par Myriam Berber
Article publié le 16/01/2009 Dernière mise à jour le 16/01/2009 à 18:38 TU
Le Zimbabwe mettra prochainement un billet de 100 000 000 000 000 (cent mille milliards) de dollars pour contrer la pénurie d'argent liquide.
(Photo : DR)
Pour combattre la hausse vertigineuse des prix, la Banque centrale du Zimbabwe vient d’imprimer une nouvelle série de billets de banque de dix, vingt, cinquante et cent mille milliards de dollars zimbabwéens. Rien qu’en 2008, la Banque centrale a introduit une trentaine de nouvelles coupures. Des billets qui ont rapidement perdu toute valeur. La monnaie nationale s’effrite chaque jour un peu plus et les prix s’établissent pratiquement au hasard.
Selon les chiffres officiels, l’inflation aurait dépassé les 230 millions pour cent. Selon les chiffres officieux, elle dépasserait le milliard. Et les fréquentes dépréciations du dollar zimbabwéen n’ont pas changé la donne. L’économie est en chute libre depuis une dizaine d’années, en raison de politiques hasardeuses. Depuis la réforme agraire de l’an 2000 et la chasse aux fermiers blancs, la production agricole de l’ancien grenier d’Afrique australe s’est effondrée de 51%. Dans la foulée, les grandes manufactures qui en dépendaient (textile, agroalimentaire) ont fermé.
Une monnaie en perdition
Toutes les activités sont en berne, y compris le secteur de l’extraction minière. Le tourisme également en crise a perdu 50% de ses visiteurs au cours des trois dernières années et les investissements directs étrangers sont inexistants. Selon le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), il faudrait au Zimbabwe environ 5 milliards de dollars d’aide sur cinq ans pour reconstruire l’économie nationale.
Pour la population, la situation est devenue insoutenable. La grande majorité des échanges se font aujourd’hui en dollars américains ou en rands sud-africains. Pour contrôler le taux de change parallèle, la Banque centrale a plafonné le montant des retraits en liquide. Fin 2008, les retraits journaliers ont ainsi été limités à 500 000 dollars zimbabwéens par personne et un million de dollars pour les entreprises.
La nourriture remplace les salaires
Dans ce pays de 13,5 millions d’habitants où 40 % de la population dépend de l’aide alimentaire, cette « dollarisation » de l’économie a augmenté le coût de la vie. Un billet de 100 000 dollars zimbabwéens s’échangeait contre un dollar américain sur le marché noir, ce qui permet d’acheter un demi-pain seulement. Comme toutes les denrées de première nécessité coûtent trop cher ou manquent, de plus en plus de familles se nourrissent uniquement de fruits et de légumes sauvages. Les versements en nature ou le troc remplacent les échanges monétaires. Les employeurs, par exemple, payent leurs salariés en leur fournissant de la nourriture ou le ticket de transport en commun. Avec 80% de chômage parmi la population, le seul moyen de survie pour des milliers de Zimbabwéens est de franchir clandestinement la frontière pour immigrer en Afrique du sud.
En plus de cette situation économique catastrophique, le pays est confronté à une épidémie de choléra en raison de l’effondrement des systèmes de santé et d’assainissement des eaux usées. Plus de 40 000 personnes ont été touchées par la maladie et plus de 2 100 en sont mortes. Le gouvernement ne parvenant plus à financer les importations des composants nécessaires à la fabrication locale des anti-rétroviraux, le hiv tue également. Un tiers de la population est atteint du sida et un adulte sur cinq est séropositif. L’espérance de vie y est de 37 ans pour les hommes et de 34 ans pour les femmes.