Tchétchénie
Un référendum encadré par les armes
Selon des résultats partiels, 96% des Tchétchènes ont approuvé le projet de constitution présenté par le Kremlin, 95% la loi sur une élection présidentielle et 96% celle des législatives. La participation à ce referendum qui s’est déroulé sous très haute surveillance militaire a été de 85%. Réagissant à ces résultats, le président russe Vladimir Poutine a affirmé lundi que la question de «l’intégrité territoriale de la Russie» et par la même occasion celle de l’indépendance de la petite république était désormais «close». Selon lui les Tchétchènes ont «choisi la paix».
De notre correspondant à Moscou
«Je suis convaincu que dans la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui le Kremlin, qui veut imposer une normalisation, ce processus est une impasse et on peut le résumer en deux mots : l’impuissance de la force». A deux pas du Kremlin, dans les bureaux de l’entreprise à laquelle il collabore, Salambek Maïgov reçoit sans discontinuer les journalistes qui en font la demande. Il est le nouveau représentant du président séparatiste tchétchène, Aslan Maskhadov, dont Moscou ne reconnaît plus la légitimité. Salambek Maïgov n’est ni un chef de guerre, ni un extrémiste. Il fait partie de cette diaspora tchétchène qui vit à Moscou, plutôt confortablement mais qui reste convaincue que le conflit en Tchétchénie ne peut s’achever sans des négociations avec le seul pouvoir légitimement élu.
Salambek Maïgov ne partage pas les options du président séparatiste tchétchène, Aslan Maskhadov. Il a même combattu ce dernier sur le terrain politique en se présentant à l’élection présidentielle de 1997. Mais aujourd’hui, il a accepté de représenter Aslan Maskhadov : sa nomination il y a quelques semaines n’a pas susciter de commentaires particuliers du Kremlin qui, pour le moment, refuse tout contact officiel avec la direction séparatiste.
Aujourd’hui, le pouvoir russe joue une autre carte, celle d’une normalisation à marche forcée. Et en dépit de la guerre qui se poursuit en Tchétchénie , Vladimir Poutine, élu sur la promesse d’en finir avec le séparatisme tchétchène et ses débordements, a décidé d’imposer ce référendum, première étape d’un processus politique destiné à discréditer une fois pour toutes le président tchétchène Aslan Maskhadov et à mettre en place à Grozny un pouvoir contrôlé par le Kremlin. Cette stratégie a-t-elle des chances de réussir ? Le président russe veut y croire et il a mis tout son poids dans la balance, promettant une large autonomie, des fonds fédéraux pour reconstruire la Tchétchénie, dévastée par deux guerres d’indépendance, et même une amnistie pour les rebelles. Le président russe, s’exprimant à la télévision de Grozny, a reconnu pour la première fois que l’armée commettait des exactions et qu’il fallait tout faire pour y mettre un terme. Vladimir Poutine demande donc une large approbation de la nouvelle Constitution.
La communauté internationale silencieuse
Sans doute sera-t-il entendu. En l’absence d’observateurs internationaux, rien ne garantira les résultats de ce scrutin. Et les pressions exercées sur la population permettront au pouvoir russe de se targuer d’une participation significative. Certains Tchétchènes voudraient même croire aux promesses du Kremlin mais sans grande illusion. Malgré les déclarations du Kremlin et du gouvernement russe, la Tchétchénie est toujours en état de guerre : 80 000 soldats y stationnent en permanence, pratiquant le racket systématique aux innombrables points de contrôle de la république, quand ce ne sont pas ces «opérations de nettoyage» au cours desquelles de jeunes Tchétchènes disparaissent pour des camps de filtration dont ils ne reviendront jamais.
Difficile dans ces conditions de parler de «normalisation» comme veulent le faire croire les autorités russes. On ne vit toujours pas en Tchétchénie, on survit dans les décombres des habitations bombardées au début de la deuxième guerre, dans des conditions précaires. Et les réfugiés d’Ingouchie, à qui on avait promis une aide au logement pour se réinstaller, ont très vite déchanté et certains ont préféré repartir.
Visiblement gênée, la «communauté internationale» est restée silencieuse ces derniers mois, refusant malgré tout de cautionner un scrutin qui se déroule sous contrôle militaire. L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et le Conseil de l’Europe ont renoncé à envoyer des observateurs, se contentant de dépêcher «une mission d’informations».
Aslan Maskhadov a mis en garde les organisations internationales et les capitales occidentales qui seraient tentées de reconnaître la légitimité de ce référendum : «ces organisations seraient discréditées», a déclaré le président indépendantiste. «Je ne pense pas que cela puisse être pris au sérieux», a-t-il ajouté.
