Serbie
Milutinovic se livre au Tribunal de La Haye
L’ancien président de la République de Serbie, Milan Milutinovic, s’est envolé lundi matin de Belgrade pour La Haye. Inculpé de crimes de guerre, il a choisi de se constituer volontairement prisonnier.
De notre correspondant à Belgrade
C’est un apparatchik yougoslave qui a toujours cultivé la fidélité et la discrétion qui a pris la route de La Haye. Diplomate de carrière, fidèle militant de la Ligue des communistes puis du Parti socialiste de Serbie (SPS), Milan Milutinovic n’est apparu que tardivement sur le devant de la scène politique. En 1997, il est élu président de la République de Serbie, mais il n’accède à la notoriété internationale qu’en dirigeant la délégation yougoslave aux négociations de Rambouillet sur l’avenir du Kosovo, en février-mars 1999. Conscient du risque d’une intervention occidentale, il aurait alors essayé de suggérer à Slobodan Milosevic une ligne de compromis. Lors du constat d’échec des négociations, quelques jours avant le début des bombardements de l’OTAN, il lance, dans un français hésitant, la formule: «ce qui sera, sera».
Malgré ce profil terne, Milan Milutinovic est inculpé de crimes de guerre, en même temps que Milosevic et d’autres responsables yougoslaves, comme l’ancien ministre Nikola Sainovic et le général Dragoljub Ojdanic, qui se sont rendus à La Haye en 2001. Lorsque le régime de Slobodan Milosevic s’effondre, le 5 octobre 2000, Milan Milutinovic reste en poste, jusqu’au terme normal de son mandat présidentiel, le 29 décembre dernier.
Prêt depuis longtemps à se constituer prisonnier
La cohabitation entre Milutinovic et les nouvelles autorités démocratiques de Belgrade s’est d’autant mieux passée que le président avait choisi de ne pas s’exprimer sur les sujets politiques. Le Parti socialiste lui a d’ailleurs vertement reproché de ne pas avoir essayé d’user de son pouvoir présidentiel pour essayer d’empêcher l’arrestation et le transfert à La Haye de Slobodan Milosevic.
En fait, Milan Milutinovic aurait même été prêt depuis longtemps à se constituer prisonnier, et il aurait eu des contacts très discrets avec le bureau de Belgrade du TPI dès le début de l’année 2001. Le gouvernement serbe l’aurait dissuadé de prendre trop tôt la route de La Haye. Un départ avant le terme de son mandat aurait en effet précipité la crise politique en Serbie, avec la nécessité de convoquer des élections présidentielles anticipées. De plus, il semble que Belgrade ait essayé de «vendre» Milan Milutinovic au meilleur prix.
Le Tribunal de La Haye et les USA multiplient les pressions pour obtenir l’arrestation de Radovan Karadzic et du général Ratko Mladic. L’ambassadeur américain pour les crimes de guerre, Pierre-Richard Prosper, doit ainsi se rendre dans la semaine à Belgrade. Or, l’arrestation de Ratko Mladic, qui jouit d’un important soutien dans la population, risque toujours de provoquer de violentes réactions. Pour prouver sa bonne volonté, Belgrade préfère donc envoyer à La Haye des bureaucrates comme Milan Milutinovic, dont le transfert n’a aucune chance de provoquer la moindre émotion populaire.
La Haye, il devrait s’en tenir à une ligne de défense prudente: il n’était responsable de rien, il ne pouvait pas donner d’ordres. Milan Milutinovic déclarait récemment: «je ne porte aucune responsabilité de commandement dans les conflits de l'ancienne Yougoslavie, parce que l'armée et la police n'étaient pas de mon ressort».
Cependant, cet homme du sérail dispose de précieuses informations sur le fonctionnement interne du régime de Belgrade. Milan Milutinovic espère bénéficier très vite d’une mesure de liberté conditionnelle et, selon certaines sources, il serait même prêt à témoigner contre Slobodan Milosevic. Les autorités de Belgrade soutiennent en tout cas sa demande de mise en liberté conditionnelle. Le Premier ministre Zoran Djindjic, et le ministre des Affaires étrangères, Goran Svilanovic, également responsable du comité gouvernemental pour la coopération avec le TPI, ont écrit en ce sens au Tribunal et à sa procureure générale, Carla Del Ponte.
Le départ de ce «gros poisson» vers La Haye fait gagner un peu de temps à Belgrade, mais les pressions ne devraient pourtant pas se relâcher pour obtenir enfin l’arrestation de Radovan Karadzic et de Ratko Mladic, les autorités serbes n’ayant toujours pas réussi à convaincre le TPI et la communauté internationale qu’elles ne savaient pas où se trouvaient les deux hommes.
