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07/11/2002
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Méningite : sous la menace d’une nouvelle souche
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(MFI) Chaque année, la méningite est à l’origine du décès de 25 000 personnes en Afrique. On connaissait quatre variétés (A,B,C et Y) mais l’émergence cette année au Burkina Faso d’une nouvelle souche appelée W 135 rend encore plus urgentes les mesures destinées à prévenir une épidémie. Cette souche provient probablement d’Arabie saoudite et a été transmise à la population du Burkina Faso par les pèlerins qui s’étaient rendus à la Mecque.
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Le risque actuel est que la nouvelle souche ne se propage aux pays voisins lors de la prochaine saison épidémique. La menace est bien réelle selon Médecins sans Frontières (MSF) et l’Institut Pasteur, ce d’autant plus que les vaccins traditionnellement utilisés (contre les souches A et C) lors des flambées sont inefficaces contre la souche W 135. Il existe bien deux vaccins (GlaxoSmithKline et Aventis-Pasteur) qui protègent contre les trois souches, mais le prix en est vingt fois supérieur au vaccin limité aux souches A et C. Non seulement son prix normal de 5 dollars par dose le met hors de portée des gouvernements africains mais en plus, il est loin d’être disponible en quantité suffisante pour faire face à un contexte épidémique.
Selon l’OMS, des négociations avec les principaux fabricants visant à accroître la production et à ramener le prix à un niveau abordable (1 dollar maximum) pour les pays africains seraient en bonne voie. A part la vaccination, la stratégie de l’OMS est également fondée sur une amélioration de la surveillance qui est essentielle pour reconnaître rapidement les flambées et réagir. Cette politique est de plus en plus souvent dénoncée par des spécialistes comme Jean-Philippe Chippaux de l’Ird (Institut de recherche pour le développement), qui lui reproche d’attendre en quelque sorte que l’incendie commence pour prendre les mesures appropriées.
Le vaccin, rappelle-t-il, étant un outil préventif plutôt que curatif, deux à trois semaines sont nécessaires pour que les anticorps exercent leur fonction de défense. Or, il faut de deux à huit semaines pour mettre en place les mesures de contrôle de l’épidémie. Un laps de temps suffisant pour que de nombreux cas surviennent avant que la vaccination ne produise ses effets protecteurs. Hélas, l’idée d’une vaccination préventive bute sur les irrégularités du financement, plus aisé à trouver en période d’épidémie qu’en prévention. Pour sa part, l’OMS estime que les campagnes d’immunisation de masse, telle qu’elles sont menées actuellement en réponse aux épidémies en Afrique, permettent de prévenir jusqu’à 70 % des cas.
Toujours est-il que, cette année encore, on devra agir dans l’urgence. Les fabricants de vaccins, immanquablement confrontés à une demande mal maîtrisée mais toujours pressante, devront coûte que coûte fournir, selon MSF, entre 20 et 50 millions de doses dans les cinq prochaines années et selon l’OMS, de 2 à 5 millions de doses dans un avenir immédiat. Aux personnes qui ont malgré tout contracté la maladie, on administre en Afrique du chloramphénicol en suspension huileuse, un antibiotique dont la production est aussi insuffisante. Cependant, un traitement utilisant la ceftriaxone en dose unique s’est révélé prometteur par son efficacité supérieure et sa plus grande facilité d’utilisation. Une fois terminée la phase d’essais en cours, il remplacera probablement le traitement existant. En attendant, des sociétés commerciales développent un vaccin tétravalent dit conjugué ; cette nouvelle génération de vaccins permet d’immuniser les sujets plus longtemps et réduit le nombre de porteurs asymptomatiques de la bactérie dans la population. Ces vaccins permettraient donc de prévenir à long terme les épidémies massives mais, pour le moment, aucun engagement n’a été pris par les compagnies pour couvrir le marché des pays en développement à un prix abordable.
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Claire Viognier
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