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07/11/2003
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Diabète (1) : l’autre fardeau de l’Afrique
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(MFI) Longtemps considéré comme une maladie de pays pléthoriques, le diabète est devenu en quelques années un problème de santé publique en Afrique. Il se développe en effet à une vitesse inquiétante, particulièrement parmi les populations urbaines qui s’occidentalisent et ont tendance à prendre du poids du fait d’un manque d’exercice et d’un changement d’alimentation.
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Le Sénégal, qui recense 2 000 cas par an, n’échappe pas à une progression inquiétante de la maladie, indique le Pr Saïd Nourou Diop, directeur du Centre diabétique de Dakar. Mauvaises habitudes alimentaires, pauvreté, tabous alimentaires et analphabétisme sont selon ce spécialiste les principaux freins à une information correcte sur les risques du diabète ou simplement sur la façon de le dépister. Au Mali, même son de cloche. A Bamako, le diabète est un problème de santé publique (il constitue selon les médecins la deuxième cause d’hospitalisation après le VIH) et représente plus de 95 % des consultations en médecine interne.
La fréquence du diabète en Afrique est évaluée entre 1 et 6 % de la population sub-saharienne (en Europe, 3 %) et de 6 à 10 % en Afrique du Sud ; on estime à environ 5 millions le nombre de diabétiques sur le continent. Mais ces chiffres demeurent des estimations tant le dépistage et le suivi sont rares. Faute de dépistage, la maladie peut évoluer sans symptôme ; les malades ne s’alertent souvent que lorsque surviennent les premières complications, 10 ou 15 ans plus tard. Les diagnostics en Afrique sont donc fréquemment tardifs et les complications très répandues. A ce niveau de développement de la maladie, la prise en charge coûte évidemment très cher au malade, à sa famille et au système de santé.
300 millions de malades en 2025
Le nombre de diabétiques dans le monde était de 30 millions en 1985 et l’OMS prévoit qu’ils seront 300 millions en 2025 alors qu’on en dénombre actuellement autour de 150 millions. Les épidémiologistes parlent d’une « épidémie de diabète » qui devrait surtout toucher les pays en développement. Il est frappant de constater que la maladie atteint surtout des populations qui ont été sujettes pendant des siècles, voire des millénaires, à des difficultés d’alimentation.
Parmi ces populations, celles qui résistaient le mieux aux périodes de disette ont été touchées de plein fouet. Il s’agit essentiellement d’individus qui avaient la capacité de stocker des réserves énergétiques pour faire face aux épisodes de disette. Leurs gènes se sont ainsi adaptés au fil des siècles pour leur permettre de survivre, mais ce qui était un avantage certain en temps d’insécurité d’approvisionnement est aujourd’hui devenu un handicap. Les conditions d’alimentation actuelles se sont installées en à peine quelques décennies, un temps nettement insuffisant pour que les gènes de ces individus s’adaptent à l’abondance d’aliments accessibles. Ces modifications extrêmement rapides de l’environnement conduisent nombre de ces individus vers l’obésité et le diabète.
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Claire Viognier
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