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06/02/2003
L’onchocercose enfin terrassée

(MFI) C’est un communiqué de victoire que vient de publier l’OMS. Victoire remportée de haute lutte contre l’onchocercose, cette maladie aussi appelée « cécité des rivières » parce qu’elle rendait aveugle ses victimes dans sa manifestation la plus extrême. Il aura donc fallu trente ans et l’alliance de tous pour que plus de 110 millions d’habitants d’Afrique de l’Ouest soient enfin débarrassés de cette menace.

Le Programme de lutte contre l’onchocercose en Afrique de l’Ouest (OCP) a été mis en place en 1974. Pour mesurer l’impact des actions entreprises alors, il faut se rappeler que dans les régions les plus touchées, on recensait jusqu’à 10 % d’aveugles et 30 % de personnes avec de lourds handicaps visuels. Pendant des siècles, les populations vivant le long des cours d’eau vive, justement là où les terres étaient les plus fertiles, avaient été contaminées. Reconnaissant que ce mal s’associait à la proximité de l’eau, les agriculteurs commencèrent à déserter leurs terres. Lors du lancement de l’OCP, une enquête avait établi que 250 000 km² de terres productives le long d’un fleuve avaient été abandonnées, entraînant une perte économique de 30 millions de dollars US chaque année.
L’onchocercose est provoquée par un ver parasite, une filaire transmise par un moucheron de la famille des simulies qui se développe dans les eaux de rivières à courant rapide. La maladie provoque chez l’homme des lésions oculaires pouvant aller jusqu’à la cécité et des troubles cutanés occasionnant un prurit (démangeaisons) intense. Au total, 18 millions de personnes étaient infestées par le parasite et présentaient des lésions cutanées ; six millions et demi de personnes souffraient de démangeaisons invalidantes ou d’une dermatite et 270 000 ont perdu la vue.
Lors du lancement de la campagne, il s’agissait avant tout d’interrompre le cycle de transmission par des épandages aériens d’insecticides biodégradables dans les rivières à fort courant de 11 pays d’Afrique de l’Ouest. La pulvérisation aérienne de larvicides a permis semaine après semaine de couvrir une surface de 1,3 million de km2, comptant 30 millions d’habitants. Un réseau de 50 000 km de cours d’eau a été traité par hélicoptère pendant qu’au sol, des équipes de bénévoles piégeant les mouches et activaient des réseaux de surveillance des parasites dans leur région.

Une coalition de 22 pays

En 1988, le programme a pu disposer d’une nouvelle arme, l’Ivermectine un antiparasitaire fourni gracieusement par les laboratoires Merck. La distribution de ce médicament, assurée d’abord par des bénévoles puis par les communautés elles-mêmes, a permis de traiter des millions de malades. Le financement de toutes ces opérations, se félicite l’OMS, a été rendu possible grâce à l’appui fidèle de la Banque mondiale, du Pnud, de la Fao, ainsi que d’une coalition de 22 pays et d’un ensemble d’organismes donateurs.
L’Institut de recherche pour le développement (IRD, France), sur le terrain depuis les années 50, a fourni une expertise essentielle dans le recueil de données. Ces travaux ont permis entre autre d’établir les principes stratégiques et les modalités de lutte qui allaient se révéler décisifs contre le vecteur de la maladie, la simulie.
L’OCP a atteint son but : l’onchocercose a été pratiquement éliminée de la zone couverte et elle n’est plus ni un problème de santé publique, ni un obstacle au développement économique et social. Il a permis surtout d’éviter 600 000 cas de cécité et 18 millions d’enfants nés pendant cette période ont pu grandir sans craindre la cécité des rivières. Des milliers d’agriculteurs sont en train de revenir sur les 25 millions d’hectares de terres fertiles abandonnées le long des cours d’eau, qui pourront nourrir 17 millions de personnes.
« La réussite de ce programme, a déclaré le Dr Gro Harlem Brundtland (directrice générale de l’OMS), permet à tous ceux qui travaillent dans le secteur de la santé publique de faire des rêves grandioses : nous pouvons soulager des millions de personnes parmi les plus pauvres du monde. »

Claire Viognier

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