Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Immigration

Le mouvement des sans-papiers s’amplifie

Six ans après l’expulsion musclée des 300 sans-papiers africains qui occupaient l’église Saint-Bernard, 3 000 personnes sont descendues samedi dans les rues de Paris pour réclamer que la situation de dizaines de milliers d’immigrés vivant en France depuis des années en situation illégale soit enfin régularisée. Devant le succès de cette manifestation, plusieurs centaines de sans-papiers ont choisi de sortir de l’ombre dans l’espoir de voir enfin leur cas résolu. Une situation qui à la fois réjouit la coordination 93 à l’origine de ce nouveau mouvement de protestation mais qui l’inquiète également car elle craint d’être très vite débordée.
Le mouvement de protestation des sans-papiers a été relancé le 17 août dernier dans la région parisienne lorsqu’une centaine de personnes, représentant une vingtaine de nationalités différentes, a occupé la Basilique de Saint-Denis. Parmi ces immigrés en situation irrégulière, certains sont des demandeurs d’asile déboutés, d’autres vivent en France depuis des années et certains ont même des enfants français. L’occupation de la basilique s’est faite en total accord avec les autorités ecclésiastiques qui, soucieuses de venir en aide à des personnes «en détresse», ont choisi de les accueillir et de leur offrir «un lieu d’expression». «La basilique est un lieu stratégique et touristique que nous utilisons comme centre de diffusion des messages», a ainsi affirmé Ali Mansouri, le porte-parole de la Coordination 93 à l’origine de l’occupation de l’édifice religieux. «Nous avons travaillé sur cette action afin d’interpeller le gouvernement et la préfecture», a-t-il précisé en insistant sur la situation désespérée de nombreux sans-papiers. «Nos demandes sont méprisées alors que nous avons pourtant fourni des dossiers argumentés», a-t-il par ailleurs déploré.

Après l’occupation la semaine dernière de la basilique, les sans-papiers ont manifesté devant le siège du ministère des Affaires sociales mais en vain. Des représentants de la coordination 93 ont toutefois été reçus par la préfecture de Bobigny qui s’est engagée à étudier certains dossiers. Mais le point d’orgue de ce mouvement de protestation a été la marche de samedi au cours de laquelle près de 3 000 personnes sont descendues dans les rues de Paris pour réclamer la régularisation des sans-papiers. Cette manifestation, organisée à l’occasion du sixième anniversaire de l’évacuation par la force de 300 Africains de l’église Saint-Bernard, a été qualifiée de «nouveaux sursaut des sans-papiers» par la Ligue française des droits de l’homme qui estime qu’une telle mobilisation est nécessaire pour «lutter contre les projets qui se préparent sur le droit d’asile et l’immigration». La marche de samedi a également reçu le soutien des partis de gauche et des syndicats qui y ont vu «la première vraie mobilisation depuis l’arrivée du gouvernement Raffarin».

Les sans-papiers affluent à Saint-Denis

Au lendemain du succès de la manifestation de Paris, des centaines de sans-papiers sont sortis de leur clandestinité dans l’espoir de pouvoir remplir une demande de régularisation. La plupart d’entre eux ont ainsi cherché dès dimanche à adhérer à la Coordination 93 qui occupe depuis le 17 août dernier la basilique de Saint-Denis. Ce collectif doit en effet présenter mardi au ministère de l’Intérieur une liste de noms de sans-papiers pour lesquels il demande une régularisation «sans conditions» et de nombreux immigrés en situation illégale espèrent ainsi attirer l’attention des pouvoirs publics sur leur situation. Débordée, la Coordination 93 a dû suspendre dimanche les adhésions. «Il y avait plus de mille personnes sur le parvis et devant la basilique», a notamment estimé Ali Mansouri qui a invité les sans-papiers à créer «un nouveau collectif».

Forts du succès de la manifestation de samedi, les sans-papiers entendent poursuivre leur mobilisation pour «réveiller l’opinion publique» sur le sort des immigrés privés de titre de séjour. «Nous sommes en face d’un gouvernement de droite à qui nous voulons montrer que nous sommes en force et déterminés», a notamment affirmé Ali Mansouri. Le porte-parole de la coordination nationale des sans-papiers, Romain Binazon, a d’ailleurs d’ores et déjà promis une nouvelle occupation à Paris «avant le 20 septembre».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 26/08/2002