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17/04/2003
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La pub rend-elle obèse ?
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(MFI) Pour de nombreux acteurs de santé publique, la publicité télévisée pour des produits alimentaires serait susceptible d’induire des comportements alimentaires déséquilibrés chez les enfants, en particulier ceux issus de milieux modestes. L’obésité, en progression constante chez les enfants, en serait une conséquence.
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Une étude récente a essayé de comprendre par quels moyens la publicité influence les choix alimentaires des enfants de 6 à 12 ans issus de milieux sociaux défavorisés et quelles en sont les conséquences. Pour l’auteur, il est toutefois important de garder à l’esprit que tenter d’isoler le seul facteur « publicité télévisée » sur le comportement alimentaire des enfants serait utopique.
Publicité télévisée : conditionner l’enfant–consommateur
Pour la psychosociologue Marie Watiez, la genèse des conduites alimentaires est le résultat d’un processus de socialisation complexe selon lequel l’enfant va apprendre et développer des goûts, des savoirs, des opinions, des représentations et des comportements relatifs à la nourriture. La publicité, vue et vécue comme une distraction, un divertissement, un univers parfait, créateur de lien social en renforce la position dominante : plusieurs études montrent que la plupart des enfants aiment la publicité.
Tout est mis en œuvre pour provoquer un désir d’achat
Au cours de ces dernières décennies, l’évolution des mœurs et les bouleversements démographiques ont conduit à valoriser le rôle de l’enfant au sein de la famille et dans les décisions d’achat. Des études montrent que la participation de l’enfant au processus de décision de la famille se révèle d’une manière générale assez déterminante. La prise en compte de l’avis de l’enfant est particulièrement importante lorsque les produits le concernent directement.
De fait, tout est mis en œuvre pour provoquer un désir d’achat : la publicité propose un modèle de consommation immédiate et repose essentiellement sur l’image, le symbole. Elle renforcerait donc un état de non-responsabilité, en induisant l’idée qu’on peut acheter ce que l’on veut, quand on le veut. Les personnes les plus précarisées seraient les plus atteintes par ces publicités, non parce qu’elles n’arrivent pas à les décrypter, mais parce que la publicité leur offre justement ce qu’elles recherchent pour exister au sein de la société. De faibles revenus n’encourageant pas, par ailleurs, l’apprentissage de la gestion budgétaire.
Ni pain, ni fruits dans les publicités pour enfants !
Près de 70 % des publicités pour enfants ne ciblent en fait que certains types de produits : produits sucrés, céréales et bonbons. Or l’attirance pour la saveur sucrée est une caractéristique biologique de l’espèce humaine. Ces produits ne peuvent que plaire aux enfants. Et on peut remarquer que la publicité ne cible jamais d’autres aliments comme le pain, les fruits, les légumes. Or, les enfants constituent la clientèle de demain et les attitudes et motivations acquises pendant l’enfance déterminent en grande partie leurs actes de consommation et leurs comportements alimentaires futurs. Ne peut-on voir ici un impact à long terme de la publicité sur les comportements ?
La publicité crée aussi des frustrations
Les réponses des enfants mettent clairement en évidence que les produits de marque vantés par une publicité télévisée sont plus connus et procurent davantage l’envie d’acheter que les autres, quel que soit le produit (céréales, goûters, sodas et bonbons). Par ailleurs, les enfants qui, probablement pour raisons financières, achètent des produits sans marque n’ont pas envie de les acheter. Ils préféreraient acheter le produit de marque.
Lorsque l’enfant est encore sous le contrôle de ses parents, on peut imaginer que cette frustration est contrôlable. En revanche, à l’adolescence, cette frustration pourrait ne pas se révéler sans conséquence. Dans une étude sur la délinquance autodéclarée des jeunes de 13 à 19 ans, on peut lire : « Le vol dans un magasin est un acte assez répandu, et évalué par beaucoup de jeunes comme anodin », ce qui suggère que certains adolescents glissent facilement vers l’idée d’un droit à l’avoir de certains objets.
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CERIN
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