Irak
La défense de Saddam
«L'ennemi ne va pas débarquer dans les banlieues de Bagdad car il va mourir. Même s'il envoie un million de soldats, nos hommes vont les tuer», déclarait récemment Saddam Hussein en recevant des responsables de l´armée. Rodomontades ? Certainement, mais pour certains experts militaires et diplomates, il ne faut pas pour autant sous-estimer la capacité de nuisance et de résistance du raïs irakien.
De notre correspondant à Amman
Depuis des mois, Saddam Hussein se prépare à ce combat, peut-être son dernier. Tous ses discours récents montrent qu´il entend livrer son ultime bataille à Bagdad, où vivent 5 millions d´habitants, et déclencher une guérilla urbaine. Son fils cadet, Qoussaï, qui apparaît de plus en plus souvent à la télévision aux côtés de son père, a été chargé des plans de défense de la capitale et des provinces et dirige une sorte de «conseil de guerre». L´Irak a été découpé en quatre régions militaires: le centre et l´Euphrate ont été confiés à Yassine Flaihat, le sud à Hassan Ali Al-Majid, surnommé «Ali le chimique» et le nord à Izzat Ibrahim Al-Douri.
Ftayah Al-Raoui, un ancien responsable de la garde républicaine a, lui, été nommé à la tête de l´Armée de Jérusalem (Jeish Al-Qods) dans les provinces. Dans Bagdad, les «Fedayins de Saddam» dirigé par Oudaï, le fils aîné du président, seront chargés de protéger les installations militaire et civiles dans Bagdad.
Contrairement à 1991, le commandement militaire a été décentralisé pour anticiper la perturbation et l´interruption des communications après les bombardements américains, explique un expert occidental. Chaque gouvernorat dispose de son plan de bataille, supervisé par les militaires et la hiérarchie du parti Baas.
Un diplomate assure, lui, que grâce à des fibres optiques livrées par la Chine, des réseaux de communication ont été enterrés dans des galeries permettant de protéger des centres de commandement. «Ils seront extrêmement difficiles à repérer et à détruire», explique-t-il.
Les unités d´élite du régime, Garde républicaine et Garde républicaine spéciale, seraient aussi dotées de «trunkins», petits talkie-walkies. «Ces matériels peu coûteux permettent de crypter les conversations», explique un expert militaire, «on peut les brouiller mais on ne peut pas savoir ce qui ce dit entre deux interlocuteurs». Les unité irakiennes seraient aussi équipées de téléphones satellites de type Thuraya. «Les conversations peuvent être interceptées en fonction du satellite par lequel elles transitent, mais pas si elles passent sur Arabsat», poursuit-il.
Selon un ancien membre des services de renseignement irakiens, aujourd´hui en exil, «les troupes de Saddam disposent de camions équipés de matériels de réception et d´émission pour les communications». De fabrication française, ils ont été livrés dans les années 90 à partir du Maroc via la Syrie, en contrebande, et constituent un réseau mobile à travers le pays.
Les «mauvaises surprises» de Saddam
Dans l´organisation de sa défense, le régime bénéficie de plusieurs atouts: une connaissance parfaite du terrain, l´absence d´effet de surprise de la part de l´armée américaine et l´immersion des troupes irakiennes au sein de la population. Pour cet expert militaire, il est certain que Saddam Hussein réserve quelques mauvaises «surprises» aux GI´s dans Bagdad: rues minées, voitures piégées, snipers dans des hôpitaux ou écoles, utilisation d´armes chimiques pour paralyser leur avancée, etc.
Ses voisins, comme les pays du Golfe ou la Jordanie redoutent surtout le tir de SCUD ou l´envoi de drônes chargés d´armes chimiques ou biologiques. «Des Mig-29 et des Sukhoï, pouvant être équipés de charges chimiques, sont éparpillés dans des hangars sous-terrain prêts à décoller pour des missions suicides», affirme un ancien responsable irakien installé à Amman.
Même si les opinions sont partagées sur le sujet, Saddam pourrait aussi ordonner le sabotage des 1 500 puits de pétrole irakiens. «C´est la dissuasion du faible au fort: vous minimisez les gains de votre adversaire et vous provoquez une catastrophe écologique nécessitant des mois pour éteindre les incendies», affirme un diplomate.
Parmi ses moyens de riposte, le président irakien pourrait déclencher une vague d´attentats terroristes. En privé, un haut responsable de la sécurité jordanienne, familier de l´Irak, ne cache pas ses inquiétudes. «Les services de renseignement irakiens sont les plus performants après la CIA, le Mossad et l´ex-KGB et peuvent très facilement déstabiliser la Jordanie par exemple».
Si Saddam Hussein parvient à tenir pendant deux mois de campagne militaire, les Américains risquent d´être mis dans une position délicate à gérer tant sur le plan opérationnel que médiatique. «Rappelez-vous de la campagne en 1989 au Panama, rappelle un militaire: il a fallu plus de deux semaines aux soldats américains pour mettre la main sur le général Noriega alors qu´ils connaissaient le pays comme leur poche !»
Or, le sous-sol de Bagdad est truffé de tunnels. L´un d´entre eux part du QG des services de renseignement dans le quartier chic d´Al-Mansour, passe sous le siège de la direction nationale du Parti Baas et rejoint le «diwan» présidentiel. «D´une hauteur de 2 mètres, on y circule à pied ou à vélo», affirme un ancien des renseignements irakiens. Ces tunnels ont été construits dans les années 80, avec l´aide d´ingénieurs allemands. Les architectes irakiens ont été éliminés pour ne pas révéler les plans. Dans ce dédale, il existe aussi des salles de réunions secrètes qui ont servi pendant la guerre Iran-Irak.
