Proche-Orient
Des proches d'Arafat préparent leur «sortie»
La politique israélienne de déligitimation d'Arafat commence à porter ses fruits : certains responsables palestiniens prennent les devants et se préparent à un nouvel exil avant d'y être contraints.
De notre envoyé spécial à Gaza
L'interview d'un haut-responsable de la sécurité dans la bande de Gaza se conclut par une étrange requête : «J'ai un visa Schengen valable pour un mois, pourriez-vous faire quelque chose auprès de votre ambassade pour que sa validité soit prolongée d'un an ?». Menacés d'anéantissement par Ariel Sharon, certains dirigeants liés à l'Autorité palestinienne prennent les devants. Ainsi, le ministre de la Justice Freih Abou Mdein a-t-il disparu de Gaza depuis bientôt deux mois. Selon une source indépendante, il est en Espagne où il possède une propriété. En conflit ouvert avec Yasser Arafat -ce dernier l'a mis en concurrence avec le procureur général du territoire autonome- M. Abou Mdein avait remis sa démission en mai au chef de l'autorité palestinienne qui l'avait refusée. Nul ne sait si et quand il reviendra à Gaza.
La plupart des ministres proches de Yasser Arafat ont des solutions de repli, en Europe, en Egypte ou au Canada, au cas où la situation tournerait au vinaigre, estime-t-on généralement dans les milieux diplomatiques à Jérusalem.
Mohamed Rachid, conseiller financier de Yasser Arafat et un des hommes utilisés par ce dernier pour ses contacts avec Ariel Sharon, dispose par exemple d'un passeport canadien, et nul doute qu'immédiatement après une éventuelle disparition du «Vieux», M. Rachid prendrait la poudre d'escampette. Aujourd'hui, bien peu prendraient le risque de quitter le navire. La mort en février dernier à Gaza d'Hicham Mikki, responsable de la télévision, imputée selon les services de renseignements occidentaux à une officine de la sécurité palestinienne, serait due au fait que ce proche d'Arafat, unanimement détesté parmi les Palestiniens, avait menacé de quitter Gaza pour l'Egypte où il avait commencé à faire des affaires. Une fois hors de Gaza, les langues peuvent évidemment se délier plus facilement.
Les adversaires islamistes d'Arafat sont renforcés
C'est au plus haut niveau que la stratégie israélienne a le plus d'impact. Elle affecte principalement les «Tunisiens», comme on appelle les Palestiniens rentrés d'exil avec Arafat, qui ont trusté l'essentiel des postes de responsabilité dans l'autorité.
Ceux qui craignent pour leur avenir ont été en général étroitement associés aux négociations avec Israël, négociations qui ont échoué, et dont un nombre croissant de Palestiniens leur font porter la responsabilité de cet échec. La déligitimation ne fait que renforcer les critiques de la population envers leurs dirigeants. Cela étant, le souhait israélien d'attendre qu'un nouveau leader «plus réaliste» remplace Arafat trouve encore peu d'écho chez les Palestiniens. Ces derniers critiquent ouvertement la gestion des affaires par leurs responsables, mais ils épargnent encore Arafat de leurs foudres. Ils sont conscients que sa disparition déboucherait sur le chaos, dont saurait profiter l'Etat hébreu.
Inévitablement, ces attaques renforcent les adversaires islamistes de l'Autorité, qui ont fait de la lutte anti-corruption et de l'incapacité d'Arafat à concrétiser les accords d'Oslo II de leurs principaux chevaux de bataille. Sur le terrain, en revanche, les institutions palestiniennes continuent à opérer du mieux qu'elles peuvent compte tenu de la situation et des bouclages imposés par Israël sur la Cisjordanie et la bande de Gaza.
En réaction à ces coups de boutoir israéliens, Yasser Arafat paraît soucieux de renforcer le front palestinien et de ne pas perdre le contrôle de la situation. Ainsi vient-il de nommer deux nouveaux gouverneurs dans les régions de Rafah et Khan Younès dans le sud de la bande de Gaza. Ce sont dans ces deux gouvernorats pauvres, peuplés de nombreux réfugiés, que les activistes livrent les affrontements à la fois les plus réguliers et les plus violents face aux soldats israéliens et aux colons voisins du Goush Katif. A Rafah, le nouveau gouverneur Majid Al-Agha, est un homme de l'extérieur, à la probité non-entachée, beaucoup moins lié au terrain que son prédécesseur, un membre du clan Samhadana, dont des membres font le coup de feu contre Israël durant la nuit.
