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Sri Lanka

Les Tigres tamouls en conclave à Paris

Les Tigres de libération de l’Eelam Tamoul sont réunis à Paris pour tenter de surmonter leurs divergences internes. Les politiques et les militaires de l’organisation, doivent se consulter afin de dégager une position commune sur la question du retour à la table des négociations.
C’est une réunion interne au mouvement qui se tient à Paris à partir de ce 21 août. Face au blocage de la situation, la France, en collaboration avec les autorités norvégiennes (qui parrainent le processus) et sri-lankaises, a proposé d’accueillir la rencontre entre les dirigeants de l’intérieur et ceux de la diaspora, habituellement basés à Londres. L’enjeu est crucial. La reprises des négociations en dépend. Les Tigres de l'Eelam tamoul (LTTE) doivent se prononcer sur la dernière offre de Colombo d’installation d’un conseil provisoire chargé d’administrer la région nord de l’île qu’ils contrôlent, et notamment son économie. Une formule ouvrant la voie à une possible autonomie politique et qui permettrait aux Tamouls de contrôler près du tiers des richesses du territoire national.

Les Tigres, qui attendaient mieux, ont rejeté les dernières propositions de Colombo et ont quitté la table des négociations le 21 avril. Ils souhaitaient la création immédiate d’une administration intérimaire dans les zones de guerre et accusent les autorités sri-lankaises d’être revenues sur les promesses formulées à l’ouverture des pourparlers, en septembre 2002. Le mois dernier, les autorités sri lankaises ont renouvelé leur proposition et, avant de donner une réponse définitive, les LTTE ont décidé de consulter des spécialistes du droit afin de mesurer l’étendue de l’autonomie laissée par les propositions de la partie adverse.

Depuis l’établissement du cessez le feu, en février 2002, puis le démarrage des négociations, six mois plus tard, la situation sri-lankaise s’est considérablement complexifiée. Outre le fait que l’exécutif sri-lankais traverse une période de cohabitation marquée par l’opposition entre le gouvernement et la présidence sur le bien-fondé des discussions, le mouvement tamoul est lui-même traversé par une crise profonde. Dix-huit mois sans combats ont soulevé l’espoir dans la partie nord du pays où les Tamouls, épuisés par un conflit de plus de vingt ans qui fait au moins 60 000 morts, comprennent mal l’intransigeance de leurs dirigeants. D’autant que la communauté internationale, lors de la conférence des bailleurs de fonds, boycottée par les LTTE, s’était déclarée prête à débourser 4,5 milliards de dollars pour faciliter la reconstruction. Mais à condition, évidemment, que les négociations reprennent et progressent.

Dérives violentes et lassitudes internationales

Plus inquiétant, on assiste à une recrudescence de la violence : escarmouches entre les soldats de Colombo et les Tigres, règlements de compte et assassinats politiques au sein des LTTE dont le monopole sur la partie nord du pays commence à être remis en cause dans les territoires qu'ils contrôlent. La levée de l’impôt «révolutionnaire» provoque parfois des résistances qui engendrent des représailles. Enfin, l’apparition d’une contestation au sein de la minorité tamoule musulmane, dans l’Est des régions contrôlées par le mouvement indépendantiste, s’est également traduite par l’assassinat de plusieurs membres de la communauté par des Tigres.

Tous ces facteurs vont lourdement peser sur les discussions parisiennes des LTTE et devraient fortement influencer sa décision car, indépendamment de la perspective historique de parvenir à la paix, si le mouvement veut maintenir à la fois sa crédibilité auprès des siens, de la communauté internationale et conserver sa réputation d’avoir été le fer de lance du mouvement de libération tamoul, il devra faire des concessions.

D’ores et déjà son attitude commence à provoquer la perplexité, voire l’hostilité de certaines capitales occidentales. En Grande-Bretagne, où sont réfugiés nombre de responsables du mouvement en exil, le député libéral Lord Avebury affirmait récemment dans la presse sri-lankaise que son pays manquait de fermeté à l’égard des LTTE en laissant ses militants libre de tout mouvement sur son territoire. Et il rappelait ses démarches pour obtenir l’interdiction des collectes de fonds des Tigres pour la libération de l’Eelam Tamoul outre-Manche.



par Georges  Abou

Article publié le 21/08/2003