Attentats
Après la catastrophe, les questions
Alors qu'à Washington, le Pentagone est toujours en flammes et qu'à New York, les équipes de sauvetage sont toujours à pied d'£uvre à Manhattan, d'innombrables questions assaillent le président Bush et ses conseillers. Dans son intervention prononcée depuis le Bureau Ovale de la Maison Blanche, le président américain a tenté de commencer d'y répondre.
Comment une telle attaque massive, qui ne peut se comparer qu'à l'attaque japonaise de Pearl Harbour qui a précipité les Etats-Unis dans la guerre en 1941, a-t-elle été possible alors que les Etats-Unis disposent du plus formidable appareil de renseignements du monde ? Selon le secrétaire d'Etat Colin Powell, Washington n'a reçu acune indication particulière d'une telle menace, au-delà des menaces générales visant les intérêts américains. Les milliards de dollars dépensés par les différentes agences américaines pour espionner les communications téléphoniques, les télécopies, les courriers électroniques, les ressources combinées de ces agences mobilisées depuis trois ans pour traquer Oussama Ben Laden et ses partisans auront donc été dépensées en pure perte : un groupe d'hommes déterminés, supérieurement organisés, et fonctionnant dans un strict cloisonnement en évitant de recourir aux moyens de communication classique a suffi à déjouer le dispositif qui fait la fierté de l'Amérique.
Nul besoin non plus d'introduire sur le territoire américain des armes de destruction massives sophistiquées : il a suffi d'emprunter ces bombes volantes que représentent des appareils commerciaux remplis de kérosène. Enfin, lorsque l'émotion commencera à retomber (et en fait, sûrement bien avant), George W. Bush et son équipe ne pourront manquer de mettre en question le bien-fondé de leur projet de bouclier anti-missile. A supposer qu'il ait été pleinement opérationnel mardi 11 septembre, il n'aurait en rien empêché la catastrophe de se produire dans toute son ampleur.
Les Etats-Unis, qui contrairement à l'Europe et aux autres parties du monde, n'a jamais connu la guerre sur son territoire, hormis la guerre de Sécession, et dont le territoire a largement été jusqu'à présent épargné par les actes terroristes, vont devoir repenser entièrement leur mode de vie. De la façon la plus brutale qui soit, les Américains viennent de prendre conscience que leur pays n'est plus un sanctuaire. Selon toute vraisemblance, l'enquête confirmera que les terroristes ont pu mener à bien leurs actions en empruntant des vols intérieurs à partir d'aéroports où les contrôles de sécurité sont pratiquement inexistants.
La puissance américaine défiée
Les Etats-Unis ont été frappés au c£ur des symboles les plus forts de la puissance américaine : les tours jumelles de Manhattan, symbole du pouvoir financier, le Pentagone et le Département d'Etat, emblèmes de la puissance mondiale de l'Amérique. Sans perdre de temps, le président Bush a promis de sévères représailles, non seulement contre les auteurs de l'attaque, mais contre ceux qui les abritent. La riposte ne peut être qu'à la hauteur du défi. L'envoi de quelques missiles de croisières sur une usine désaffectée ou dans les montagnes désertiques de l'Afghanistan ne sauraient à l'évidence suffire. Mais avant d'envisager de vitrifier l'Afghanistan, l'Irak ou tout autre pays, le président américain devra identifier avec certitude les auteurs de l'attaque. A titre d'exemple, l'attentat d'Al Khobar (Arabie Saoudite) qui a coûté la vie à 19 GI's en juin 1996, les attentats simultanés d'août 1998 contre les ambassades américaines de Nairobi et Dar es Salaam, et l'attentat-suicide d'octobre 2000 contre le USS Cole dans le port d'Aden (17 morts) restent à ce jour impunis. Or, la pression de l'opinion américaine ne permettra sûrement pas à George Bush d'attendre le résultat d'une enquête pour réagir et réaffirmer son leadership, ouvertement défié. Or, les alliés qui ont manifesté leur solidarité sans faille après l'attaque de mardi risquent de prendre leur distance à l'égard de représailles indiscriminées.
