Article publié le 16/10/2009 Dernière mise à jour le 16/10/2009 à 11:48 TU
Sur le front diplomatique, les mises en garde se multiplient. Le département d’Etat américain demande le départ de la junte au pouvoir à Conakry. Depuis le massacre du 28 septembre, les Etats-Unis ont pris une position très ferme contre le capitaine Moussa Dadis Camara. Trois ministres guinéens ont déja annoncé leur démission du gouvernement, auxquels s'est joint un conseiller à la présidence de la République. A Addis Abeba, le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine s'est réuni jeudi 15 octobre alors que la Cour pénale internationale s'empare du dossier.
Avec notre correspondante à Washington, Donaig Le Du
Le porte-parole du Département d’Etat n’a pas usé de précautions oratoires, en évoquant la situation politique en Guinée : « La junte actuelle conduite par le capitaine Dadis Camara doit quitter le pouvoir et ouvrir la porte à des élections libres » a déclaré Philip Crowley, en réclamant « qu’une enquête internationale permette de faire la lumière sur les massacres du 28 septembre. »
La semaine dernière, un haut responsable de la diplomatie américaine s’est même rendu à Conakry, où il a expliqué pendant deux heures au chef de la junte que les Etats-Unis le tenaient pour responsable des meurtres et des viols de la fin septembre. Le capitaine Camara, qui avait violemment réagi aux propos de Bernard Kouchner disant à peu près la même chose, s’est abstenu de commenter publiquement ces accusations.
Les Etats-Unis, qui n’ont traditionnellement qu’une influence limitée en Guinée Conakry, ont également entendu l’inquiétude de l’une de leurs plus solides alliées dans la région, la présidente du Libéria Ellen Johnson Sirleaf, qui craint évidemment l’effet de contagion que pourrait avoir une aggravation de la crise en Guinée.
Enfin, Washington n'apprécie que très modérément la position chinoise, qui consiste à signer des accords pétroliers et miniers avec un gouvernement considéré comme hors-la-loi par une bonne partie de la communauté internationale.
Côté Afrique, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine s’est réuni, hier, pour statuer sur la Guinée. L’organisation continentale réitère sa demande expresse à la junte de confirmer qu’aucun de ses membres, à commencer par son chef Moussa Daddis Camara, ne se présentera aux élections, sous peine de sanctions. L’ultimatum, lancé il y a bientôt un mois, va expirer samedi soir, à minuit. Mais le massacre commis à Conakry, le 28 septembre dernier, a complètement changé la donne.
« L'ultimatum de l'Union africaine à la junte expire samedi à minuit... »
La Cour pénale internationale ne lâche pas non plus sa pression sur la Guinée. la Cour va commencer à recueillir des informations a de déterminer si les crimes commis dans le pays relèvent ou non de sa compétence. L'examen préliminaire est l'étape préalable à l'ouverture d'une enquête. Les explications d'Aymeric Rogier, enquêteur de la CPI.
« Il ne s'agit pas d'une enquête, il s'agit de la phase préalable au cours de laquelle on recueille, on évalue, on analyse les informations, notamment pour déterminer si les abus qui ont été commis peuvent constituer des crimes de la compétence de CPI...»
Amnesty International s'inquiète elle du sort de dizaines de civils, mais aussi de militaires, qui ont été arrêtés ces derniers jours et depuis, tenus au secret. Amnesty redoute les tortures et appelle les autorités à mettre un terme aux exécutions extra-judiciaires. L'inquiétude de Salvator Sagues, enquêteur à Amnesty international.
« Des opposants continuent à être recherchés, des gens continuent à être abattus, rafles également dans les casernes où des militaires ont été arrêtés... il y a péril en la demeure... il faut absolument se mobiliser... les pires rumeurs circulent à Conakry... »
Démission en rafale au sein du gouvernement guinéen |
Pour la troisième fois en quelques jours, un ministre quitte l'équipe du capitaine Dadis Camara pour protester contre le massacre du 28 septembre. Des militaires avaient ouvert le feu sur une manifestation d'opposants dans un stade de Conakry, provoquant la mort de 56 personnes selon les autorités, et 157 selon l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'homme. Jeudi 15 octobre, Justin Morel, le ministre guinéen de l'Information et de la Culture et porte-parole du gouvernement, a donné sa démission. Il affirme « ne plus avoir la force morale de porter la parole du gouvernement après les évènements du 28 septembre ». Quelques heures plus tard, on apprenait également la démission d'Abdoulaye Condé, le conseiller en Communication de la présidence guinéenne. Dans une lettre adressée au « président de la République », Abdoulaye Condé explique les raisons qui l’ont contraint à « rendre le tablier ». « En acceptant ma nomination, j’étais heureux de contribuer à vos côtés à la réalisation de certaines valeurs réitérées dans vos discours : l’instauration d’un Etat de droit, la promotion et la défense de la démocratie, des libertés et des droits humains... ». Mais les événements du 28 septembre l’ont poussé à se démettre de sa fonction. Il pointe l’entourage de Dadis Camara, qu’il qualifie de « personnes sans statut, animés par des intérêts mesquins et égoïstes ». Mais précédant ces annonces, dans la matinée du 15 octobre, le ministre de la Fonction publique, Alpha Diallo, nommé en janvier par la junte au pouvoir, avait lui aussi démissionné en indiquant qu’il ne « pouvait pas cautionner » la répression sanglante du 28 septembre. Le 12 octobre déjà, Abdourahmane Sanoh, ministre de l’Agriculture, avait jeté l’éponge. RFI |
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