C’est un apparatchik yougoslave qui a toujours cultivé la fidélité et la discrétion qui a pris la route de La Haye. Diplomate de carrière, fidèle militant de la Ligue des communistes puis du Parti socialiste de Serbie (SPS), Milan Milutinovic n’est apparu que tardivement sur le devant de la scène politique. En 1997, il est élu président de la République de Serbie, mais il n’accède à la notoriété internationale qu’en dirigeant la délégation yougoslave aux négociations de Rambouillet sur l’avenir du Kosovo, en février-mars 1999. Conscient du risque d’une intervention occidentale, il aurait alors essayé de suggérer à Slobodan Milosevic une ligne de compromis. Lors du constat d’échec des négociations, quelques jours avant le début des bombardements de l’OTAN, il lance, dans un français hésitant, la formule: «ce qui sera, sera».
Malgré ce profil terne, Milan Milutinovic est inculpé de crimes de guerre, en même temps que Milosevic et d’autres responsables yougoslaves, comme l’ancien ministre Nikola Sainovic et le général Dragoljub Ojdanic, qui se sont rendus à La Haye en 2001. Lorsque le régime de Slobodan Milosevic s’effondre, le 5 octobre 2000, Milan Milutinovic reste en poste, jusqu’au terme normal de son mandat présidentiel, le 29 décembre dernier.
Prêt depuis longtemps à se constituer prisonnier
La cohabitation entre Milutinovic et les nouvelles autorités démocratiques de Belgrade s’est d’autant mieux passée que le président avait choisi de ne pas s’exprimer sur les sujets politiques. Le Parti socialiste lui a d’ailleurs vertement reproché de ne pas avoir essayé d’user de son pouvoir présidentiel pour essayer d’empêcher l’arrestation et le transfert à La Haye de Slobodan Milosevic.
En fait, Milan Milutinovic aurait même été prêt depuis longtemps à se constituer prisonnier, et il aurait eu des contacts très discrets avec le bureau de Belgrade du TPI dès le début de l’année 2001. Le gouvernement serbe l’aurait dissuadé de prendre trop tôt la route de La Haye. Un départ avant le terme de son mandat aurait en effet précipité la crise politique en Serbie, avec la nécessité de convoquer des élections présidentielles anticipées. De plus, il semble que Belgrade ait essayé de «vendre» Milan Milutinovic au meilleur prix.
Le Tribunal de La Haye et les USA multiplient les pressions pour obtenir l’arrestation de Radovan Karadzic et du général Ratko Mladic. L’ambassadeur américain pour les crimes de guerre, Pierre-Richard Prosper, doit ainsi se rendre dans la semaine à Belgrade. Or, l’arrestation de Ratko Mladic, qui jouit d’un important soutien dans la population, risque toujours de provoquer de violentes réactions. Pour prouver sa bonne volonté, Belgrade préfère donc envoyer à La Haye des bureaucrates comme Milan Milutinovic, dont le transfert n’a aucune chance de provoquer la moindre émotion populaire.
La Haye, il devrait s’en tenir à une ligne de défense prudente: il n’était responsable de rien, il ne pouvait pas donner d’ordres. Milan Milutinovic déclarait récemment: «je ne porte aucune responsabilité de commandement dans les conflits de l'ancienne Yougoslavie, parce que l'armée et la police n'étaient pas de mon ressort».
Cependant, cet homme du sérail dispose de précieuses informations sur le fonctionnement interne du régime de Belgrade. Milan Milutinovic espère bénéficier très vite d’une mesure de liberté conditionnelle et, selon certaines sources, il serait même prêt à témoigner contre Slobodan Milosevic. Les autorités de Belgrade soutiennent en tout cas sa demande de mise en liberté conditionnelle. Le Premier ministre Zoran Djindjic, et le ministre des Affaires étrangères, Goran Svilanovic, également responsable du comité gouvernemental pour la coopération avec le TPI, ont écrit en ce sens au Tribunal et à sa procureure générale, Carla Del Ponte.
Le départ de ce «gros poisson» vers La Haye fait gagner un peu de temps à Belgrade, mais les pressions ne devraient pourtant pas se relâcher pour obtenir enfin l’arrestation de Radovan Karadzic et de Ratko Mladic, les autorités serbes n’ayant toujours pas réussi à convaincre le TPI et la communauté internationale qu’elles ne savaient pas où se trouvaient les deux hommes.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 20/01/2003