Depuis des mois, Saddam Hussein se prépare à ce combat, peut-être son dernier. Tous ses discours récents montrent qu´il entend livrer son ultime bataille à Bagdad, où vivent 5 millions d´habitants, et déclencher une guérilla urbaine. Son fils cadet, Qoussaï, qui apparaît de plus en plus souvent à la télévision aux côtés de son père, a été chargé des plans de défense de la capitale et des provinces et dirige une sorte de «conseil de guerre». L´Irak a été découpé en quatre régions militaires: le centre et l´Euphrate ont été confiés à Yassine Flaihat, le sud à Hassan Ali Al-Majid, surnommé «Ali le chimique» et le nord à Izzat Ibrahim Al-Douri.
Ftayah Al-Raoui, un ancien responsable de la garde républicaine a, lui, été nommé à la tête de l´Armée de Jérusalem (Jeish Al-Qods) dans les provinces. Dans Bagdad, les «Fedayins de Saddam» dirigé par Oudaï, le fils aîné du président, seront chargés de protéger les installations militaire et civiles dans Bagdad.
Contrairement à 1991, le commandement militaire a été décentralisé pour anticiper la perturbation et l´interruption des communications après les bombardements américains, explique un expert occidental. Chaque gouvernorat dispose de son plan de bataille, supervisé par les militaires et la hiérarchie du parti Baas.
Un diplomate assure, lui, que grâce à des fibres optiques livrées par la Chine, des réseaux de communication ont été enterrés dans des galeries permettant de protéger des centres de commandement. «Ils seront extrêmement difficiles à repérer et à détruire», explique-t-il.
Les unités d´élite du régime, Garde républicaine et Garde républicaine spéciale, seraient aussi dotées de «trunkins», petits talkie-walkies. «Ces matériels peu coûteux permettent de crypter les conversations», explique un expert militaire, «on peut les brouiller mais on ne peut pas savoir ce qui ce dit entre deux interlocuteurs». Les unité irakiennes seraient aussi équipées de téléphones satellites de type Thuraya. «Les conversations peuvent être interceptées en fonction du satellite par lequel elles transitent, mais pas si elles passent sur Arabsat», poursuit-il.
Selon un ancien membre des services de renseignement irakiens, aujourd´hui en exil, «les troupes de Saddam disposent de camions équipés de matériels de réception et d´émission pour les communications». De fabrication française, ils ont été livrés dans les années 90 à partir du Maroc via la Syrie, en contrebande, et constituent un réseau mobile à travers le pays.
Les «mauvaises surprises» de Saddam
Dans l´organisation de sa défense, le régime bénéficie de plusieurs atouts: une connaissance parfaite du terrain, l´absence d´effet de surprise de la part de l´armée américaine et l´immersion des troupes irakiennes au sein de la population. Pour cet expert militaire, il est certain que Saddam Hussein réserve quelques mauvaises «surprises» aux GI´s dans Bagdad: rues minées, voitures piégées, snipers dans des hôpitaux ou écoles, utilisation d´armes chimiques pour paralyser leur avancée, etc.
Ses voisins, comme les pays du Golfe ou la Jordanie redoutent surtout le tir de SCUD ou l´envoi de drônes chargés d´armes chimiques ou biologiques. «Des Mig-29 et des Sukhoï, pouvant être équipés de charges chimiques, sont éparpillés dans des hangars sous-terrain prêts à décoller pour des missions suicides», affirme un ancien responsable irakien installé à Amman.
Même si les opinions sont partagées sur le sujet, Saddam pourrait aussi ordonner le sabotage des 1 500 puits de pétrole irakiens. «C´est la dissuasion du faible au fort: vous minimisez les gains de votre adversaire et vous provoquez une catastrophe écologique nécessitant des mois pour éteindre les incendies», affirme un diplomate.
Parmi ses moyens de riposte, le président irakien pourrait déclencher une vague d´attentats terroristes. En privé, un haut responsable de la sécurité jordanienne, familier de l´Irak, ne cache pas ses inquiétudes. «Les services de renseignement irakiens sont les plus performants après la CIA, le Mossad et l´ex-KGB et peuvent très facilement déstabiliser la Jordanie par exemple».
Si Saddam Hussein parvient à tenir pendant deux mois de campagne militaire, les Américains risquent d´être mis dans une position délicate à gérer tant sur le plan opérationnel que médiatique. «Rappelez-vous de la campagne en 1989 au Panama, rappelle un militaire: il a fallu plus de deux semaines aux soldats américains pour mettre la main sur le général Noriega alors qu´ils connaissaient le pays comme leur poche !»
Or, le sous-sol de Bagdad est truffé de tunnels. L´un d´entre eux part du QG des services de renseignement dans le quartier chic d´Al-Mansour, passe sous le siège de la direction nationale du Parti Baas et rejoint le «diwan» présidentiel. «D´une hauteur de 2 mètres, on y circule à pied ou à vélo», affirme un ancien des renseignements irakiens. Ces tunnels ont été construits dans les années 80, avec l´aide d´ingénieurs allemands. Les architectes irakiens ont été éliminés pour ne pas révéler les plans. Dans ce dédale, il existe aussi des salles de réunions secrètes qui ont servi pendant la guerre Iran-Irak.
par Christian Chesnot
Article publié le 17/02/2003