembre 2010, cela correspond en fait à la fin prévue du mandat de Lansana Conté, mort avant-hier lundi, même si dans leur communiqué, les militaires putschistes prennent soin de préciser que le Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD) n'a aucune ambition de s'éterniser au pouvoir.
Les partis politiques guinéens veulent une élection dans les meilleurs délais. Dans l'opposition par exemple, Jean-Marie Doré, qui dirige l'UPG, ne se satisfait pas du tout de cette perspective.
Les partis politiques d'opposition ont prévu de se rencontrer dans la journée. Rappelons que pour le moment, le coup d'Etat n'a pas réussi. Les déclarations des putschistes sont à prendre avec précaution.
Qui sont les putschistes ?
Pour l'instant, cela reste obscur : impossible de dire encore si les putschistes ont un chef, et s'ils en ont un, quel est son nom. Mardi soir, on a appris par communiqué que le Conseil comporte 32 noms... 26 militaires et 6 civils.
Pour le moment en tout cas, toute l'armée n'est pas derrière les putschistes. Ils l'ont reconnu dans un communiqué : « Certains officiers généraux continuent à reconnaître la légitimité de l'Assemblée nationale ».
Le moment important pour savoir ce que va faire l'armée, ce sera sans doute vendredi, après demain, date prévue en principe pour les obsèques du président défunt, Lansana Conté.
Le profil bas de l’oppositionEn attendant, peu de voix s'élèvent en Guinée pour dénoncer le putsch. Les leaders de l'opposition ont, semble t-il, adopté un profil bas.
Si dans son ensemble, la classe politique guinéenne ne veut pas voir revenir les militaires au pouvoir, elle ne condamne que du bout des lèvres le coup de force. L'explication est simple : pour l'opposition, cette opération militaire est une opportunité qui peut permettre de rompre avec le passé et le régime Conté, sclérosé et accroché au pouvoir depuis près d'un quart de siècle.
« Rien n'a bougé depuis tout ce temps », constate un opposant. « Avec Lansana Conté, on n'a même jamais réussi a obtenir un seul jour de dialogue », dit il, avant de conclure : « Il existe aujourd'hui une fenêtre de tir et avec l'appui de la communauté internationale, on peut changer la donne ».
Reste à savoir ce que les militaires putschistes ont derrière la tête. S'ils réussissent à prendre le pouvoir, choisiront-ils l'option la plus acceptable par tous les Guinéens, a savoir une transition négociée avec les civils pour organiser rapidement des élections transparentes ?
L'opposition sera-t-elle à même de surmonter ses propres divisions pour imposer ce scénario ? Si elle n'y arrive pas, les militaires devront quand même tenir compte d'une population désespérée qui veut, elle aussi, en finir avec l'ancien système. Il y a deux ans, la rue a failli renverser le vieux général qui vient de mourir. Aujourd'hui, les putschistes sont prévenus.
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C'est un coup de force qui était prévisible mais qui, malheureusement, s'est déroulé dans des conditions déplorables, parce que ce n'était pas toute l'armée qui prenait position mais seulement un groupe déterminé.
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