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Irak

Les alliés de Washington se concertent

Les partisans d’une intervention militaire contre le régime de Saddam Hussein sont sortis affaiblis des nombreuses manifestations pacifistes du week-end dernier. Tony Blair, Jose Maria Aznar et Silvio Berlusconi, les plus fervents alliés de George Bush, sont en effet plus que jamais pris en tenailles entre leur volonté de soutenir Washington et une opinion publique franchement hostile à une guerre en Irak. Le président Bush, qui reçoit vendredi soir le Premier ministre espagnol, devrait confirmer la détermination des Etats-Unis, partagée par Madrid, de désarmer coûte que coûte le régime de Saddam Hussein. A Rome, Tony Blair ne devrait pas avoir de mal à convaincre son homologue Silvio Berlusconi de renouveler son soutien à une option militaire. Il devrait en revanche éprouver plus de difficultés à justifier une telle action devant le pape Jean-Paul II.
Le soutien de Jose Maria Aznar à une guerre en Irak serait-il en train de faiblir ? La question se pose plus que jamais après les manifestations pacifistes qui ont réuni en Espagne le week-end dernier plusieurs millions de personnes et surtout après la rencontre jeudi du Premier ministre espagnol avec le président mexicain Vicente Fox, pas très favorable à une intervention militaire dans le Golfe. Les deux hommes ont en effet publié un communiqué commun dans lequel ils affirment être d’accord pour «accroître les efforts multilatéraux» pour «éliminer de façon pacifique» les armes de destruction massive de l’Irak. Ils ont également apporté leur soutien à la résolution conjointe des pays de l’Union européenne qui se sont prononcés lundi pour la poursuite des inspections. Les deux dirigeants ont enfin souligné «la nécessité de poursuivre les efforts internationaux contre le terrorisme et ont réitéré leur volonté d’approfondir la question, au sein de l’ONU, pour parvenir à de meilleurs résultats».

Cette déclaration commune condamne donc implicitement tout usage de la force contre l’Irak sans feu vert de l’ONU. Si elle ne reflète pas forcément la position espagnole, elle montre clairement que Jose Maria Aznar, en route pour rencontrer George Bush, n’a pas su convaincre le président Vincente Fox de rallier le clan des va-t-en guerre. Le Premier ministre espagnol s’est certes défendu de vouloir infléchir la position du Mexique, membre non permanent du Conseil de sécurité. «La réunion avec M. Fox était très intéressante et fructueuse», a-t-il notamment affirmé en soulignant n’avoir «à aucun moment cherché à faire pression sur le gouvernement mexicain». Mais Washington qui doit présenter la semaine prochaine un nouveau projet de résolution aux membres du Conseil de sécurité aurait bien eu besoin du soutien de Mexico, tant sa position semble minoritaire à l’ONU. L’administration Bush sait en revanche qu’elle peut compter sur le soutien de Jose Maria Aznar malgré ses récentes déclarations. Le Premier ministre espagnol sera en effet reçu dans le ranch texan du président américain, un privilège accordé à très peu de dirigeants.

Parallèlement, Washington a lancé une opération de charme en direction des pays africains membres du Conseil de sécurité. Le secrétaire d’Etat adjoint en charge de l’Afrique, Walter Kansteiner, s’est rendu en Angola où il s’est entretenu avec le président José Eduardo Dos Santos. Il doit également se rendre dans les jours qui viennent au Cameroun et en Guinée, un pays qui présidera le Conseil de sécurité au mois de mars. La voix de ces trois Etats est décisive pour le succès ou l’échec d’un projet de résolution sur l’Irak qui doit ouvrir la voie à une intervention contre le régime de Saddam Hussein. Washington qui cherche à tout prix à obtenir l’aval de l’ONU a d’autre part annoncé la visite la semaine prochaine aux Etats-Unis du Premier ministre bulgare, dont le pays est également membre non permanent au Conseil de sécurité.

Visite délicate de Tony Blair au Vatican

Officiellement le sommet Blair-Berlusconi n’est pas consacré uniquement à l’Irak puisque les deux hommes doivent se pencher sur la préparation de la présidence italienne de l’Union européenne et sur la coopération bilatérale notamment en matière de défense et d’immigration. Mais il ne fait toutefois aucun doute que le dossier irakien sera largement au centre des entretiens des deux hommes. Tony Blair devrait ainsi rassurer son homologue sur son accord pour une nouvelle résolution sur l’Irak. Silvio Berlusconi, pourtant fervent allié de George Bush, avait en effet créé la surprise en affirmant que l’Italie ne participerait pas une guerre sans l’aval de l’ONU. Et après la forte mobilisation des pacifistes la semaine dernière, Tony Blair qui doit lui-même affronter une opinion publique farouchement hostile à la guerre, a finalement réussi à convaincre le président américain de l’utilité d’une nouvelle résolution.

Tony Blair doit également rencontrer au cours de sa visite en Italie le pape Jean-Paul II. C’est la première fois que le souverain pontife, vivement opposé à une guerre en Irak –il a envoyé à Bagdad un émissaire spécial pour tenter de trouver une solution pacifique à la crise–, accepte de recevoir un dirigeant favorable à une intervention militaire dans le Golfe. Cette rencontre risque d’être délicate pour le Premier ministre britannique au lendemain de la prise de position des chefs des principales églises de Grande-Bretagne. Ces derniers ont émis de sérieux doute sur «la légitimité morale d’une guerre en l’Irak».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 21/02/2003