A plusieurs reprises, George Bush a déclaré que les terroristes s'en étaient pris au «mode de vie américain». Au delà d'une rhétorique classique dans la bouche du locataire de la Maison Blanche, c'est bien l'American way of life qui est en cause. Par l'introduction d'un sentiment de vulnérabilité et la fin de la sanctuarisation du sol américain, comme on l'a vu, mais aussi par une menace tangible sur la santé de l'économie américaine. Si Bush s'est senti obligé d'affirmer que les «institutions financières restent solides et que l'économie américaine va tourner normalement», c'est que cela ne va pas de soi. Voici quelques jours, l'Amérique, qui ne veut pas croire qu'elle entre en récession, a pris connaissance de très mauvaises statistiques sur le chômage. Les attentats de mardi sont de nature à provoquer à court terme une crise de liquidités, les citoyens retirant massivement leurs avoirs des banques. Ils peuvent aussi, en frappant le moral des consommateurs, casser la consommation à un moment critique pour l'économie américaine.
Dans le deuil, l'Amérique montre son unité. Mais les polémiques ne devraient pas tarder à surgir.
Nul besoin non plus d'introduire sur le territoire américain des armes de destruction massives sophistiquées : il a suffi d'emprunter ces bombes volantes que représentent des appareils commerciaux remplis de kérosène. Enfin, lorsque l'émotion commencera à retomber (et en fait, sûrement bien avant), George W. Bush et son équipe ne pourront manquer de mettre en question le bien-fondé de leur projet de bouclier anti-missile. A supposer qu'il ait été pleinement opérationnel mardi 11 septembre, il n'aurait en rien empêché la catastrophe de se produire dans toute son ampleur.
Les Etats-Unis, qui contrairement à l'Europe et aux autres parties du monde, n'a jamais connu la guerre sur son territoire, hormis la guerre de Sécession, et dont le territoire a largement été jusqu'à présent épargné par les actes terroristes, vont devoir repenser entièrement leur mode de vie. De la façon la plus brutale qui soit, les Américains viennent de prendre conscience que leur pays n'est plus un sanctuaire. Selon toute vraisemblance, l'enquête confirmera que les terroristes ont pu mener à bien leurs actions en empruntant des vols intérieurs à partir d'aéroports où les contrôles de sécurité sont pratiquement inexistants.
La puissance américaine défiée
Les Etats-Unis ont été frappés au c£ur des symboles les plus forts de la puissance américaine : les tours jumelles de Manhattan, symbole du pouvoir financier, le Pentagone et le Département d'Etat, emblèmes de la puissance mondiale de l'Amérique. Sans perdre de temps, le président Bush a promis de sévères représailles, non seulement contre les auteurs de l'attaque, mais contre ceux qui les abritent. La riposte ne peut être qu'à la hauteur du défi. L'envoi de quelques missiles de croisières sur une usine désaffectée ou dans les montagnes désertiques de l'Afghanistan ne sauraient à l'évidence suffire. Mais avant d'envisager de vitrifier l'Afghanistan, l'Irak ou tout autre pays, le président américain devra identifier avec certitude les auteurs de l'attaque. A titre d'exemple, l'attentat d'Al Khobar (Arabie Saoudite) qui a coûté la vie à 19 GI's en juin 1996, les attentats simultanés d'août 1998 contre les ambassades américaines de Nairobi et Dar es Salaam, et l'attentat-suicide d'octobre 2000 contre le USS Cole dans le port d'Aden (17 morts) restent à ce jour impunis. Or, la pression de l'opinion américaine ne permettra sûrement pas à George Bush d'attendre le résultat d'une enquête pour réagir et réaffirmer son leadership, ouvertement défié. Or, les alliés qui ont manifesté leur solidarité sans faille après l'attaque de mardi risquent de prendre leur distance à l'égard de représailles indiscriminées.
A plusieurs reprises, George Bush a déclaré que les terroristes s'en étaient pris au «mode de vie américain». Au delà d'une rhétorique classique dans la bouche du locataire de la Maison Blanche, c'est bien l'American way of life qui est en cause. Par l'introduction d'un sentiment de vulnérabilité et la fin de la sanctuarisation du sol américain, comme on l'a vu, mais aussi par une menace tangible sur la santé de l'économie américaine. Si Bush s'est senti obligé d'affirmer que les «institutions financières restent solides et que l'économie américaine va tourner normalement», c'est que cela ne va pas de soi. Voici quelques jours, l'Amérique, qui ne veut pas croire qu'elle entre en récession, a pris connaissance de très mauvaises statistiques sur le chômage. Les attentats de mardi sont de nature à provoquer à court terme une crise de liquidités, les citoyens retirant massivement leurs avoirs des banques. Ils peuvent aussi, en frappant le moral des consommateurs, casser la consommation à un moment critique pour l'économie américaine.
Dans le deuil, l'Amérique montre son unité. Mais les polémiques ne devraient pas tarder à surgir.
par Olivier Da Lage
Article publié le 12/09/2001