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Serbie

Les fidèles de Milosevic toujours en place

L'arrestation de Slobodan Milosevic met un terme à la carrière de l'ancien numéro un yougoslave. Mais ses fidèles, malgré la défaite électorale de l'automne dernier, occupent toujours des postes-clefs.
De notre correspondant dans les Balkans

Alors que les charges se multiplient contre l'ancien homme fort de Belgrade, certains de ses fidèles détiennent toujours des positions privilégiées au sein du système de pouvoir serbo-yougoslave, au premier chef, Milan Milutinovic, lui aussi inculpé par le TPI. Milan Milutinovic occupe ainsi la charge de Président fédéral yougoslave, même si son rôle politique se réduit presque à néant depuis les changements démocratiques intervenus en Serbie. Son mandat arrive à échéance à l'automne 2002, et les élections qui devront être organisées pourraient donner lieu aux premières fractures politiques ouvertes au sein de la nouvelle coalition majoritaire.

Autre personnalité inculpée par le TPI, le général Dragolub Ojdanic, qui commandait l'armée yougoslave durant la guerre du Kosovo, et qui a été mis a la retraite par le président Kostunica. Le général Ojdanic a déclaré qu'il préférerait ôse rendre à La Haye en héros plutôt que d'être jugé dans le pays pour haute trahisonö.

Anciens dirigeants de premier plan du Parti socialiste de Serbie (SPS), les députés Nikola Sainovic et Vlajko Stojiljkovic, ancien ministre de l'Intérieur, siègent toujours au Parlement fédéral yougoslave. Nul doute que le TPI saura exiger que ces inculpés soient déférés devant lui, mais encore faudrait-il que la Yougoslavie définisse le cadre de sa coopération avec la juridiction internationale.

Les «malentendus» sont dissipés

La communauté internationale va-t-elle se contenter pour le moment du pas symbolique important accompli avec l'arrestation de Slobodan Milosevic, ou va-t-elle multiplier les pressions pour qu'il soit rapidement déféré devant le TPI, exigeant dans la foulée que les autres inculpés lui soient livrés ? La position de Belgrade est en tout cas bien meilleure, maintenant que Milosevic est sous les verrous, pour obtenir des délais supplémentaires.

De même, la crise qui couvait entre le Président fédéral yougoslave Kostunica et le Premier ministre de Serbie, Zoran Djindjic, réputé plus ouvert à la collaboration avec le TPI, semble également évitée. Le ministre serbe de l'Intérieur, Dusan Mihajlovic, visiblement soulagé de l'issue pacifique de l'opération de la police, a affirmé que "les malentendus" surgis entre l'armée et la police auraient été dissipés.

Les principaux acteurs de la scène politique yougoslave peuvent être répartis en trois grands blocs. Tandis que les ôréalistesö, qui se réclament du Premier ministre Djindjic, estiment que la reconstruction de l'économie du pays ne peut pas se passer des aides financières internationales, et qu'il faut donc accepter de répondre rapidement a toutes les exigences du TPI, les proches du Président Kostunica tiennent au strict respect des lois yougoslaves. Pour ceux-ci, pas question de paraître obéir à toutes les injonctions internationales. Dernier camp, l'armée fédérale s'est certes ralliée au nouveau pouvoir, mais elle peut toujours faire bloc autour des officiers supérieurs inculpés, comme le général Ojdanic.

L'Armée yougoslave a conservé une structure presque inchangée, s'adaptant a la disparition de la Fédération socialiste en 1991-1992 et à la ôrévolutionö démocratique du 5 octobre 2000. La police serbe a révélé avoir découvert dans la villa des Milosevic un plan de coup d'Etat militaire. Vraie ou fausse, l'accusation a au moins valeur d'avertissement pour cette armée qui se bat pour sa survie institutionnelle. De toute manière, l'opinion serbe a au moins clairement montré durant les évènements du week-end qu'elle voulait avant tout tourner pour de bon la page du passé. La coopération avec le TPI ne représente plus une question taboue que pour les milieux politiques belgradois.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 02/04/2001