L'interview d'un haut-responsable de la sécurité dans la bande de Gaza se conclut par une étrange requête : «J'ai un visa Schengen valable pour un mois, pourriez-vous faire quelque chose auprès de votre ambassade pour que sa validité soit prolongée d'un an ?». Menacés d'anéantissement par Ariel Sharon, certains dirigeants liés à l'Autorité palestinienne prennent les devants. Ainsi, le ministre de la Justice Freih Abou Mdein a-t-il disparu de Gaza depuis bientôt deux mois. Selon une source indépendante, il est en Espagne où il possède une propriété. En conflit ouvert avec Yasser Arafat -ce dernier l'a mis en concurrence avec le procureur général du territoire autonome- M. Abou Mdein avait remis sa démission en mai au chef de l'autorité palestinienne qui l'avait refusée. Nul ne sait si et quand il reviendra à Gaza.
La plupart des ministres proches de Yasser Arafat ont des solutions de repli, en Europe, en Egypte ou au Canada, au cas où la situation tournerait au vinaigre, estime-t-on généralement dans les milieux diplomatiques à Jérusalem.
Mohamed Rachid, conseiller financier de Yasser Arafat et un des hommes utilisés par ce dernier pour ses contacts avec Ariel Sharon, dispose par exemple d'un passeport canadien, et nul doute qu'immédiatement après une éventuelle disparition du «Vieux», M. Rachid prendrait la poudre d'escampette. Aujourd'hui, bien peu prendraient le risque de quitter le navire. La mort en février dernier à Gaza d'Hicham Mikki, responsable de la télévision, imputée selon les services de renseignements occidentaux à une officine de la sécurité palestinienne, serait due au fait que ce proche d'Arafat, unanimement détesté parmi les Palestiniens, avait menacé de quitter Gaza pour l'Egypte où il avait commencé à faire des affaires. Une fois hors de Gaza, les langues peuvent évidemment se délier plus facilement.
Les adversaires islamistes d'Arafat sont renforcés
C'est au plus haut niveau que la stratégie israélienne a le plus d'impact. Elle affecte principalement les «Tunisiens», comme on appelle les Palestiniens rentrés d'exil avec Arafat, qui ont trusté l'essentiel des postes de responsabilité dans l'autorité.
Ceux qui craignent pour leur avenir ont été en général étroitement associés aux négociations avec Israël, négociations qui ont échoué, et dont un nombre croissant de Palestiniens leur font porter la responsabilité de cet échec. La déligitimation ne fait que renforcer les critiques de la population envers leurs dirigeants. Cela étant, le souhait israélien d'attendre qu'un nouveau leader «plus réaliste» remplace Arafat trouve encore peu d'écho chez les Palestiniens. Ces derniers critiquent ouvertement la gestion des affaires par leurs responsables, mais ils épargnent encore Arafat de leurs foudres. Ils sont conscients que sa disparition déboucherait sur le chaos, dont saurait profiter l'Etat hébreu.
Inévitablement, ces attaques renforcent les adversaires islamistes de l'Autorité, qui ont fait de la lutte anti-corruption et de l'incapacité d'Arafat à concrétiser les accords d'Oslo II de leurs principaux chevaux de bataille. Sur le terrain, en revanche, les institutions palestiniennes continuent à opérer du mieux qu'elles peuvent compte tenu de la situation et des bouclages imposés par Israël sur la Cisjordanie et la bande de Gaza.
En réaction à ces coups de boutoir israéliens, Yasser Arafat paraît soucieux de renforcer le front palestinien et de ne pas perdre le contrôle de la situation. Ainsi vient-il de nommer deux nouveaux gouverneurs dans les régions de Rafah et Khan Younès dans le sud de la bande de Gaza. Ce sont dans ces deux gouvernorats pauvres, peuplés de nombreux réfugiés, que les activistes livrent les affrontements à la fois les plus réguliers et les plus violents face aux soldats israéliens et aux colons voisins du Goush Katif. A Rafah, le nouveau gouverneur Majid Al-Agha, est un homme de l'extérieur, à la probité non-entachée, beaucoup moins lié au terrain que son prédécesseur, un membre du clan Samhadana, dont des membres font le coup de feu contre Israël durant la nuit.
par Georges Malbrunot
Article publié le 31/07/2001