Mali
Vingt-quatre candidats en lice pour la magistrature suprême
Les électeurs maliens devront choisir dimanche, parmi vingt-quatre candidats, ceux qu’ils souhaitent voir s’affronter au second tour de l’élection présidentielle prévue le 12 mai prochain. Une élection que les autorités maliennes, le président sortant Alpha Oumar Konaré en tête, veulent avant tout «transparente et réparatrice». Un millier d’observateurs, dont une centaine d’étrangers, doivent superviser le scrutin.
De notre correspond à Bamako,
Ousmane Sy, le ministre de l’Administration territoriale avait donné le ton en annonçant que le gouvernement malien souhaitait organiser des «élections réparatrices» par rapport à celles de 1997 boycottées par l’opposition malienne. A l’époque, les autorités du pays s’était trouvées face à un dilemme, «soit organiser des élections à la hâte, soit voir s’installer un vide constitutionnel». Elles avaient tranché en affirmant que «mieux valait organiser des élections que pas d’élections du tout». La Cour constitutionnelle avait auparavant annulé les législatives -une première en Afrique- et la présidentielle qui avait suivi avait été boycottée par les opposants maliens mais validée toutefois par les neuf sages de la Cour. Cette fois-ci pour donner toutes ses chances à un scrutin «propre», les autorités maliennes ont mis en place un attelage à trois roues. Le ministère de l’Administration territoriale a été ainsi chargé de l’organisation technique et matérielle du scrutin. La Délégation générale aux élections (DGE) s’est occupée de la bonne tenue du fichier électoral et du financement des partis politiques. Quant à la Commission nationale électorale indépendante (CENI) qui a un pouvoir d’alerte, elle a eu pour mission de superviser les élections.
La campagne électorale, qui s’est clôturée vendredi soir, s’est déroulée dans la bonne humeur et sans incidents majeurs, à l’exception de l’arrestation de deux personnes appréhendées après la disparition de cartes électorales. Certains l’ont même trouvée «aseptisée». Il n’y a pas eu en effet de réels débats de fond et les programmes des différents candidats ont été jugés presque identiques autour de thèmes comme la santé, l’éducation ou encore la lutte contre la pauvreté. A croire que les 24 candidats s’étaient passés le message : «Faisons la paix, pas la guerre».
Une élection à multiples enjeux
Deux anciens Premiers ministres du chef de l’Etat sortant sont en lice pour ce scrutin. Ibrahim Boubacar Keita est le candidat du Rassemblement pour le Mali (RPM). Ce politologue en rupture de ban avec son ancien parti l’Adéma, formation au pouvoir, a fait du terrain avec des milliers de kilomètres avalés au pas de charge tout comme l’ancien premier ministre Mandé Sidibé, exclu de l’Adéma pour avoir présenter sa candidature contre l’avis du parti qui avait choisi lui d’investir Somaïla Cissé. Ce dernier a mené une véritable campagne à l’américaine à bord d’un hélicoptère. L’ancien chef d’Etat le général Amadou Toumani Touré, affectueusement surnommé ATT, a dû ranger ses galons comme l’exige la loi pour se jeter dans l’arène. Vingt-sept partis politiques soutiennent sa candidature. Dr Choguel Maïga du Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR, ancien parti unique), Tiébilé Dramé du Parena, Me Mountaga Tall du CNID, Blaise Sangaré du CDS, sont également en lice. Et comme pour rappeler qu’il n’y a pas de campagne électorale sans folklore, Habib Dembélé, le Coluche local s’est invité à ce que tout le monde souhaite être «une fête électorale». «Je suis candidat par vocation et par provocation» assène t-il à qui veut l’entendre.
Cette élection présidentielle devrait permettre à chacun des candidats de mesurer «ce qu’il pèse réellement» dans la vie politique malienne. La visibilité est en effet brouillée depuis 1997 avec une Assemblée nationale où ne siège pas l’opposition. Ce scrutin devrait également permettre de connaître le niveau d’ancrage de la démocratie au Mali dix ans après la chute de l’ancien chef d’Etat, le général Moussa Traoré.