Le hasard du calendrier ne favorise guère les séparatistes alors que le monde entier a les yeux tournés vers Bagdad. Et comme d’habitude, le Kremlin a limité la présence des journalistes, autorisés pour quelques heures seulement à se rendre sur place.
«Je suis convaincu que dans la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui le Kremlin, qui veut imposer une normalisation, ce processus est une impasse et on peut le résumer en deux mots : l’impuissance de la force». A deux pas du Kremlin, dans les bureaux de l’entreprise à laquelle il collabore, Salambek Maïgov reçoit sans discontinuer les journalistes qui en font la demande. Il est le nouveau représentant du président séparatiste tchétchène, Aslan Maskhadov, dont Moscou ne reconnaît plus la légitimité. Salambek Maïgov n’est ni un chef de guerre, ni un extrémiste. Il fait partie de cette diaspora tchétchène qui vit à Moscou, plutôt confortablement mais qui reste convaincue que le conflit en Tchétchénie ne peut s’achever sans des négociations avec le seul pouvoir légitimement élu.
Salambek Maïgov ne partage pas les options du président séparatiste tchétchène, Aslan Maskhadov. Il a même combattu ce dernier sur le terrain politique en se présentant à l’élection présidentielle de 1997. Mais aujourd’hui, il a accepté de représenter Aslan Maskhadov : sa nomination il y a quelques semaines n’a pas susciter de commentaires particuliers du Kremlin qui, pour le moment, refuse tout contact officiel avec la direction séparatiste.
Aujourd’hui, le pouvoir russe joue une autre carte, celle d’une normalisation à marche forcée. Et en dépit de la guerre qui se poursuit en Tchétchénie , Vladimir Poutine, élu sur la promesse d’en finir avec le séparatisme tchétchène et ses débordements, a décidé d’imposer ce référendum, première étape d’un processus politique destiné à discréditer une fois pour toutes le président tchétchène Aslan Maskhadov et à mettre en place à Grozny un pouvoir contrôlé par le Kremlin. Cette stratégie a-t-elle des chances de réussir ? Le président russe veut y croire et il a mis tout son poids dans la balance, promettant une large autonomie, des fonds fédéraux pour reconstruire la Tchétchénie, dévastée par deux guerres d’indépendance, et même une amnistie pour les rebelles. Le président russe, s’exprimant à la télévision de Grozny, a reconnu pour la première fois que l’armée commettait des exactions et qu’il fallait tout faire pour y mettre un terme. Vladimir Poutine demande donc une large approbation de la nouvelle Constitution.
La communauté internationale silencieuse
Sans doute sera-t-il entendu. En l’absence d’observateurs internationaux, rien ne garantira les résultats de ce scrutin. Et les pressions exercées sur la population permettront au pouvoir russe de se targuer d’une participation significative. Certains Tchétchènes voudraient même croire aux promesses du Kremlin mais sans grande illusion. Malgré les déclarations du Kremlin et du gouvernement russe, la Tchétchénie est toujours en état de guerre : 80 000 soldats y stationnent en permanence, pratiquant le racket systématique aux innombrables points de contrôle de la république, quand ce ne sont pas ces «opérations de nettoyage» au cours desquelles de jeunes Tchétchènes disparaissent pour des camps de filtration dont ils ne reviendront jamais.
Difficile dans ces conditions de parler de «normalisation» comme veulent le faire croire les autorités russes. On ne vit toujours pas en Tchétchénie, on survit dans les décombres des habitations bombardées au début de la deuxième guerre, dans des conditions précaires. Et les réfugiés d’Ingouchie, à qui on avait promis une aide au logement pour se réinstaller, ont très vite déchanté et certains ont préféré repartir.
Visiblement gênée, la «communauté internationale» est restée silencieuse ces derniers mois, refusant malgré tout de cautionner un scrutin qui se déroule sous contrôle militaire. L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et le Conseil de l’Europe ont renoncé à envoyer des observateurs, se contentant de dépêcher «une mission d’informations».
Aslan Maskhadov a mis en garde les organisations internationales et les capitales occidentales qui seraient tentées de reconnaître la légitimité de ce référendum : «ces organisations seraient discréditées», a déclaré le président indépendantiste. «Je ne pense pas que cela puisse être pris au sérieux», a-t-il ajouté.
Le hasard du calendrier ne favorise guère les séparatistes alors que le monde entier a les yeux tournés vers Bagdad. Et comme d’habitude, le Kremlin a limité la présence des journalistes, autorisés pour quelques heures seulement à se rendre sur place.
par A Moscou, Jean-Frédéric Saumont
Article publié le 23/03/2003