(MFI) Toutes les enquêtes les plus récentes montrent que l’expérimentation du cannabis (en consommer au moins une fois) est en augmentation chez les jeunes depuis une dizaine d’années. L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a réuni un groupe d’experts pour évaluer les effets du cannabis sur les comportements et la santé. Cette étude avait pour objectif d’évaluer le niveau de consommation : une difficulté à contourner car le produit est illicite dans la plupart des pays. Elle visait aussi à documenter précisément les effets repérables du cannabis sur la santé. Elle devrait enfin permettre d’adapter les messages d’information et de prévention aux dangers réels ou supposés du cannabis.1. Cannabis, marijuana, haschich, quelle différence ?
Cannabis sativa indica (chanvre indien) est le nom de la plante dont les feuilles, les tiges et les sommités fleuries sont séchées et fumées mélangées, le plus souvent, à du tabac : c’est ce qu’on appelle l’herbe ou marijuana et c’est le mode de consommation le plus répandu en Europe.
Le haschich est une résine obtenue à partir des sommités fleuries de la plante. Il se présente sous forme de plaques compressées, de barrettes de couleur brune, jaune ou verte ; il se fume généralement mélangé à du tabac. Il peut être coupé avec des produits plus ou moins toxiques comme des colorants, de la paraffine, des excréments d’animaux, de l’huile de vidange...
2. Que recherche-t-on en consommant ces produits ?
La consommation de cannabis procure une légère euphorie, une somnolence et une sensation de bien-être. Cet ensemble de signes caractérise l’ivresse cannabique qui dure en moyenne de 2 à 10 heures suivant la dose consommée et la sensibilité individuelle. L’ivresse s’accompagne d’une détérioration de la perception temporelle et d’une incapacité à accomplir certaines tâches complexes.
Les effets du cannabis sur l’organisme sont principalement dus au delta9-tétrahydrocannabinol (D9-THC). Ce composant se distribue rapidement dans tous les tissus riches en lipides, principalement le cerveau.
3. Le cannabis est-il compatible avec la conduite automobile ?
Certains effets apparaissant dans les heures suivant la prise de cannabis sont incompatibles avec la conduite automobile : temps de réaction allongé, capacité amoindrie de contrôle de trajectoire, mauvaise appréciation du temps et de l’espace, ainsi que des réponses perturbées en situation d’urgence. Pour les mêmes raisons, la prise de cannabis semble difficilement conciliable avec le travail à certains postes, susceptibles de mettre en péril la sécurité d’autrui.
4. Y a-t-il un risque de dépendance au cannabis ?
Si on compare le cannabis aux autres produits psychoactifs, le lien de dépendance induit par le cannabis est le plus faible. Il est ainsi bien moindre que pour le tabac (40 % contre 87 %). Dans deux cas sur trois, remarquent les experts de l’Inserm, la dépendance au cannabis est modérée ou faible et essentiellement psychique.
Mais quand cette dépendance existe (chez près de 10 % des consommateurs), elle est deux fois plus importante chez les 15-24 ans que dans les autres tranches d’âge. Les taux de dépendance les plus élevés se retrouvent, quels que soit l’âge et le sexe, pour des consommations quotidiennes ou presque quotidiennes.
5. Le cannabis peut-il être à l’origine de maladies ?
Les experts de l’Inserm le soupçonnent de favoriser certains cancers comme celui des bronches, de la bouche, du pharynx, de l’œsophage et du larynx. Cette augmentation du risque s’explique par le mode de consommation du cannabis qui est le plus souvent associé au tabac ou fumé pur sous forme de marijuana.
Une cigarette de cannabis contient 50 mg de goudrons alors qu’une cigarette de tabac en contient 12 mg. De plus, la concentration en produits cancérigènes de ces goudrons particuliers est également plus importante. Par ailleurs, le D9-THC contenu dans le chanvre indien, a des effets broncho-dilatateurs qui pourraient favoriser la rétention de goudrons au niveau de la bouche, du pharynx, de l’œsophage et du larynx.
6. Une consommation fréquente peut-elle détruire les neurones ?
La neurotoxicité mise en évidence est fonctionnelle et réversible : si des fonctions cérébrales sont atteintes (comme la mémoire), les cellules cérébrales (neurones) ne sont pas touchées.
Des troubles de la mémoire, des facultés d’apprentissage et une démotivation, souvent observés chez les consommateurs réguliers, ont évidemment un retentissement sur le travail scolaire et l’adaptation sociale. Il s’agit là, pour les experts, de l’altération la plus problématique car la plus fréquemment rencontrée, liée à la prise répétée de cannabis.
7. Le cannabis peut-il déclencher une maladie mentale ?
Certains troubles mentaux peuvent être révélés ou aggravés par la consommation de cannabis. Cela a été démontré chez des malades schizophrènes hospitalisés chez lesquels on retrouve 36 % de sujets qui ont été ou sont dépendants au cannabis.
Cette association se ferait d’abord parce que le malade utiliserait le cannabis pour soulager les premiers troubles liés à sa maladie, comme l’anxiété. Mais rien n’exclut, non plus, que la consommation du chanvre ne soit à l’origine des troubles en révélant la vulnérabilité mentale du fumeur. Pour les experts, d’autres études sont nécessaires pour préciser le lien entre maladie mentale et cannabis.
Claire Viognier