En quittant le pourvoir après dix ans à la tête de l’Etat, Alpha Oumar Konaré a tenu sa promesse de ne pas se représenter à l’issue de son deuxième mandat de cinq ans comme le prévoit la constitution. L’exemple est suffisamment rare en Afrique pour le souligner. Le président sortant n’a officiellement pas de dauphin même si il ne s’est pas gêné pour prononcer quelques phrases assassines. Il a notamment déclaré qu’il ne donnerait pas le nom de son candidat pour «qu’on ne le canarde pas». Il a également affirmé qu’il passerait «le témoin à celui qui porte les mêmes couleurs» que lui, celle de l’Adéma. Mais il a toutefois souligné que ce candidat devra «partager les mêmes valeurs» que lui. Enfin, il a déclaré de façon très sibylline «Ne faites pas du général ATT votre ennemi».
Dans un pays où le PMU est un sport national, les pronostics vont donc bon train. Le tiercé gagnant dans le désordre pourrait bien être «ATT-Soumaïla Cissé-Ibrahim Boubacar Keita». Le premier très populaire surtout chez les jeunes devrait se montrer capable de relever le défi et «gagner les élections sans parti propre» dans un pays où la politique est une affaire de professionnels. Le deuxième, après avoir connu des débuts difficiles, a réussi à s’imposer comme le candidat incontournable du parti au pouvoir alors que «ces petits camarades» cherchaient à lui savonner la planche. Quant à Ibrahim Boubakar Keita, beaucoup se demandent s’il sera le lion qui rugit ou le lion qui miaule.
Le scrutin de dimanche lèvera donc le voile sur toutes les spéculations des Maliens. Et comme le confie volontiers l’un des proches d’Alpha Oumar Konaré: «Ce qui est aujourd’hui très important pour le président de la République, c’est d’organiser des élections transparentes, et le 8 juin à 9 heures de passer le témoin au candidat élu par les Maliens».
Ecoutez également :
Les correspondances de RFI et les réactions des hommes politiques au Mali.
Les réactions des Maliens en France.
Ousmane Sy, le ministre de l’Administration territoriale avait donné le ton en annonçant que le gouvernement malien souhaitait organiser des «élections réparatrices» par rapport à celles de 1997 boycottées par l’opposition malienne. A l’époque, les autorités du pays s’était trouvées face à un dilemme, «soit organiser des élections à la hâte, soit voir s’installer un vide constitutionnel». Elles avaient tranché en affirmant que «mieux valait organiser des élections que pas d’élections du tout». La Cour constitutionnelle avait auparavant annulé les législatives -une première en Afrique- et la présidentielle qui avait suivi avait été boycottée par les opposants maliens mais validée toutefois par les neuf sages de la Cour. Cette fois-ci pour donner toutes ses chances à un scrutin «propre», les autorités maliennes ont mis en place un attelage à trois roues. Le ministère de l’Administration territoriale a été ainsi chargé de l’organisation technique et matérielle du scrutin. La Délégation générale aux élections (DGE) s’est occupée de la bonne tenue du fichier électoral et du financement des partis politiques. Quant à la Commission nationale électorale indépendante (CENI) qui a un pouvoir d’alerte, elle a eu pour mission de superviser les élections.
La campagne électorale, qui s’est clôturée vendredi soir, s’est déroulée dans la bonne humeur et sans incidents majeurs, à l’exception de l’arrestation de deux personnes appréhendées après la disparition de cartes électorales. Certains l’ont même trouvée «aseptisée». Il n’y a pas eu en effet de réels débats de fond et les programmes des différents candidats ont été jugés presque identiques autour de thèmes comme la santé, l’éducation ou encore la lutte contre la pauvreté. A croire que les 24 candidats s’étaient passés le message : «Faisons la paix, pas la guerre».
