Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Agriculture

José Bové passe les candidats au banc d’essai

Petit stand, grande affluence au salon de l’agriculture pour la Confédération paysanne, le syndicat de José Bové. Les candidats à la présidence de la République, tout particulièrement, y sont attendus et invités à répondre à trois questions sur l’avenir de l’agriculture.
Il est bien difficile de mener une conversation suivie avec José Bové, porte-parole emblématique de la Confédération paysanne, sur le stand de ce syndicat agricole au salon de l’agriculture. D’une main, José Bové décroche son téléphone mobile qui ne cesse de sonner et commente la manifestation qui a eu lieu le matin même au stand du ministère de l’Agriculture, distant de quelques dizaines de mètres. De l’autre main, il signe, à tour de bras, les dédicaces de son dernier livre «Paysan du monde» (Fayard) ou des autographes sur de simples bouts de papier que lui tendent ses admirateurs. Et, de fait, la travée où se situe le petit stand de la Confédération paysanne est quasiment bloquée en permanence par l’afflux des visiteurs qui viennent le voir, son éternelle pipe à la bouche, et, pour nombre d’entre eux, lui manifester leur soutien. Pourtant ce secteur du salon de l’agriculture, réservé aux organisations professionnelles et organismes techniques agricoles, est beaucoup moins spectaculaire que celui où trônent les vedettes des concours de beauté animale.

Les supporters anonymes du syndicat agricole minoritaire ne sont pas les seuls à s’y presser. Des candidats à la présidence de la République y viennent aussi volontiers et, sur place, ils sont invités à répondre à trois questions portant sur la réforme de la politique agricole commune (PAC), la «fracture sociale agricole» et les revenus des agriculteurs modestes, l’importation et la culture des organismes génétiquement modifiés (OGM).

Souligner les «manques»

Il y a, précise José Bové, ceux qui n’étaient pas invités : les deux candidats d’extrême-droite Jean-Marie Le Pen et Bruno Mégret. Et puis ceux qui étaient invités et qui ne sont pas venus. Comme le président de la République, Jacques Chirac, lors de l’inauguration du salon. «Il n’assume pas sa situation d’exception juridique, par rapport à moi qui suis à deux doigts de la prison», ironise le porte-parole de la Confédération paysanne. En effet, il est sous le coup d’une condamnation à trois mois de prison ferme pour le saccage d’un restaurant Mac Do en août 1999. De plus, et cela c’est rédhibitoire, Jacques Chirac «a renouvelé son soutien à la FNSEA», le syndicat rival.

Les autres, Lionel Jospin, Premier ministre socialiste, Jean-Pierre Chevènement, souverainiste, Noël Mamère, Vert ou Corinne Lepage, écologiste, se sont prêtés à l’exercice. Et qu’ont-ils gagné à ce jeu ? José Bové se borne, dit-il, à collecter les réponses et la Confédération paysanne ne donnera pas de consigne de vote. Toutefois, en publiant les résultats, le syndicat ne manquera pas de souligner les «manques» des uns ou des autres.

Sans vouloir noter les candidats, ni porter d’appréciation, indépendance oblige, José Bové ne peut s’empêcher de juger «frileuse» la position de Lionel Jospin sur la réforme de la PAC. Il qualifie de «généralités» les réponses de Jean-Pierre Chevènement et souligne le «double paradoxe» des deux candidats écologistes : Corinne Lepage a appartenu à un gouvernement qui a accepté l’importation de produits OGM des Etats-Unis et Noël Mamère soutient un gouvernement qui a autorisé la culture des OGM en plein champ. Ne convainc pas la Confédération paysanne qui veut.

Certains voisins du syndicat agricole, institutions et organismes ne voient pas sans une certaine envie l’intérêt dont José Bové est l’objet au salon. «Dès qu’il y a un attroupement et des cameras, c’est qu’il est là » observe l’un d’entre eux avec amertume. On lui reproche de s’enfermer dans sa tour d’ivoire, de manquer de perspectives à long terme, d’avoir réponse à tout sans écouter d’autres compétences. « Mais pas du tout, se défend-il, nous participerons au sommet de la FAO en juin à Rome, et nous allons faire notre entrée au conseil d’administration de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique). D’ailleurs l’opinion publique ne s’y trompe pas, elle sait que la Confédération paysanne est porteuse d’un message non corporatiste».



par Francine  Quentin

Article publié le 28/02/2002