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Proche-Orient

Le malaise des travaillistes

Shimon Peres a ouvertement critiqué la décision du gouvernement auquel il appartient de déclarer l’Autorité palestinienne «entité terroriste». Mais il reste au gouvernement.
Dans un communiqué publié mardi matin, le chef de la diplomatie israélienne Shimon Peres a dénoncé la «tentative de provoquer l’effondrement de l’Autorité palestinienne».

Le ministre des Affaires étrangères ne cherche plus à cacher ses désaccords avec la politique suivie par le chef de son gouvernement, Ariel Sharon. Ce n’est pas nouveau, mais les désaccords sont de plus en plus apparents. La réciproque est d’ailleurs vraie : à son retour de New York, où il avait affirmé devant l’Assemblée générale des Nations unies que la majorité des Israéliens étaient favorables à un État palestinien, le chef de file des travaillistes avait essuyé un déluge de critiques des ministres de droite qui lui reprochaient d’exprimer une politique personnelle, différente de celle que suit Ariel Sharon.

Depuis plusieurs mois, ce dernier maintient sous étroit contrôle le chef de la diplomatie d’Israël. en lui interdisant de rencontrer Arafat. Puis, lorsque la pression internationale devient trop forte, en lui interdisant, lorsqu’il le rencontre de parler politique ! Enfin, en nommant officiellement comme responsable des négociations avec les Palestiniens un officier supérieur encore connu pour être un ultra-nationaliste.

Les ministres expriment leurs doutes

Stoïquement, Shimon Peres avale les couleuvres, supporte en silence les avanies. Pour lui, l’important est de durer. Ce vétéran de la politique israélienne, qui a commencé sa carrière sous l’égide de Ben Gourion, est persuadé que, par sa seule présence au sein du gouvernement, il peut modifier le cours des choses. Le problème est qu’il semble aujourd’hui le seul à le penser encore, y compris au sein du parti travailliste. Certains dirigeants minoritaires, comme les anciens ministres «colombes» Shlomo Ben-Ami ou Yossi Beilin, l’avaient adjuré de ne pas prendre part à ce gouvernement d’union nationale. Et depuis son entrée au gouvernement, le pressaient de le quitter. La nouveauté est que ce point de vue est désormais partagé par l’ensemble des parlementaires travaillistes et que des ministres clés comme Ephraïm Sneh, ancien ministre de la Défense dans le gouvernement Barak, expriment ouvertement de telles interrogations. «Plus rien ne nous force à rester à tout prix au sein du gouvernement», a-t-il affirmé.

Les mauvaises langues –et elles sont nombreuses au sein du parti travailliste– ne manquent pas de rappeler que Shimon Peres a souvent menacé de démissionner, mais n’a jamais, tout au long de sa vie politique, quitté volontairement une fonction. Un éditorialiste du grand quotidien Haaretz allait récemment plus loin : «Si Shimon Peres n’existait pas, affirmait-il, Sharon devrait l’inventer». Il présente en effet tous les avantages : celui d’offrir au monde extérieur un visage avenant à la politique intransigeante définie par Ariel Sharon tout en préservant sa majorité parlementaire.

Il se peut, malgré tout, que les travaillistes, prenant conscience de leur influence dérisoire sur les décisions gouvernementales, finissent par quitter le gouvernement. Auquel cas, dans le climat guerrier qui prévaut actuellement en Israël, Ariel Sharon trouverait probablement sans difficulté une majorité de rechange sur d’autres bancs de la Knesseth. Quant au parti travailliste, il demeure paralysé depuis plusieurs mois par ses querelles internes et n’a toujours pas de leader, l’élection de septembre ayant été contestée par les deux prétendants à la direction du parti, le ministre de la défense Benyamin Ben Eliezer et le président de la Knesseth Avraham Burg.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 04/12/2001