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Insécurité

Guerre des bandes à La Défense

La bataille rangée qui s'est déroulée samedi 27 janvier entre deux bandes rivales dans le quartier de commerce et d'affaires de La Défense, à la périphérie de Paris, a relancé le débat national autour de l'enjeu de la sécurité. Mais cet événement est aussi un révélateur d'une forme de violence où les jeunes de banlieues sont embrigadés de plus en plus tôt.
Les commerçants et les badauds qui se promenaient ce samedi, a priori ordinaire, au centre commercial des Quatre Temps à La Défense, n'en sont pas encore revenus. Ils ont été les spectateurs d'un affrontement particulièrement violent qui a opposé environ trois cents jeunes issus de bandes rivales de Chanteloup-les-Vignes et Mantes-la-Jolie, deux villes de la grande banlieue parisienne. En plein après-midi, des jeunes échauffés par plusieurs incidents qui les avaient opposés la semaine précédente, avaient rendez-vous pour régler leur compte sur un terrain neutre, mais très symbolique, aux portes d'une capitale à laquelle ils n'ont pas accès.

La bagarre était prévue et annoncée. Les réseaux d'indicateurs dans les deux villes concernées avaient fonctionné pour alerter les autorités. La police était prévenue des intentions des jeunes. Elle n'a pas pu les empêcher de mettre leur projet à exécution et de régler leur compte au milieu des promeneurs du week-end. Car c'est bien de cela qu'il s'agissait et non de vandalisme ou de vol dans les magasins tout proches. Les protagonistes étaient armés -matraques, battes de base-ball, poings américains, couteaux, marteaux, et hachettes ont été retrouvés sur les lieux- et voulaient en découdre.

Qui fait partie des bandes ?

Le phénomène des bandes n'est pas nouveau. Des blousons noirs aux zoulous, les regroupements de jeunes engagés dans la délinquance ont toujours existé. Ce qui change, ce sont les critères de ralliement. Aujourd'hui, l'appartenance à un groupe se fait plutôt en fonction du territoire que de la nationalité d'origine. Les jeunes d'un quartier qu'ils soient Français, Maghrébins, Africains font partie de la même bande et sont en concurrence avec ceux du quartier ou de la ville d'à côté. C'est ce qui s'est produit à la Défense entre la bande de la Noé à Chanteloup-les-Vignes et celle du Val Fourré à Mantes-la-Jolie.

Très organisées, ces bandes recrutent de plus en plus d'adolescents de moins de 15 ans qui s'initient ainsi à la délinquance au quotidien sous la direction de leurs aînés qui organisent des trafics. D'ailleurs, les lycées sont de plus en plus touchés par les règlements de compte entre jeunes de cités. Ainsi, l'un des incidents qui avaient précédé l'affrontement de samedi avait eu lieu à l'occasion d'une rencontre interscolaire. Si la bataille de la Défense a été particulièrement spectaculaire et médiatisée parce qu'elle a eu lieu au milieu de la foule des Parisiens, les rixes sont très courantes dans les cités de banlieues. Le moindre accrochage, la moindre rivalité se traduit par un règlement de compte plus ou moins violent à la sortie du lycée, sur le quai du RER ou ailleurs.

La perspective des élections municipales au printemps 2001 rend le débat autour de la sécurité encore plus d'actualité puisque ce thème représente la priorité des priorités pour les Français (selon un sondage Ipsos/ Le Monde). Le président de la République et le premier ministre l'ont bien compris, eux qui ne cessent depuis quelques jours d'essayer de prendre l'initiative sur cette question.

Reste à savoir comment résoudre ce problème et à faire le bilan des mesures engagées dans les quelque deux cents quartiers à risques français aujourd'hui répertoriés, où, parfois, les policiers n'osent plus mettre les pieds. Il faut aussi envisager les problèmes de la prévention d'agissements de ce type et de la sanction des protagonistes qui sont de plus en plus souvent mineurs. Sur la trentaine de jeunes interpellés, un seul a été déféré devant le parquet. Ce qui a fait dire à Jacques Kossowski, député-maire RPR de Courbevoie, ville limitrophe de la Défense : « Ce résultat donne le sentiment d'une totale impunité ».



par Valérie  Gas

Article publié le 30/01/2001