|
|
Japon
 |
Bonjour le monde !
|
Le Mondial 2002 fera pour le Japon l'effet d'un appel d'air frais.
|
Pendant un mois, le Japon va quitter sa coquille insulaire et
devenir le centre de toutes les attentions. Au-delà de l'aspect sportif, la Coupe du Monde, avec ses 400 000 visiteurs attendus, va ouvrir l'archipel sur l'étranger. Car le Mondial c'est 32 équipes, mais aussi autant de nationalités, de langues, et encore plus de rencontres.
De notre correspondante à Tokyo
Dans l'histoire mouvementée du Japon, il y a eu la révolution Meiji à la fin du XIXe siècle, la constitution pacifiste de 1946, dictée par les Américains, et peut-être faudra t-il parler bientôt de la Coupe du monde 2002... Car le grand rendez-vous de football qui va embraser les deux pays organisateurs, le Japon et son voisin la Corée du Sud, du 31 mai au 30 juin, s'annonce comme une fête sportive, mais pas seulement.
On sait bien que cette dix-septième édition du Mondial est déjà celle de tous les records : pour la première fois en Asie, pour la première fois co-organisée, et qui plus est par deux pays séparés par un bras de mer et par des pages d'histoire faite de guerre et de colonisation, pour la première fois si chère (5 milliards d'euros, soit trois fois plus qu'en France en 1998, ont été dépensés par les deux pays hôtes), et enfin, et même s'il y a eu le précédent américain, le tout dans deux pays où le football professionnel est jeune comme un enfant.
Au-delà de ce chapelet d'exploits, le Mondial 2002 fera pour le Japon l'effet d'un appel d'air frais, une sorte de grande bourrasque venue du large, qui balaiera le confort et les certitudes de cet archipel insulaire et de ses 128 millions d'habitants. A cet égard, quel que soit le parcours de la sélection nipponne, patronnée par Philippe Troussier, où celui qui portait en Afrique le surnom de Sorcier Blanc, la Coupe du monde est d'ores et déjà «gagnée» pour les Japonais. Depuis que l'ancien coach des Super Eagles nigérians ou des Bafana Bafana sud-africains a pris en main la destinée des Bleus du Japon, en septembre 1998, les joueurs de l'archipel ont acquis une grande expérience internationale.
Troussier a concocté un programme de préparation qui comprenait deux tournées européennes, une Copa America en Amérique latine, un stage au Burkina Faso, et une multitude de compétition internationale de haut niveau. Les résultats ne se sont pas fait attendre : vice-champion du monde espoirs au Nigeria en 1999, quart de finaliste aux JO de Sydney en 2000; champion d'Asie dans la foulée la même année, et finaliste de la Coupe des Confédérations chez eux, en 2001. Il y a eu des échecs aussi, comme cette retentissante défaite contre la France (0-5), au printemps 2001. Mais au final, «les joueurs sont sortis de leur cocon, en se confrontant aux équipes du Top 20, raconte Troussier. C'était la seule façon pour aborder le Mondial sans complexe». La confrontation avec des adversaires venus des quatre coins de la planète, relayée comme une saga par les médias et notamment les puissantes télévisions du pays, a commencé à fasciner les Japonais, rivés à leur poste ou venus en masse au stade.
La fierté des Japonais
C'est ainsi que les gens ont pu découvrir les rues enfiévrées de Lagos, le calme du centre d'entraînement des Bleus à Clairefontaine, ou l'hostilité des supporters à Beyrouth. Au fil des matches, les Japonais se sont pris de passion pour leur équipe, et un sentiment d'attachement, voir d'identification est né. Les habitants du pays du Soleil Levant se sont mis à être fiers de leurs footballeurs, et finalement d'être tout simplement, et bien... Japonais ! Cette fierté est en soi un événement pour un peuple, entouré de mers, privés de voisins direct, et, qui d'une manière générale, n'a jamais brillé, judo excepté, dans les compétitions internationales. Ce changement de mentalité a toutes les chances d'être encouragé par la Coupe du monde.
Sur le terrain, face à leurs adversaires du groupe H, Belges, Russes, et Tunisiens, les supporteurs comme les joueurs vont vibrer pour l'amour du maillot. A l'extérieur aussi, le peuple japonais va multiplier les rencontres avec les 400 000 visiteurs étrangers attendus. Quelque 16 000 volontaires sont à pied d'œuvre pour faciliter leur quotidien dans les déplacements ou le logement. Et il a bien fallu des Japonais qui parlent le slovène, le croate ou le suédois... Dans les hôtels, l'anglais est devenu un outil de communication indispensable. «La Coupe du monde a convaincu les Japonais de la nécessité de parler l'anglais, raconte Isokazu Tanaka, représentant à l'office du tourisme du Japon (JNTO). Certains ont eu du mal à l'admettre, mais pour la majorité c'est l'occasion de travailler avec une clientèle étrangère.» Dans les gares et les aéroports, dans le métro, les banques, et même les taxis, des messages en anglais ont été rajouté aux traditionnels idéogrammes chinois et japonais.
Cette nécessaire ouverture au monde à aussi atteint les rives du premier des voisins du Japon, la Corée du Sud. Les relations n'ont jamais été facile avec le pays du Matin Calme, et les plaies de trente années de colonisation n'ont pas encore été complètement cicatrisées. Mais cette Coupe du monde conjointe, même si elle n'avait pas été initialement voulue par les deux candidats, a poussé les deux pays à mieux se comprendre. Des membres de la famille impériale ainsi que le premier ministre du Japon assistent au match et à la cérémonie d'ouverture à Séoul. Le réchauffement diplomatique a gagné les habitants du Japon, qui, selon un sondage, sont 51% a juger «bénéfique» le Mondial pour les relations nippo-coréennes. Autant de petits pas en avant qui devraient permettre au Japon de ne plus se sentir confiner à la périphérie du globe, ou comme le disait si bien l'écrivain Roland Barthes, de ne plus être la «crevette accroché aux flancs de l'Asie».
|
Virginie LANGEROCK
31/05/2002
|
|
|
|
|
|
France
rfimusique