Une élection à multiples enjeux
Deux anciens Premiers ministres du chef de l’Etat sortant sont en lice pour ce scrutin. Ibrahim Boubacar Keita est le candidat du Rassemblement pour le Mali (RPM). Ce politologue en rupture de ban avec son ancien parti l’Adéma, formation au pouvoir, a fait du terrain avec des milliers de kilomètres avalés au pas de charge tout comme l’ancien premier ministre Mandé Sidibé, exclu de l’Adéma pour avoir présenter sa candidature contre l’avis du parti qui avait choisi lui d’investir Somaïla Cissé. Ce dernier a mené une véritable campagne à l’américaine à bord d’un hélicoptère. L’ancien chef d’Etat le général Amadou Toumani Touré, affectueusement surnommé ATT, a dû ranger ses galons comme l’exige la loi pour se jeter dans l’arène. Vingt-sept partis politiques soutiennent sa candidature. Dr Choguel Maïga du Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR, ancien parti unique), Tiébilé Dramé du Parena, Me Mountaga Tall du CNID, Blaise Sangaré du CDS, sont également en lice. Et comme pour rappeler qu’il n’y a pas de campagne électorale sans folklore, Habib Dembélé, le Coluche local s’est invité à ce que tout le monde souhaite être «une fête électorale». «Je suis candidat par vocation et par provocation» assène t-il à qui veut l’entendre.
Cette élection présidentielle devrait permettre à chacun des candidats de mesurer «ce qu’il pèse réellement» dans la vie politique malienne. La visibilité est en effet brouillée depuis 1997 avec une Assemblée nationale où ne siège pas l’opposition. Ce scrutin devrait également permettre de connaître le niveau d’ancrage de la démocratie au Mali dix ans après la chute de l’ancien chef d’Etat, le général Moussa Traoré.
En quittant le pourvoir après dix ans à la tête de l’Etat, Alpha Oumar Konaré a tenu sa promesse de ne pas se représenter à l’issue de son deuxième mandat de cinq ans comme le prévoit la constitution. L’exemple est suffisamment rare en Afrique pour le souligner. Le président sortant n’a officiellement pas de dauphin même si il ne s’est pas gêné pour prononcer quelques phrases assassines. Il a notamment déclaré qu’il ne donnerait pas le nom de son candidat pour «qu’on ne le canarde pas». Il a également affirmé qu’il passerait «le témoin à celui qui porte les mêmes couleurs» que lui, celle de l’Adéma. Mais il a toutefois souligné que ce candidat devra «partager les mêmes valeurs» que lui. Enfin, il a déclaré de façon très sibylline «Ne faites pas du général ATT votre ennemi».
Dans un pays où le PMU est un sport national, les pronostics vont donc bon train. Le tiercé gagnant dans le désordre pourrait bien être «ATT-Soumaïla Cissé-Ibrahim Boubacar Keita». Le premier très populaire surtout chez les jeunes devrait se montrer capable de relever le défi et «gagner les élections sans parti propre» dans un pays où la politique est une affaire de professionnels. Le deuxième, après avoir connu des débuts difficiles, a réussi à s’imposer comme le candidat incontournable du parti au pouvoir alors que «ces petits camarades» cherchaient à lui savonner la planche. Quant à Ibrahim Boubakar Keita, beaucoup se demandent s’il sera le lion qui rugit ou le lion qui miaule.
Le scrutin de dimanche lèvera donc le voile sur toutes les spéculations des Maliens. Et comme le confie volontiers l’un des proches d’Alpha Oumar Konaré: «Ce qui est aujourd’hui très important pour le président de la République, c’est d’organiser des élections transparentes, et le 8 juin à 9 heures de passer le témoin au candidat élu par les Maliens».
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par Serge Daniel
Article publié le 27/04/2002