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Irak

L’opposition chiite entre «dictateur» et «agresseur»

Après plus de vingt ans d’exil, l’ayatollah Mohammed Baqr Hakim, chef du principal groupe de l’opposition irakienne espère bien rentrer en Irak prochainement. Mais il doit compter sur les «mécréants américains» pour débarrasser son pays de Saddam Hussein.

De notre correspondant à Téhéran

«Les Américains, qui ont une connaissance limitée de l'Irak et des Irakiens, sont tombés dans le piège tendu par le régime irakien, qui a réussi à les attirer dans les villes et les zones peuplées, ce qui a augmenté le nombre des victimes civiles». L'ayatollah Mohammed Baqr Hakim, chef de l’Assemblée suprême de la révolution islamique en Irak (Asrii), principal groupe de l’opposition chiite irakienne, basé et soutenu par l ‘Iran, trouve dans le déroulement de la guerre la justesse de son attitude.

«Dès le début, nous avons conseillé aux Américains de coopérer avec les groupes de l'opposition mais ils ont insisté pour mener l'opération seuls, c'est pourquoi ils rencontrent aujourd'hui tant de difficultés sur le terrain», déclare-t-il lorsqu’on lui demande ce qui pense de la situation militaire sur le terrain. Les Américains sont tombés dans le piège du régime irakien estime-t-il.

Il y a quelques jours, intervenant devant la presse, il envoyait dos à dos Américains et régime de Saddam Hussein, appelant les Irakiens à rester «neutres» dans cette guerre «qui est contraire à leurs intérêts». Il avait même menacé d’utiliser des armes pour combattre une domination des Américains sur l’Irak.

Plusieurs dizaines de milliers de combattants
Signe de la dégradation des relations entre les Etats-Unis et le principal groupe chiite irakien, le secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld a accusé il y a quelques jours les combattants de la brigade al-Badr, l'aile militaire de l'Assemblée suprême de la révolution islamique, d’être liés à l’Iran. La Brigade al-Badr est «entraînée, équipée et commandée par les Gardiens de la révolution», l’armée idéologique du régime iranien. «Nous considérerons que cette activité du corps Badr à l'intérieur de l'Irak ne nous aide pas», a-t-il ajouté.

«Les forces de la brigade Badr sont irakiennes et indépendantes et n'ont rien à voir avec les Gardiens de la révolution, y compris les forces de la brigade qui sont basées en Iran», a répliqué l’ayatollah Hakim. Le corps al-Badr compte sur le territoire iranien quelque 10 000 à 15 000 combattants selon les diplomates occidentaux et «plusieurs dizaines de milliers de combattants à l’intérieur même de l’Irak», selon l’ayatollah Hakim. Ce dernier a également affirmé qu’aucun de ses combattants n’étaient entré en Irak depuis l’Iran.

Malgré ces passes d’armes pour le moins inamicales, les contacts entre les deux parties n’ont pas été rompus. «Nous sommes neutres dans cette guerre mais nos discussions avec les Américains continuent», a affirmé l’ayatollah Hakim «Nous demandons aux Américains de limiter les pertes civiles et d'éviter de s'en prendre à la population», a-t-il affirmé. Selon lui, les discussions portent aussi sur l’après Saddam et l’opposition chiite insiste surtout auprès des Américains pour accepter le «rôle que doit jouer l'opposition irakienne dans le régime de transition».

En tout cas, pour le moment, il est encore trop tôt pour l’ayatollah Hakim, dont plus de vingt membres de sa familles notamment cinq de ses frères ont été tués par le régime de Saddam Hussein, de rentrer au pays après plus de vingt ans d’exil en Iran. «Je rentrera au pays le moment opportun» affirme-t-il sans préciser si la présence des Américains était un obstacle à son retour.



par Siavosh  Ghazi

Article publié le 02/04/2003