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Serbie

Milosevic dans le collimateur de la justice serbe

Après l'arrestation de l'ancien chef de la police secrète serbe, c'est Slobodan Milosevic qui semble être l'une des prochaines personnalités visées par la justice de Belgrade.
De notre correspondant à Belgrade

«A qui le tour?» La question paraissait, lundi, à la une du quotidien populaire belgradois Blic, après l'arrestation de l'ancien chef de la police secrète Rade Markovic. Un autre journal à fort tirage, le quotidien Gnas Javnosti, titrait pour sa part: «On attend l'arrestation de Milosevic». Selon la presse britannique, la cellule destinée à accueillir l'ancien président serait déjà prête.

Plutôt que de se livrer au jeu des rumeurs et des spéculations, la presse serbe constate que les arrestations se multiplient. Trois généraux de la police se sont ainsi retrouvés ce week-end, comme Rade Markovic, derrière les barreaux. Tous sont entendus pour certaines des affaires criminelles qui ont défrayé la chronique au cours des derniers mois de pouvoir de Slobodan Milosevic, comme l'attentat contre le dirigeant d'opposition Vuk Draskovic, en mai 2000, mais aussi la disparition, toujours inexpliquée, de l'ancien président de la République de Serbie Ivan Stanbolic, qui n'a plus été vu depuis la fin du mois d'août dernier.

Milosevic inculpé pour faux et usage de faux ?


Or, les dirigeants de la nouvelle majorité serbe sont unanimes à reconnaître que ces enquêtes devraient remonter jusqu'aux plus hauts responsables politiques, à commencer par Slobodan Milosevic lui-même. Si l'ancien homme fort de Belgrade devait être arrêté, ce serait toutefois uniquement pour détournement de fonds et malversations fiscales. Slobodan Milosevic aurait ainsi obtenu à bas prix sa villa du quartier très huppé de Dedinje, en 1999, en omettant de déclarer ses véritables revenus à l'administration.

Le parquet de Belgrade s'apprête à inculper l'ancien président yougoslave Slobodan Milosevic, a indiqué une source haut placée au sein de la coalition DOS au pouvoir. Slobodan Milosevic pourrait être inculpé de faux et usage de faux, risquant jusqu'à trois années de prison. De passage en Slovaquie, le président Kostunica a fermement dénoncé les risques d'une justice «révolutionnaire», en expliquant que le dossier Milosevic était du seul ressort de la justice. De nombreux responsables politiques serbes expliquent toutefois, en substance, que «l'essentiel est d'arrêter Milosevic, peu importe le motif. Ensuite, l'instruction permettra, peu à peu de faire la lumière sur le système de pouvoir construit par l'ancien président».

Il n'est toujours pas question, cependant, de livrer Slobodan Milosevic au Tribunal pénal international de La Haye (TPI), et le ministre serbe de la Justice, Goran Batic, a même catégoriquement exclu que des enquêteurs de cette Cour puissent entendre Rade Markovic, ne serait-ce qu'à titre de témoin. A Belgrade, peu de gens croient vraiment à la possibilité d'une arrestation rapide de Slobodan Milosevic. Quant au gouvernement, il est convaincu d'avoir le soutien de la majorité de l'opinion, en soutenant que Milosevic doit être jugé en Serbie et non aux Pays-Bas. Un chauffeur de taxi conclut cependant «qu'ils le jugent, ici ou à La Haye, mais cela ne rendra pas à la Serbie les quinze années perdues».



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 27/02/2001