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France : législatives 2002

La gauche à reconstruire

La gauche plurielle (PS-PCF-Verts-PRG-MDC) qui a gouverné pendant cinq ans (1997-2002), mais qui vient de subir un important revers aux élections législatives (178 sièges contre 319), doit désormais se réorganiser comme force d'opposition en dépit de sa fragmentation et de l'affaiblissement de certaines de ses composantes. Seule consolation : la capitale française a basculé dans son camp.
Au lendemain du second tour des législatives, les socialistes et les communistes sont les deux seules formations de l'ex-gauche plurielle à conserver un poids dans la nouvelle Assemblée nationale, où la droite domine désormais très largement. La gauche vient, en effet, de vivre une série de quatre dimanches noirs qui ont confirmé le décès de la majorité plurielle, que laissait présager une campagne présidentielle en ordre dispersé avec un candidat pour chacun des quatre partis de la coalition gouvernementale.

Pour le Parti socialiste, les résultats aux législatives se situent dans la lignée de l’élection présidentielle qui a vu l’élimination, dès le premier tour, de Lionel Jospin. Le PS passe de 248 députés à 140, ce qui lui permet de limiter les dégâts et de devenir la première force d’opposition. Aujourd’hui, après l’abandon par son ancien chef de file de toute activité politique, le PS va devoir affronter la lourde tâche de reconstruire une gauche sonnée et décimée malgré la chute de certaines de ces têtes d’affiche comme Martine Aubry, l’architecte de la très controversée loi sur la réduction du temps de travail, les 35 heures, Pierre Moscovici, ancien ministre aux Affaires européennes ou encore Raymond Forni, ancien président de l’Assemblée nationale. Des personnalités qui ont toutes échoué à garder leur siège de député.

Les communistes, quant à eux, sauvent de justesse leur groupe avec 21 députés contre 35 dans l’Assemblée précédente. Cette situation ne masque pas pour autant les grandes difficultés auxquelles est aujourd’hui confronté le parti alors que Robert Hue a été défait de son mandat de député dans le Val d’Oise. Soulagé par le maintien de son groupe parlementaire, le PCF va, à présent, débattre de la démarche de mutation voulue par leur président. Au fil des scrutins, les communistes ont perdu peu à peu leur audience au profit des socialistes d’abord, de l’extrême gauche et de l’extrême droite ensuite. Coincé dans sa position de parti de gouvernement sous Lionel Jospin, son discours, ni plus tout à fait révolutionnaire ni tout à fait social-démocrate, est apparu brouillé et a découragé, semble-t-il, ses électeurs traditionnels.

Cinq ans pour redresser la situation

Les Verts, pour leur part, sortent affaiblis de ces échéances électorales. Ils ne conservent que trois députés sur sept, malgré le résultat en progrès de Noël Mamère (5,25%) à la présidentielle. Ils perdent ainsi quatre sièges dont celui de leur chef de file Dominique Voynet et de Guy Hascoët, tous deux anciens ministres du gouvernement Jospin. Le Parti radical de gauche, quant à lui, passe de 14 à 7 élus. Enfin le Pôle républicain de Jean-Pierre Chevènement, sans aucun élu dans la future Assemblée, aura complètement raté son entrée en politique. Sa figure de proue n’ayant pas su garder son siège de député qu’il avait depuis 1973.

Après les résultats de dimanche dernier, la gauche ne peut échapper à la question de sa recomposition. Au Parti socialiste, les prétendants sont nombreux pour œuvrer dans ce sens : certains dirigeants ont même déjà lancé quelques pistes de réflexion. L’enjeu étant désormais de reconstruire une alternative gouvernementale crédible. Dès le 16 juin au soir, Jack Lang, nouvellement élu dans le Pas-de-Calais, plaidait pour «une véritable révolution intellectuelle» qui permette de «proposer assez vite une nouvelle alternative». «Nous avons cinq ans pour reconstruire», a expliqué François Hollande, le premier secrétaire du PS, qui a insisté pour que cela se fasse «dans l’unité» et «sans précipitation» pour réunir «les conditions d’une nouvelle alternance» d’ici 2007. La gauche va devoir «réfléchir», «reconstruire» et «réunir», a estimé Laurent Fabius, ancien ministre de l’Economie. Un autre ténor du PS, Julien Dray, a été plus critique en parlant d’une «prise de distance» de l’électorat populaire avec le PS et les autres partis de gauche, «d’une panne d’action concrète», et d’une absence de «deuxième souffle». «La question principale» est de savoir «pourquoi la gauche a perdu la confiance d’une partie des classes populaires et de la jeunesse», a expliqué Jack Lang. Il reste donc cinq ans à la gauche pour trouver des réponses et essayer de remédier à cette situation.

Lire également :
La deuxième mort de Lionel Jospin
(Editorial politique de Geneviève Goëtzinger)



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 18/06/2002